Stranger Things


Netflix a maintenant à son actif quelques séries plutôt bien foutues (dont Daredevil et Jessica Jones si vous êtes branché super-héros) et la dernière en date, Stranger Things, se révèle aussi originale que prenante.

Commençons par le pitch. Nous sommes à Hawkins, Indiana, en 1983. Quatre jeunes garçons jouent à un jeu de rôle depuis une bonne dizaine d'heures [1] lorsque vient le moment de se séparer. Chacun rentre chez soi à la nuit tombée. Le petit Will, lui, va connaître un destin hors du commun puisqu'il va... se volatiliser.
Sa mère, paniquée, prévient le chef de la police. On appelle ses proches, on va voir dans sa cabane au milieu de la forêt, l'angoisse grandit lorsque l'on retrouve son vélo dans les sous-bois. On organise une battue qui ne donne rien.
Ses amis, inquiets, vont se mettre également à sa recherche et tomber dans les bois sur une jeune fille d'une douzaine d'années, peu loquace, qui dit s'appeler Eleven (onze), chiffre qui est tatoué sur son bras...

Série de SF/fantastique, Stranger Things s'avère également être une ode, bourrée de références, aux années 80, bande originale en tête. L'ambiance, parfaite, est un savoureux mélange d'humour, de suspense, de gentils frissons et d'émotion. Le genre de truc à vous happer dès les premières minutes (et à se regarder très vite puisque la première saison ne compte que huit épisodes).
Niveau casting, l'on peut signaler la présence de Winona Ryder (que l'on avait pu découvrir adolescente notamment dans Beetlejuice en 1988, ça nous rajeunit pas bordel !) ou David Harbour, excellent dans le rôle du chef de la police locale.

Le groupe de gamin est évidemment d'une importance capitale. Mis à part certaines coupes de cheveux (aux États-Unis, la loi oblige d'avoir une coupe à la con lorsqu'on a moins de 15 ans, après, ça devient facultatif), là encore les acteurs se révèlent charismatiques. Et évidemment, des personnages jeunes, pour peu qu'ils soient bien écrits (et c'est le cas ici) sont toujours très efficaces dans ce genre d'intrigue. Non seulement parce que leur jeune âge rajoute en soi des difficultés qu'ils doivent surmonter mais aussi parce qu'avoir été gamin reste évidemment un point commun à tous les spectateurs (ou en tout cas, à la plupart).

La thématique tourne autour de phénomènes paranormaux, d'expériences secrètes (liées au véritable projet MK ultra [2]) et de la toujours efficace théorie du complot, avec la méchante agence gouvernementale qui ne lésine pas sur les moyens pour couvrir les horreurs qu'elle commet.
Tout cela pourrait être prévisible et caricatural mais le scénario des frères Duffer (qui signent également la réalisation) fait suffisamment preuve de maîtrise narrative pour ne pas tomber dans le simple alignement de clichés et d'hommages. Les frangins ont notamment cité Stephen King et Steven Spielberg comme source d'inspiration (et franchement, il existe bien pire comme références), ce qui se sent en effet très nettement, notamment en ce qui concerne les enfants confrontés à une menace (cf. cet article).

Jouissive, élégamment nostalgique, truffée de pépites référentielles, Stranger Things s'impose comme la série "pop" par excellence, à la fois divertissante et intelligemment construite.
A regarder sans modération, que vous ayez ou non connu les années 80.



[1] L'on voit ici à quel point le jeu de rôle peut être prenant (pour peu que le maître de jeu soit un peu doué et que les joueurs fassent preuve d'un minimum de roleplaying justement, en oubliant les dés) et tout à fait inoffensif contrairement aux idées reçues débiles que certains pouvaient colporter naguère (ou colportent encore). Pour faire l'inventaire des clichés liés à la pop culture, nous vous invitons à répondre à notre grand test : es-tu un sataniste/geek/adulescent ?
[2] Probablement l'un des projets "secrets" les plus connus de la CIA (avec Monarch et Bluebird). Il s'agissait d'expérimentations, illégales, dans le domaine de la manipulation mentale (moins, comme on a tendance à le penser, pour manipuler réellement que pour vérifier l'existence du phénomène et éventuellement s'en protéger. En outre, la "manipulation" visée n'allait pas, comme le veulent certaines légendes, jusqu'à faire par exemple commettre des meurtres à un individu lambda mais visait à faire se discréditer certains responsables politiques ou augmenter ou diminuer les capacités physiques et mentales des soldats). Les expériences, menées entre 1950 et 1970 (bien que certains sous-projets survécurent jusque fin 80), peuvent paraître aujourd'hui d'une incroyable légèreté. Elles impliquaient notamment l'administration de LSD sur des sujets ignorant tout de l'expérience et de la prise, involontaire, de cette drogue extrêmement puissante. L'on peut sans peine imaginer les effets psychologiques désastreux que peuvent induire les hallucinations, la modification de perception et surtout la "descente" sur un individu non préparé. Au moins un décès par suicide est d'ailleurs imputé directement à ces expérimentations sauvages. Bien entendu les États-Unis ne furent probablement pas les seuls à mener de telles expériences mais, contrairement à la Chine ou l'ex-URSS, le côté poreux de ses institutions imparfaites mais démocratiques permit de faire sortir l'information.

+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Les références aux années 80 et à la pop culture.
  • Une intrigue efficace.
  • Des personnages attachants et de nombreux très bons seconds rôles.
  • La bande-son.
  • Le mélange d'humour et d'émotion.

  • Rien de notable.