Inauguration d'une rubrique First Look qui revient sur les premiers épisodes de séries mythiques. On commence aujourd'hui avec Valérian et Laureline.
Petit préambule tout d'abord, j'ai bien dormi et mon cul va bien. Je ne suis pas devenu cinglé, si je vous livre ces confidences triviales, c'est seulement pour vous rassurer sur l'inefficacité des poupées de Babelio. N'hésitez pas à cliquer sur le lien, lire le post et le partager si ce n'est déjà fait (j'ai rajouté un cache qui permet de constater la mesquinerie du site et ses procédés hautement discutables). Fin du préambule.
Vous le savez peut-être, une adaptation cinéma, par Luc Besson, est prévue pour cet été. Mais bien entendu, à la base, il y a la BD écrite par Pierre Christin et dessinée par Jean-Claude Mézières. Valérian, agent spatio-temporel voit le jour en 1967, dans la revue Pilote, mais c'est au premier album, datant de 1970, que nous allons nous intéresser aujourd'hui. Intitulé La Cité des Eaux Mouvantes, il constitue un mélange de science-fiction et d'aventure saupoudré d'humour.
Commençons par planter le décor.
Nous sommes au XXVIIIe siècle. Valérian et Laureline sont des agents du service spatio-temporel de Galaxity, la capitale de l'empire galactique. Car la Terre, suite à une période sombre, est devenue en effet une puissance à l'échelle cosmique. Le SST et ses agents ont pour but de préserver les intérêts de Galaxity, notamment en voyageant dans le temps pour empêcher les modifications du passé lorsque cela est nécessaire. Plutôt cool comme job.
Précisons que nous n'allons pas juger l'intégralité de la série, le principe de ce First Look est bien de s'intéresser aux premiers pas de Valérian, avec tous les défauts que l'on peut imaginer pour un premier album. Par la suite, les histoires s'étofferont, les missions des agents seront plus subtiles, les thématiques plus diverses, le tout étant blindé de références à la littérature, au cinéma ou à la peinture. Donc si la série a perduré et est devenue aussi célèbre, ce n'est pas pour rien. Elle possède de véritables qualités.
Par contre, pris isolément, ce premier album est un peu... mitigé. C'est le moins que l'on puisse dire. Bien qu'il soit aussi assez révolutionnaire, non seulement par le thème SF - peu courant à l'époque en BD en France - et par le style graphique, qui s'éloigne de la ligne claire tout en conservant un côté épuré. Le résultat est un mélange entre Franquin, Morris et Moebius. Pas dégueulasse et même souvent percutant.
Le récit débute alors que Xombul (ah des Xombul, pas la peine de chercher dans l'annuaire, t'en trouveras pas des tonnes) s'échappe de prison et se barre en 1986, période trouble normalement interdite pour les agents. Finalement, le SST se dit qu'il va violer ses propres règles et envoie Valérian aux trousses du fameux Xombul. On va pas s'emmerder avec le règlement les gars. Surtout que sinon, il n'y a plus d'histoire.
Très vite, l'on se rend compte que 1986, ça craint comme époque. En effet, un stock de bombes à hydrogène entreposées non loin du pôle Nord (pratique le coin pour ranger ses merdes) a pété, causant un réchauffement climatique et l'engloutissement de nombreuses villes. Xombul, qui a de grands projets pour la planète, va créer des robots avec l'aide d'un scientifique local et tenter de s'emparer de secrets technologiques lui permettant d'arriver à ses fins.
Toute cette première aventure est donc une suite de péripéties où Valérian, rejoint par Laureline, déjoue les plans de l'ambitieux maboul.
Autant le dire, ce n'est pas toujours passionnant. Loin de là. Certaines scènes sont vraiment présentes pour rallonger la sauce, sans faire pour autant avancer l'intrigue. Les auteurs utilisent également beaucoup ce procédé, courant à l'époque, qui consiste à décrire en texte ce qui est déjà montré en dessin, ce qui donne une impression de "non-immédiateté" des évènements, ce qui nuit à l'immersion. Les personnages sont, de plus, encore très rudimentaires. L'on va dire que Valérian est caractérisé par le fait qu'il est un type plutôt courageux, futé et débrouillard, et Laureline par le fait que c'est... une nana. Oui, c'est basique quoi.
