Se détachant du commun des magazines dédiés aux mangas et à la culture nippone — de par leurs choix éditoriaux et esthétiques et leur périodicité restreinte — Otomo et Atom tracent leur chemin.
La seconde livraison d’Otomo contient pas mal de pages sur deux symboles de la pop culture japonaise, Godzilla et les robots géants, et consacre des articles à des artistes, des films, des animes, sans grande prise de risque pour le public.
Atom affiche toujours autant d’entretiens de dessinateurs et de scénaristes qui ont frappé nos imaginaires : Buichi Terazawa et ses pépées, les beaux jeunes hommes et les femmes fatales de Ryôichi Ikegami, en passant par l’amateur de callipyges, Akihito Tomi, l’esthète Suehiro Maruo...
Otomo 02
Affichant clairement sur sa couverture la mention de sa sortie annuelle [1], la seconde livraison d’Otomo propose toujours une tambouille à base de "ramen, kaijū et pop culture". La maquette sous ses airs faussement rétro conserve le même format. Le magazine s’empare de quelques sujets récents (le long métrage Your Name — gros succès dans les salles nippones —, la ressortie de L’empire des sens sur les écrans français…), poursuit son exposé sur les kaijū autour de la figure de Shin Godzilla et entame le vaste univers des robots géants, entre extravagances et réalisme relatif. Un papier qui s’intéresse aux compagnies développant des machines de combat à vocation, pour l’instant, ludique, montre l’aspect concret de ces créatures d’acier. Fantômes, shunga, l’improbable icône des années 90 Segata Sanshiro et la J-Pop apportent un peu de culture. Point de ramens, mais la recette des yaki gyoza. Les valeurs sures Satoshi Kon, Kazuo Kamimura, Seijin Suzuki et Umezu complètent le sommaire. La série TV diffusée sur Netflix Midnight diner : Tokyo stories se trouve carrément survolée… Des articles plus ou moins inspirés, sourcés et bien écrits (quelques répétitions, fautes diverses, abus de superlatifs…). La joie de découvrir une citation de Gaston Bachelard issue de son opus sur L’eau et les rêves. Des plumes que l’on reconnait pour les avoir aperçues dans d’autres magazines, revues et sites web. Des images sans crédits ni légendes, laissant sur le côté les non japanophones [2].
Malgré ses défauts, Otomo, petite revue à la ligne éditoriale limpide, saura satisfaire les exigences de ses lecteurs : des valeurs sures, fédératrices, divertissantes avec un minimum d’érudition.
Rendez-vous l’an prochain.
Atom 03 - où sont les héros ?
Atom accueille en son sein des entretiens d’artistes occidentaux dont les œuvres sont de dignes descendantes de la culture manga et anime qui s’épanouirent au début des années 90 : Lastman et Bartkira. Questionnant la notion d’héritage, d’hommage et de parodie, elles ouvrent de nouveaux horizons à la BD.
Protagoniste désabusé, yakuza romantique, séducteur de l’espace…, figures masculines intemporelles fédérant toujours les lecteurs et les lectrices sont regroupées grâce à une série d’entretiens : Buichi Terazawa, Ryôichi Ikegami, Kengo Hanazawa ainsi que le rédacteur en chef de la revue Manga Action et l’un des scénaristes de Jirô Taniguchi. Horreur et érotisme soft ne sont pas non plus oubliés.
Passionnant à parcourir, Atom corrige l’un des défauts pointés dans un précédent article en offrant des chroniques moins jargonantes et plus descriptives quant au contenu de l’œuvre. On y retrouve avec délice la plume de Xavier Guilbert, une quasi-absence de fautes dans les textes et des questions pertinentes amenant parfois des réponses surprenantes, mais instructives. Pour le reste, rien ne change : maquette sobre et claire, des images pleines pages, papier agréable au toucher et un prix des plus corrects.
Pour ce troisième volet, Atom confirme ses qualités. La culture manga ? Oui, mais étendue !
[1] L’impatience, les défauts du premier opus laissaient craindre un abandon de cette revue et m’ont fait annoncer une mort prématurée, mais il n’en est rien.
[2] Par exemple, concernant les planches anatomiques des kaijū.