De la bande dessinée virevoltant allégrement et agréablement entre la high fantasy et la light fantasy, ça vous tente ?
Orépia, c'est le nom d'un royaume aux mains des humains. Et comme souvent, dans la fantasy moderne, les humains sont de bons gros bourrins bien intolérants juste comme il faut. Je situe le début de cette tendance aux environs de la sortie de la très recommandable trilogie Orcs de Stan Nicholls, selon mes lectures personnelles, mais c'est peut-être bien plus ancien que cela... je n'ai pas lu toute la fantasy mondiale, loin s'en faut !
Toujours est-il que ces humains ont un réflexe de rejet bête et méchant envers tout ce qui ne leur ressemble pas, un peu comme les belles gosses de la cour de récré qui préfèreraient de loin avaler toute leur panoplie de make up hors de prix plutôt que d'être vues en compagnie d'un gars au physique banal qui ne collectionnerait pas les abdominaux comme moi je collectionne les figurines de jeux de rôles. Pardon ? Ça sent l'aigreur ? Oui, je suis un gros aigri frustré de la vie. Évidemment ! Je chronique des bandes dessinées de fantasy, les gars, regardez les choses en face : dans un monde de fantasy comme celui d'Orépia, je serais un gnome unijambiste, aveugle et bossu, de 38 centimètres avec des soucis d'élocution et un ongle incarné à chaque orteil de son seul pied valide !
Donc voilà : Orépia, royaume humain. Les autres races du bestiaire de la fantasy (relookées, renommées, personnalisées par l'auteur mais grosso modo les races habituelles) et les humains peu appréciés par leur propre race font, pour certains, le choix de devenir des mercenaires.
Et c'est bien de mercenaires qu'il s'agira ici. Nous rencontrons donc Adhémar (sorte de fringant paladin qui, clairement, cache quelque chose), Réginald (un limier... une sorte de rôdeur de Donjons & Dragons), Savaric (un petit machin sans doute apparenté aux gobelins ou aux gnomes s'ils avaient copulé avec Yoda), Hermine (une pixie psychopathe... une pixiechopathe ?), Frameric (un sylvan, race apparemment peu respectée) et Bérard (un noble chevalier humain banni par son roi).
Et c'est bien de mercenaires qu'il s'agira ici. Nous rencontrons donc Adhémar (sorte de fringant paladin qui, clairement, cache quelque chose), Réginald (un limier... une sorte de rôdeur de Donjons & Dragons), Savaric (un petit machin sans doute apparenté aux gobelins ou aux gnomes s'ils avaient copulé avec Yoda), Hermine (une pixie psychopathe... une pixiechopathe ?), Frameric (un sylvan, race apparemment peu respectée) et Bérard (un noble chevalier humain banni par son roi).
Au moment où commence l'histoire, cet assemblage hétéroclite (qu'est-ce que cette expression pue le cliché !) digne d'un JdR où le maître de jeu aurait exigé de la diversité dans la création des personnages défend l'inexpugnable forteresse du Duc Warin contre un attaquant ayant réussi à les surprendre par une attaque inattendue. Mais l'inexpugnable s'avère bien vite carrément expugnable (oui, la construction de cette phrase est aussi lourde que les murs de ladite forteresse mais je tenais à faire réaliser à tout le monde que le mot "expugnable" existe... qui le savait, ça ?).
Dans sa fuite, la compagnie de mercenaires, pourtant très compétente mais objectivement défaite, accepte d'embarquer un jeune rescapé et le duc qui leur promet de les rétribuer doublement s'il parvient à rejoindre la cité du Comte Do'Buhl où se trouve sa promise (qu'il n'a jamais vue) et une possibilité de débloquer sa fortune.
Ils comprendront vite qu'ils ont une mission, un devoir, d'une toute autre ampleur à réaliser : annoncer à tout Orépia qu'une armée gigantesque la menace. Une armée menée par un magnifique être magique d'une puissance effroyable et d'une cruauté que n'égale que son ambition... et qui semble se taper sa sœur Lannister style, soit dit en passant...
Commençons par parler du ton de l'ouvrage : c'est à la fois sérieux et léger. Les enjeux sont colossaux mais la décontraction des héros rend le tout agréable à lire. Attention, ici, c'est plutôt bien dosé. On n'est pas face à une narration façon "Marvel Cinematic Universe" qui s'empresse tant à mettre des gags et des punchlines (souvent pathétiques) partout qu'on en perd de vue le sérieux de la situation. Ici, on a une menace gravissime mais vécue par des parangons de coolitude, des rigolos et des canailles au langage de charretier. Le propos est grave malgré le ton léger.