Si ce premier opus (qui n'explique pas comment Valérian et Laureline se rencontrent, il faudra attendre pour cela le tome 0 qui... viendra plus tard) n'est pas très SF, il est tout de même dépaysant : New York post-ap, cataclysmes, parc de Yellowstone, balades à cheval, en avion, pour finir dans l'espace à bord d'un satellite, on voit du pays et il se passe des choses !
Malheureusement, même s'il convient de prendre en compte l'évolution de la narration (très différente en 1970), l'on sait bien que si l'on n'est pas attaché aux personnages, qu'il n'y a pas d'enjeux, de profondeur, d'habillage si l'on peut dire, l'on a beau avoir de l'action non-stop, on
En plus de cette narration datée et peu efficace, il faut noter la piètre qualité du texte et du lettrage (alors pourtant que la version actuelle a été modifiée). Je sais bien que les dessinateurs apprécient les lettrages à la main, ce qui peut se comprendre, mais là... on se dit que le numérique aurait été bien utile. Entre les espaces qui manquent, les fins de phrase collées à la bulle, les pavés de texte non centrés, les interlignes qui varient, ça fait peut-être "roots" mais ça fait surtout "pas abouti".
Quant au texte lui-même, il contient son lot de coquilles : mots qui sont passés à la trappe ("quelque d'assez étonnant"), traits d'union en trop ou en moins, genre aléatoire ("le vidéo"), et, là aussi, une utilisation des points de suspension systématique qui n'a aucun sens.
Le point culminant du binz étant un "ce ne sont pas les flics qui t'envoyent", qui vraiment a failli faire péter notre enculomètre de la langue française [1]. Oui, c'est un outil dont nous disposons et qui nous permet de mesurer le degré de déchirure anale de la grammaire. Parce que, "ils envoyent", en vieux français médiéval, peut-être, mais en français moderne, non.
Du tout...
L'on rencontre également parfois des choix logiques assez étranges. Par exemple, "de nombreuses demi-heures plus tard". Ben... si les demi-heures sont nombreuses, est-ce que ça ne serait pas plus pratique de les compter en heures ? Si, hein ?
Ou alors, peut-être qu'en 1970 l'on ne mesurait pas le temps de la même manière.
- Ah quand même ! Tu foutais quoi ? Ça fait des quarts d'heure que je t'attends !
- C'est pas de ma faute ! J'ai passé plus de huit demi-heures dans les bouchons...
Enfin, bon, on ne va pas sodomiser des insectes, je reconnais que ce n'est pas grave.
En conclusion, pour une entrée en matière, c'est loin d'être parfait. Néanmoins, non seulement ça faisait son petit effet à l'époque mais, en plus, cela a donné une saga SF culte et suffisamment riche pour inspirer encore des réalisateurs presque 50 ans après son lancement. Et ça, ce n'est quand même pas rien.
Si vous souhaitez vous faire votre propre opinion, sachez que ce tome est actuellement disponible gratuitement (ce qui n'est vraiment pas cher) sur Izneo (je n'ai pas d'intérêts chez eux, je le précise).
À découvrir comme tremplin vers une saga dans l'ensemble bien supérieure à ce premier opus.
[1] Alors, pour faire simple, on va dire que les "ils croivent", "ils envoyent", "je m'ai trompé", "c'est qu'est-ce que je dis", "j'en sais pas" et autres joyeusetés, ça aboutit dans le rouge de l'enculomètre. Ah si, parce que ça fait déjà bien mal au... enfin, à la langue.
Du coup, toi aussi, procure-toi l'enculomètre de la langue française (55,99 € TTC) et teste tes amis ! De belles soirées de fous rires en perspective !
L'enculomètre de la langue française est un produit © UMAC. Respectez les conditions d'utilisation. Déconseillé aux candidats de télé-réalité et aux footballeurs professionnels.
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