Vingt-cinq gamins ont toujours vécu enfermés en sous-sol.
Ils s'organisent en trois bandes rivales.
Au bout de 17 ans, ils sortent et découvrent un monde inconnu et apparemment désert.
Il va falloir survivre, créer une nouvelle société...
Ils s'organisent en trois bandes rivales.
Au bout de 17 ans, ils sortent et découvrent un monde inconnu et apparemment désert.
Il va falloir survivre, créer une nouvelle société...
Parfois, on reçoit une BD et on la sent bien... très bien. On regarde la couverture et on se dit : "Ah, le dessin est sympa, moderne, vaguement manga, vaguement comics, un trait qui me fait un peu penser à celui de Pierre-Mony Chan dans Cross Fire par exemple. Les couleurs sont belles et bien choisies, avec ce bleu froid sur fond blanc détourant une mâchoire monstrueuse, avec cette fille dont la blondeur crée une sorte d’œil chaud à l'ombre menaçante dessinée par le reste... Ouais, les éditions Soleil me parlent, là, c'est quoi, cet album ? "Enemy" ? Connais pas. Tome 1 ? Ah ben logique, alors. Ange et Savarese ? Ange à l'écriture avec de tels dessins ? "Oh, toi, BD, je vais te lire !". Oui, je m'en dis, des trucs, moi, face à une première de couv' !
Est-il besoin de vous parler d'Ange ? Ce nom d'auteur est un mot-valise constitué des premières lettres de deux prénoms : Anne et Gérard Guéro. Et Anne et Gégé, ils écrivent. Beaucoup. Énormément (sans déconner, regardez leur fiche Wiki...). Et souvent, c'est bon, voire très bon. Comment ça, c'est subjectif ? Ah oui... Je veux dire : j'aime bien. J'aime bien parce que c'est bon, voilà... Ben quoi ? Eh bien Ange a/ont écrit la BD de cette chronique.
Et qui dessine ? Ornella Savarese. Vous ne connaissez pas son trait ? Eh bien, elle a bossé sur le tome 4 de Animosity et le tome 29 de La Geste des Chevaliers-Dragons... mais cette fois, elle fait tout toute seule. Et les couleurs aussi, s'il vous plaît. Visuellement, Enemy, c'est son bébé. Et c'est un joli bébé, les amis.
Alors accueillons ce nouveau-né. Je suis très optimiste : les parents ont un patrimoine génétique on ne peut plus prometteur !
Pas de lenteurs à craindre avec cet album : dès le début, nous voyons des gosses collaborer pour sortir d'un espace confiné qu'ils ont longtemps cru être l'univers entier, où ils vivaient seuls avec des montres qu'ils appellent démons.
Au bout de quelques pages, les voilà devant la réalité : le dehors existe, l'univers est immense et l'abri qui les a vus grandir se situe au sein d'une grande ville ravagée par une guerre qui éclata dans leur plus jeune âge.
Les trois clans de jeunes gens (deux clans guerriers et un clan scientifique en sous-effectif) vont alors essayer de trouver comment réorganiser leur vie dans un monde immense et potentiellement hostile. Un monde dans lequel il est bien angoissant d'être seuls... mais où l'on redoute plus encore de ne pas l'être !
Souvent, de brefs flash-backs permettent de situer les personnages ou d'amener des explications utiles (comme la façon dont ils acquirent leur langage et leurs connaissances via des "roboéducs").
C'est rythmé, dynamique, intéressant, les personnages sont bien caractérisés. Parlant des personnages, on a une leader née, un scientifique athée très pragmatique et un guerrier fanatique en guise de protagonistes principaux.
Oui, un guerrier fanatique. Car les enfants se sont créés une religion, au sein de leur abri. Et l'un des clans, plus bigot que les autres, a bien du mal à adapter ses croyances à leur nouvelle vie et aux enjeux que cela augure.
D'ailleurs, le credo de l'abri, celui qui rythme leurs prières, est régulièrement scandé tout le long de la BD, aidant à se mettre dans l'ambiance doctrinaire du petit groupe de jeunes et permettant aussi de rythmer le récit. De ce fait, les réactions des plus croyants peuvent nous sembler moins absurdes, tant on comprend la place que la religiosité tenait dans leur vie.
On n'a pas là un récit de hard SF, à mon sens, c'est plutôt un récit d'aventure initiatique dans un contexte de science-fiction. Ça peut expliquer la légèreté avec laquelle certaines questions techniques sont traitées mais ça ne nuit en rien à la qualité du tout ni à notre immersion.
Je sens du potentiel dans cette série qui, comme vous le prouvera la dernière page, ne craint pas de chambouler son lectorat. C'est facile à lire mais pas futile. C'est amusant mais pas léger. Et j'espère ne pas me tromper mais je vois poindre une possible lecture allégorique qui, si elle est confirmée, me poussera plus tard à vous la recommander plus chaudement encore.
C'est du tout bon Soleil. Et c'est à mon sens une entrée en fanfare d'Ornella Savarese dans la famille des auteurs talentueux de cette maison d'édition ayant déjà eu l'opportunité d'illustrer les fruits de l'imagination d'Anne et Gérard Guéro. Encouragez cette nouvelle série, achetez ce tome. Je veux connaître la suite, je veux comprendre ce monde et ses mystères. Je veux voir ce qu'Ange réserve à ces gosses et je veux voir le trait de cette dessinatrice s'épanouir dans cet univers propice à tant de surprises !