de Marvel (cf.
, analysant en détail un tome de la série Spider-Man) consacré à la naissance du groupe
.
Ceux
qui connaissent vont trépigner et pousser quelques gloussements qui risquent d’être
mal interprétés par le voisinage, mais beaucoup d’entre vous ignorent sans
doute le rapport entre l’épée mystique brandie par le
roi Arthur (dont la
légende a été plusieurs fois transposée sur différents supports tels la série
Cursed actuellement sur Netflix) et le
monde des super-héros Marvel. Pourtant, Arthur et
les Chevaliers de la Table
ronde sont déjà intervenus au sein des comics :
Iron Man s’est ainsi
retrouvé prisonnier du passé légendaire en compagnie de
Fatalis et s’est
résolu à combattre les armées de zombies menées par
Morgane ; cette dernière a en outre
eu régulièrement affaire aux
Avengers.
Toutefois, l’Excalibur qui nous intéresse ici est le nom d’un
groupe et de la série éponyme née en 1988 de l’imagination enfiévrée de Chris
Claremont et Alan Davis. Claremont est alors au sommet de sa gloire : au
début de la décennie, sa saga du Dark Phoenix a placé les X-Men en tête des
ventes, mettant critiques et lecteurs au diapason et boostant l’envie de voir d’autres
séries mutantes ; il a déjà lancé les Nouveaux Mutants dès 1982 et
contribué à la série sur Wolverine. Ses histoires retorses, bardées de sous-intrigues
susceptibles de mettre en lumière le passé mystérieux d’un personnage ou le
destin tragique d’un autre, ses secrets qui se dévoilent par petites touches
frustrantes, autant d’indices épars censés accrocher le lecteur, étaient prisées
des fans et ses arcs successifs se succédaient tout en préparant le terrain
pour des événements futurs, dramatiques pour la plupart. Depuis, l’aura de
Claremont s’est tarie, le lectorat s’est lassé de son écriture et les
éditeurs lui ont plusieurs fois mis des
bâtons dans les roues (la lecture de X-Men : la Fin est assez éprouvante,
cf. cet article),
mais à l’époque, on ne jurait que par lui, et on a objectivement rarement fait
mieux que Days of Future Past ou Dieu crée, l’homme détruit.
En 1988, le monde est sous le choc : les X-Men ont péri
à
Dallas, devant de nombreuses caméras de télévision, sauvant (encore une fois)
la planète en se sacrifiant. Seuls
Kitty Pryde et
Diablo (blessé
au moment des faits) sont rescapés de la tragédie,
et ils ne cessent de pleurer
leurs amis disparus tout en se morigénant, incapables de trouver un sens à leur
vie désormais bien sombre. Un ami de Kitty,
Brian Braddock (Captain Britain), s’enfonce
également dans le désespoir : sa sœur,
Psylocke, a succombé aux côtés des
X-Men et sa compagne
Meggan ne parvient pas à lui redonner la joie (ou même une
raison) de vivre. C’est l’assaut de
Warwolves sur Londres, à la poursuite de
Rachel Summers, qui les unira pour faire front commun, défendre d’abord leur
amie avant de décider de faire un brin de route ensemble et continuer le rêve
du
professeur Xavier, afin que les X-Men ne soient pas morts en vain. Le sort
en est jeté, "he sword is drawn".
Succédant à l’event Mutant Massacre, Excalibur se veut une
sorte de spin-off des X-Men, histoire de combler le vide laissé par nos héros
(vide qui ne durera pas vu qu’ils reviendront, évidemment). Ainsi, outre les
deux membres officiels de l’équipe X cités plus haut, on retrouve Rachel, la
fille de Scott Summers (Cyclope) et Jean Grey provenant d’une réalité future
alternative : ancien limier chargé de traquer les mutants, elle a hérité
des pouvoirs du Phénix qu’elle utilise d’une manière plus violente que sa mère.
Décomplexée, vibrante, elle est devenue l’amie de cœur de Kitty et c’est parce
qu’elle a échappé au monde de Mojo, où elle avait séjourné afin de panser ses
blessures, qu’elle doit à présent affronter les sbires de son ancien maître. Toutefois, Mojo n'est pas le seul à envoyer un contingent de super-êtres dans le but d'appréhender Rachel : les Technets, menés par l'intrigante Gatecrasher, sont également chargés de traquer le jeune femme. Et pendant que tout ce beau monde tente de s'expliquer et finit par s'affronter, un "bidule" sentient s'éveille soudain à l'arrière d'une boutique et commence à ouvrir des portails vers une dimension alternative...
