Tandis qu'une troisième saison de la série True Detective vient d'être officiellement confirmée, revenons sur les deux premières. Format d’anthologie, casting de rêve, mise en scène soignée, scénario fascinant… En 2014, True Detective se hisse en tête des meilleures productions
télévisées. Sa première saison est unanimement saluée par la critique et le
public. La seconde, plus mitigée, lui enlève aussitôt son statut de fiction culte.
En huit épisodes seulement, la
création originale de Nic Pizzolatto pour HBO (Oz, Game of Thrones…), a réussi à bousculer les codes des séries, s'établissant comme une référence. Pizzolatto, écrivain américain, situe son récit en
Lousiane en 2012. Deux flics sont interrogés par leurs confrères. Ils se
remémorent une enquête datant d’une petite vingtaine d’années, d’un meurtre a priori résolu, après qu’un assassinat similaire a été commis. C'est l’occasion de suivre la double
investigation (celle du passé en flash-back et la nouvelle) mais, surtout,
l’évolution du parcours psychologique et sentimental des deux hommes.
Le duo est campé par deux
pointures du cinéma : Woody Harrelson est Martin Hart, garçon bourru et sympathique,
Matthew McConaughey joue l’hypnotisant et solitaire Rust Cohle. Le second est
alors en pleine reconnaissance dans le monde du septième art après un virage
indépendant (Killer Joe, Dallas Buyer Club) habilement équilibré
avec des blockbusters intelligents (Le
Loup de Wall Street, Interstellar).
L’alchimie du binôme séduit d’emblée et
on se passionne pour son histoire. La justesse des dialogues et
l’interprétation de McConaughey prennent le dessus sur l’enquête, qui se
conclut sans twist mais avec une légère envolée mystique — chute décevante pour
certains.
Derrière la caméra, Cary Joji Fukunaga, réalisateur des films Sin Nombre et Jane Eyre, propose un travail digne du grand écran : un génial
plan séquence d’action de six minutes, de nombreuses scènes contemplatives,
aériennes… le tout sublimé par une excellente direction de la photographie.
L’ensemble fait des merveilles, la série est qualifiée, à juste titre, de « culte ».
Le saviez-vous ?
Le Roi en jaune (The King in Yellow en VO), recueil de nouvelles de l'écrivain américain Robert W. Chambers, publié en 1985, est l'une des sources d'inspiration de Pizzolatto, avec entre autres les œuvres de Stephen King et Raymond Chandler.
Il a connu un puissant regain de vente lors de la première diffusion de la série. Les lecteurs pensaient y trouver des indices sur l’identité du meurtrier. En vain !
L’exploit n'est pas réitéré
l’an suivant puisque la deuxième saison de True
Detective, diffusée mi-2015, accumule les défauts et les lourdeurs.
Toujours écrite par Pizzolatto, elle tente une nouvelle incursion policière, en
Californie contemporaine cette fois. Au casting, un flic corrompu (Colin
Farrell, qui peine à convaincre), un plus jeune (Taylor Kitsch, plutôt fade) et
une dernière plus intéressante (parfaite Rachel McAdams).
Face à eux, un
couple en pleine rédemption (Vince Vaughn, excellent, et
Kelly Reilly, sous-exploitée), plus attachant. L’histoire se perd dans
un flot d’incompréhensions et d’enjeux troubles. La réalisation passe de
main en main, des scènes sortent du lot mais on oublie aisément ces
nouveaux épisodes. Il faut toutefois relativiser, si la barre n’avait pas été
placée aussi haut, nul doute que cette seconde salve aurait été plus appréciée. HBO a tout de même prolongé le contrat du créateur jusqu'en 2018, année où l'on devrait découvrir une troisième saison. Sans se précipiter cette fois et en ayant un recul nécessaire pour ne pas commettre les erreurs de la deuxième.
Si vous ne connaissez pas True Detective, on ne peut que vous conseiller de regarder sa première saison, puissante et passionnante. Un engagement de huit épisodes seulement pour un plaisir cinéphile et "sériephile", ça ne se refuse pas !
(Cet article a initialement été publié dans Séries Saga #2 en juin 2016.)