On l'avait découvert en 1981 dans Les Visiteurs du Mercredi, il revient en force chez Kana, c'est le grand retour du Capitaine Flam !
Voilà encore un personnage mythique des années 80 qui fait son retour en BD sous la plume et le crayon d'une équipe française. Tout d'abord, il faut savoir que ce brave Capitaine Flam, avant d'être le héros d'un dessin animé japonais bien connu, est inspiré d'une série de romans intitulée Capitaine Futur et écrite dans les années 40 par Edmond Hamilton (VF dispo aux éditions Le Belial'). La précision est importante car, contrairement à ce que l'on a pu constater avec Goldorak ou Saint Seiya, il ne s'agit pas ici d'une création originale mais bien d'une nouvelle adaptation de la première histoire de l'auteur américain, à savoir L'Empereur de l'Espace, renommée pour l'occasion L'Empereur Éternel.
Après une brève présentation des origines de Flam (de son vrai nom Curtis Newton) et de son futur équipage (le professeur Simon, un cerveau sous cloche volante ; Crag, un robot de deux mètres de haut et pesant une tonne ; et Mala, un androïde métamorphe), l'on entre directement dans l'action. Le gouvernement intersidéral a de bien mauvaises nouvelles de la planète Dénef. Une épidémie d'horribles et brutales mutations serait en cours, ce qui est confirmé par le retour d'un agent envoyé sur place, qui a le bon goût de se transformer en monstre sanguinaire dès son arrivée. Il est alors décidé de faire appel au Captaine Flam, une sorte de savant-aventurier très populaire et opérant en freelance. À toutes fins utiles, les autorités décident de lui adjoindre Johann Landor, une jeune femme faisant partie de la police des planètes et qui voit d'un mauvais œil l'intervention du capitaine qu'elle prend pour un bellâtre égocentré.
Toute la petite équipe embarque donc à bord du cyberlab, destination Dénef. L'arrivée est quelque peu mouvementée et Flam ne va pas tarder à découvrir un adversaire redoutable, à l'origine des fameuses mutations...
Voyons maintenant comment tout cela se présente. Nous sommes sur du 159 planches, tout de même, avec un découpage très "comics" (donc avec des cases moins nombreuses mais plus grandes que celles d'une BD franco-belge classique). Les dessins d'Alexis Tallone sont proprement superbes. Les personnages sont parfaits, les décors et vaisseaux souvent impressionnants, et la colorisation d'Annelise Sauvêtre et du studio Arancia vient magnifier tout ça. Visuellement donc, c'est propre et efficace.
En ce qui concerne le scénario... c'est un peu plus compliqué. C'est Sylvain Runberg qui est crédité ici, mais on l'a vu, il ne s'agit pas d'un nouveau récit mais bien d'une adaptation d'une histoire déjà existante. Celle-ci est d'ailleurs plutôt bonne, avec un univers qui tient la route et un mélange d'aventure, d'action et de scènes plus "intimistes", dédiées au développement des personnages. Ces derniers demeurent assez basiques, avec le héros au cœur pur, la jolie fille amoureuse dudit héros, les deux acolytes qui se chamaillent et se balancent des vannes, etc. Mais tout cela est somme toute bien fichu.
Reste donc le véritable travail du scénariste (puisque l'histoire n'est pas de lui), à savoir les dialogues. Et là, malheureusement, on ne peut pas dire que ce soit à la hauteur. Malgré le fait que le texte soit très simple, il présente des erreurs et des maladresses assez effarantes. D'autant que l'auteur n'est pas un jeunot et qu'il a déjà quelques BD à son actif. Par exemple, on trouve à plusieurs reprises le désastreux "il est un". Or, on peut dire "c'est un pilote" ou "il est pilote" mais certainement pas "il est un pilote". C'est du langage courant et parfaitement banal, qui, à la question "que fait ton pote dans la vie ?", répondrait "il est un boulanger" ? C'est ridicule. Et pourtant on retrouve cette formulation un peu partout : "il était un ami de mes parents" (page 27) ; "il est un homme qui respecte les règles" (page 27) ; "il est un excellent apprenti mécano" (page 56). Et lorsqu'il n'y a pas de faute de grammaire au sens strict, l'on trouve des formulations maladroites, du genre "nous savons qui il est" (page 142), alors que l'on parle d'un vaisseau. Il aurait fallu dire, par exemple, "nous savons à qui il appartient" ou juste "nous savons qu'il s'agit du cyberlab". On peut relever aussi "son plan de reconquête de la planète contre les humains" (page 150). Encore une phrase mal foutue. Il manque quelque chose avant "contre les humains" pour que ce soit correct, comme "et de guerre" par exemple. Et il faut ajouter à tout cela les inévitables coquilles, comme dans "il est temps pour nous rentrer sur Terre" (page 163).
Si même l'Académie rappelle la règle évoquée plus haut, je ne pensais pas qu'il serait nécessaire un jour de l'expliquer à un auteur, qui est quand même censé maîtriser au moins le français courant (ce qui n'est pas suffisant pour écrire de bonnes histoires, on parle ici d'un simple niveau de français scolaire et non littéraire, c'est vraiment l'hygiène de base, comme le fait d'avoir des ustensiles propres en cuisine, on n'a pas encore attaqué la recette proprement dite). Certains auteurs de BD (c'est pour l'instant moins le cas dans le secteur des romans) ont un niveau inférieur à celui du cancre de ma classe en primaire il y a plus de 40 ans. La chute est vertigineuse. J'ai l'air sans doute, pour certains, d'ergoter, mais il ne s'agit tout de même pas d'un détail. Non seulement le scénariste n'est pas capable d'écrire correctement une phrase simple, mais personne (relecteur, superviseur éditorial) ne le corrige. Et le problème, c'est qu'en publiant de telles âneries, elles vont s'insinuer dans l'esprit des jeunes lecteurs et des futurs auteurs. Car tous s'abreuvent à la même et unique source littéraire : les livres publiés.
Bon, après cette longue mais nécessaire parenthèse, revenons à notre Flam. Voilà un album présentant une histoire certes déjà connue mais bien écrite et qui bénéficie de graphismes léchés et fort jolis. On a droit aussi à deux planches de dessins "bonus", qui font référence à la résolution de l'intrigue. Tout cela est donc bien présenté et agréable à lire, dommage que le texte ne soit pas exempt d'erreurs trop énormes pour ne pas nuire à l'ambiance globale et à l'immersion.
Un album tout de même vivement conseillé et qui devrait convenir autant aux nostalgiques qu'à ceux qui découvriront le personnage.
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