On s'en aperçoit assez vite, soit par les dialogues surréalistes des minions de Mojo, soit simplement par la personnalité des adversaires de nos héros ou par la succession de situations mêlant loufoque et bizarreries, l'ambiance dans la série nouvellement créée est loin de la tension dramatique exacerbée des dernières heures de la Team Xavier : même si la réminiscence de ces heures sombres plombe la psyché et les émotions des X-Men survivants, le ton général est sensiblement plus léger, Claremont s'amusant visiblement à utiliser à des fins comiques les paradoxes dimensionnels et les pouvoirs surprenants de certains protagonistes, à tel point qu'on a souvent l'impression qu'il a laissé carte blanche à
Alan Davis dont on retrouve souvent le ton subtilement décalé dont il a abreuvé ses épisodes de
Captain Britain ou sa série
Clandestine. Un sommet est d'ailleurs atteint lorsque Excalibur se retrouve confronté à son double émanant d'une dimension parallèle où l'Allemagne nazie a gagné la Seconde Guerre mondiale. Sans parler de l'interlude lié à l'event
Inferno où New York se retrouve infesté de démons ! Ensuite, tandis que Chris Claremont continue à ourdir ses précieux complots à l'ombre des aventures de nos personnages, le tempo s'assagit, la série semble reprendre sa respiration et aborder des problèmes plus "humains" : Brian s'interroge autant sur sa relation avec Meggan (qui bat de l'aile, d'autant qu'un triangle amoureux commence à se mettre doucement en place) que sur le déclin inexplicable de ses pouvoirs, et Kitty essaie de sortir de sa coquille en tentant maladroitement de se calquer sur la désinvolture (apparente) de son amie tout en essayant de courtiser le beau
Alistaire Stuart, frère d’Alysande et membre du
WHO (World Happenings Organization), qui n'a malheureusement d'yeux que pour la beauté explosive de Rachel. Le onzième épisode s'achève sur un gigantesque happening, du genre : "Mais que leur est-il arrivé ?"
L'impression est déjà favorable, mais Nolt nous a assez dit combien cette Epic Collection était dense, et Marvel ne se contente pas de nous balancer le début d'une nouvelle série, l'éditeur rajoute plusieurs couches éditoriales, en commençant par un épisode spécial
Mojo Mayhem dessiné par l'illustre
Art Adams, dans lequel on se réjouira de retrouver les...
X-Babies ! Une aventure palpitante et pleine d'humour (Baby Wolvie est tordant), qui est suivie par 8 épisodes tirés d'une mini-série de
Marvel Comics presents : Having a wild week-end. Le but est manifestement de surfer sur le côté burlesque du potentiel d'Excalibur, mais le trait est tout de même forcé : l'équipe se retrouve aux prises avec un groupe composé de sosies des...
Looney Toons, qui les bat à plates coutures, et les voici enfermés, séparés, dans un lieu étrange et face à leurs peurs les plus extrêmes qui semblent avoir pris corps... Oui, j'en vois deux au fond qui hochent la tête en pensant : "Ça me rappelle quelque chose !" et oui, ils ont raison, on se retrouve vite en terrain connu et l'ennemi redoutable derrière cette mascarade ne tardera pas à être révélé, suivant un scénario qui rappelle beaucoup trop les précédentes apparitions de ce mercenaire singulier qui a plusieurs fois eu affaire aux X-Men ou à Spider-Man. Des épisodes frisant le grotesque qui en outre ne bénéficient pas du style aérien et élégant de Davis.
Le volume n'est pas encore achevé car il est complété par de petites histoires, dont une singulièrement nostalgique et gracieuse signée par Alan Moore himself, lequel a déjà fait ses armes sur Captain Britain, et les origines de ce dernier signées Claremont et Herb Trimpe. Ajoutez-y un dossier sur la création de l'équipe, de nombreuses reproductions de couvertures, et vous tenez un volume bien rempli. Si l'on s'en tient à la série elle-même et à l'épisode d'Arthur Adams, l'ensemble vaut le coup, s'avère aussi délassant qu'efficace, avec des personnages et créatures surprenants et un humour percutant. Kitty et Rachel tirent un peu la couverture à elles, leur passé et leur psyché donnant lieu à des réflexions intéressantes et des dialogues tendus. On sent que Claremont hésite encore sur la conduite à tenir pour Diablo, mais il ne prend aucun gant quant à Brian Braddock, montré sous son plus mauvais angle afin d'exposer une forme de réhabilitation grandiose dans des épisodes ultérieurs. Néanmoins le tome en lui-même est trop disparate et les huit épisodes du "Wild Week-end", lourdingues et laids, font vraiment pâle figure. Mais c'est sans doute le prix à payer pour ces collections qui cherchent à proposer davantage qu'un arc narratif.
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Les points positifs |
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Les points négatifs |
- Les origines d'une série mutante originale, née dans un contexte tragique.
- Un rassemblement de personnages intrigants, disparates mais dotés de personnalités fascinantes.
- Un humour léger et revigorant fondé sur des situations incongrues, des personnages loufoques et des quiproquos réjouissants.
- Des intrigues à tiroirs annonçant de grands événements.
- Des rappels réguliers à la continuité (bien qu'il n'y ait aucun crossover) comme l'événement Inferno.
- Le style Alan Davis, la classe d'Arthur Adams.
- Éditorialement, c'est du lourd.
- Énorme rapport qualité-prix.
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- Des épisodes grotesques et inutiles.
- Un manque cruel d'homogénéité graphique, avec une sérieuse baisse de niveau lorsque Alan Davis et Arthur Adams disparaissent du générique.
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