On croit en la menace de high fantasy mais elle est portée par la légèreté de la light fantasy, en somme.
Ça se marre mais ça tue du personnage central aussi : en gros, on rigole même si ça ne rigole pas !
Moi, l'histoire m'a embarqué. Et j'ai ri à deux reprises... Rire devant une BD ne m'arrive pas souvent mais cet humour à contrepied m'a bien plu.
Pour les inspirations, elles viennent de toute évidence de tous les horizons de ce que la geekerie a pu enfanter comme univers médiévaux fantastiques. C'est un joyeux cocktail qui fonctionne bien.
Pourtant, initialement, en recevant l'album, j'ai frémi : cette couverture se prend terriblement au sérieux. On a une espèce de Chevalier d'Or que ne renierait pas Masami Kurumada, dessiné (très bien dessiné !) dans un style mixant le trait oriental et le trait occidental. L'air sévère, il semble terminer un saut ou une chute devant un enfant apeuré. En position de défense, cape et cheveux bleus au vent, il se montre prêt à protéger le gosse contre un ennemi que l'on devine dangereux... pfouah ! Notre Adhémar le fait au quart de tour.
Mais dès la première case, c'est désamorcé par un peu d'humour dans les dialogues alors que le dessin expose ostensiblement un massacre. Le plus souvent, d'ailleurs, les cases dépeindront des drames et les phylactères prêteront à sourire.
J'en entends d'ici (oui, bon... je les lis sur d'autres sites, surtout) qui reprochent certaines choses à cette BD... Ils ont souvent raison, au moins partiellement... Penchons-nous sur ce qui coince, selon eux.
Fabien Dalmasso (Reflets d'acide) ne fait aucun mystère, sur sa chaîne Youtube, de ses influences en se filmant devant une étagère de figurines de Chevaliers du Zodiaque. C'est un amateur de geekeries et qui serions-nous pour l'en blâmer ? Il voulait apparemment, initialement, faire de ses héros des animaux anthropomorphiques. L'idée était sympa mais les traits humains qu'ils ont ici rendent sans doute les situations un peu plus intenses et permettent vraisemblablement de faire d'une potentielle BD pour ados une BD qui pourra être appréciée par un public jeune et moins jeune. On lui reproche de-ci de-là de plonger tête baissée dans tous les travers de la fantasy, comme ce sempiternel groupe d'aventuriers si différents qui a tant de mal à s'entendre... Oui. Mais non. Déjà parce que ces gens sont en effet différents et se comprennent difficilement mais surtout parce qu'il faut être très hermétique pour ne pas ressentir la complicité et la fraternité martiale entre eux... Et même si j'étais trop indulgent et que c'était un énième groupe de ce genre... si c'est bien écrit, peu importe ! Je continue à regarder des buddy movies, même si la formule est usée jusqu'au trognon, parce que certains restent d'excellents films. Le good cop / bad cop fonctionne encore. Les films de super héros sont tous calqués les uns sur les autres... alors, pourquoi fermerions-nous spécifiquement la porte aux histoires d'aventuriers peu compatibles entre eux ?
Jae Hwan Kim (Kinf of Hell, Egregor) offre à cette histoire un habillage très soigné et d'une finesse appréciable. Le trait rappelle certaines habitudes de ce dessinateur coréen rompu à la façon de faire dans le monde du manwha... mais nombre de concessions sont faites au style européen pour un résultat final bien plus concluant que ce que j'aurais imaginé de prime abord. Pourtant, on lui reproche un dessin parfois statique... Bah oui. C'est fréquent, les postures, chez ce genre de dessinateur. On peut ne pas être client mais les siennes sont efficaces !
La mise en couleurs de Cyril Vincent, quant à elle, apporte l'identité "Éditions Soleil" à l'ensemble (et vous savez que je n'y suis pas insensible, lecteurs fidèles... hum... ouais, je me la pète un rien, là !). Et là, j'ai même lu une critique arguant que cet album ne méritait pas les couleurs trop "à la Lanfeust". Pardon ? Ah bah, vas-y, vieux ! Reproche à un coloriste de faire du bon boulot sous prétexte qu'il le fait dans un album que tu n'apprécies pas des masses ! C'est quoi, cet avis débile ?
En réalité, c'est une série que je n'attendais pas le moins du monde mais dont je vais attendre le tome 2 comme un petit gâteau qui arrive quand on n'a pas une faim de loup mais encore la place pour se faire plaisir. On n'est pas devant un chef-d'œuvre absolu mais c'est sans conteste un album sympathique qui joue avec des tas de références qui me bottent...
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