World War Hulk

Du lourd.
Un titre parfaitement trouvé, destiné à mettre en exergue toute la puissance intrinsèque du Titan vert.
Sans finesse mais avec une réelle efficacité, Greg Pak renvoie sur Terre le cataclysme ambulant qu'est Hulk. Ce dernier bénéficie du traitement de longue durée du formidable Peter David qui en a fait un véritable anti-héros, incompris magnifique, ayant plusieurs fois sauvé la Terre (parfois sans le vouloir) malgré la haine de la plupart de ses habitants. À la manière de Wolverine, Hulk (et Banner en parallèle) se sont vus au long des années enrichis, dotés de pouvoirs annexes (la capacité de voir les ectoplasmes magiques par exemple), d'une psyché renforcée, et, insensiblement, d'une puissance grandissante. N'oublions pas qu'il a survécu à l'impact direct d'une bombe Gamma (dans l'excellent Hulk : Point Zéro) et qu'il est désormais établi que son potentiel est sans limite autre que celles de sa rage permanente et de ce qui reste de sa conscience humaine.


Planet Hulk
était un monument [cf. cet article], une réussite quasi-totale, où le désormais nommé Balafre Verte pouvait se laisser aller, tisser des liens auxquels il ne croyait plus (esquissés auparavant dans la saga du Panthéon - cf. cet article ou encore dans l'inquiétant Futur imparfait). L'esclave gladiateur devenu roi pouvait enfin jouir d'une vie qu'il n'espérait plus, aux côtés d'une fascinante compagne s'apprêtant à lui donner un héritier. Un terrible accident le privera de cet avenir doré, supprimant du même coup sa femme et son enfant à naître. Ivre de douleur et de vengeance, il revient sur Terre punir les responsables de son exil forcé qui se retrouvent en outre accusés de cet odieux forfait.
Et rien ne l'arrêtera. Ni les anciennes alliances, ni les vieilles amitiés.

Lorsque l'on compare les possibilités du Hulk interprété par Lou Ferrigno dans la gentillette série télévisée (où le fait de soulever une voiture était déjà un exploit) et celles illustrées ici, où la puissance des impacts se mesure sur l'échelle de Richter, on s'aperçoit du gouffre gigantesque séparant les décennies et la volonté des auteurs. Chaque confrontation a en partie pour but de démontrer l'inconcevable potentiel que recèle le corps de l'alter-ego de Bruce Banner. Et rien que le crescendo annoncé est hautement jubilatoire.

La série principale ne s'attarde malheureusement guère sur tous les duels : Flèche Noire est balayé alors même que Médusa prévenait Hulk qu'il n'était pas de taille. Les Terriens qui pensaient être capables de le stopper n'ont qu'à bien se tenir. Pour certains combats méritant le détour, il faut donc aller voir dans les tie-ins :

World War Hulk : Frontline
World War Hulk : Gamma Corps
World War Hulk : The Incredible Hercules
World War Hulk : Warbound
World War Hulk : X-Men
World War Hulk : Damage Control


Ceux qui se seraient contentés de l'album regroupant les 5 épisodes centraux (édité chez Marvel en 2008) verront néanmoins que les cadors y ont leur place : Stark, Richards, un très étonnant Docteur Strange, tous anciens alliés voire amis et compagnons de route, tous supérieurement intelligents, ayant bien entendu prévu de longue date une parade à un débordement hulkesque - et tous connaîtront le même sort, quand bien même ils s'acharneraient et renieraient jusqu'à certains de leurs plus chers principes. Seul, l'invité de dernière minute promet une fin imprévisible en forme d'apothéose cataclysmique. Pak a mis les petits plats dans les grands, il n'y a plus qu'à savourer les destructions massives et les chocs apocalyptiques. Après tout, on n'a pas payé pour voir Banner sur le divan de Samson.

En outre, le style de John Romita Jr, parfaitement encré par Klaus Janson, habile dans les conflagrations et les déferlements de puissance [également appréciable chez Wolverine - cf. cet article], convient plutôt bien au récit, même s'il est moins précis et ravageur que dans sa saga sur Thor. De fait, nombre de cases ne font qu'illustrer des explosions dévastatrices, façon Dragon Ball Z ou Man of Steel : la terre tremble, les immeubles s'effondrent et les impacts se ressentent à des dizaines de kilomètres.


Toutefois, insidieusement, on sent que tout cela finira comme bon nombre d'events Marvel, presque en eau de boudin, avec un retournement de dernière minute permettant de maintenir ce statu quo immuable qui légitime le fait de continuer à développer les mêmes sempiternelles histoires [consultez le dossier de la rédaction sur les plus fameux de ces événements et vous vous ferez une idée plus précise]. C'est assez frustrant, car le potentiel de celui-ci était à l'image de la Balafre verte, immense. Hulk révèle au monde le véritable aspect des quatre leaders de l'ombre qui l'ont trahi et dévoile ainsi l'existence naguère occulte des Illuminati. On sait à présent que cela ne changera pas grand-chose et qu'on repart peu ou prou sur les mêmes bases. Oui, tout ça pour ça, quoi...

Reste un album puissant et délassant, rapidement lu bien qu'apprécié. 


+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Hulk, quasi sans limite.
  • Un script habile fondé sur un crescendo de confrontations.
  • Un style graphique adapté au déferlement de puissance attendu.
  • Pas de temps mort.
  • Une croisade vengeresse qui met en lumière le côté sombre de héros trop propres sur eux.


  • Des combats parfois frustrants par leur résolution.
  • Une forme d'inéluctabilité dans l'action de Hulk.
  • Une fin peu surprenante, un pseudo-cliffhanger annonciateur d'une suite prévisible et très peu de réelles modifications du monde Marvel.
  • Les relations si singulières entre les "liés en guerre" n'ont guère de place ici.