Southern Bastards



Une série Image Comics, bien écrite et bien redneck : Southern Bastards !

L'équipe artistique est composée de Jason Latour, aux dessins, et de Jason Aaron, au scénario. Ce dernier est notamment connu pour son excellent Scalped, dont il reprend ici certaines des bases.
Scalped pouvait se comparer à la série télé The Shield, pour la violence certes, mais aussi pour la grande qualité de la narration et des personnages, ainsi que pour le découpage, très cinématographique. Aaron récidive de belle manière en s'aventurant dans le vieux Sud, plus précisément en Alabama. La recette est très rigoureusement la même : des gens maltraités par la vie, à la peau aussi ridée que l'âme, et une belle brochette de salopards pour les titiller.

Le premier tome est quasiment une histoire complète mais débouche aussi sur un cliffhanger croustillant, qui laisse présager une suite rock n'roll. En gros, l'on suit un dur à cuire, fiston de l'ancien shérif local, qui, même s'il est assez âgé aujourd'hui, va mal supporter les magouilles et les crimes perpétrés par l'entraîneur de l'équipe de football, qui a la mainmise sur la ville. Il va donc se mettre en travers de son chemin et devoir affronter les bouseux à sa solde.

Sur le plan technique, c'est très bien fait, c'est même brillant. On est happé par l'histoire, au rythme entêtant et au découpage minutieux. Le personnage principal, sorte de Clint Eastwood vieillissant et massif, est magistralement décrit. Ses coups de fil incessants, sans réponse, l'obligeant à laisser des messages sur un répondeur, vont non seulement servir de leitmotiv mais permettre aussi de définir subtilement le bonhomme, tout en créant une attente évidente (mais à qui parle-t-il ? qui peut être assez bête pour ne pas rappeler ce brave type ?).
C'est travaillé, original, parfaitement huilé, bref, parfait.


Pour ce qui est du cadre, l'on peut être plus réservé. Dans Scalped, l'un des moteurs essentiels de la série tenait à la culture amérindienne, à l'immersion dans un milieu méconnu mais présenté de manière non caricaturale. Ici, le "milieu", c'est ce que l'on appelle, parfois avec mépris, les rednecks. Les paysans quoi. Sudistes en plus, donc censés être arriérés, au minimum.
En fait, comme souvent, le terme a pris des sens différents, assez opposés même, au fil du temps et des gens qui l'emploient. Cela peut être une insulte, c'est aussi parfois une forme de revendication. Et la population qu'il désigne n'est pas franchement monolithique. Autant être amérindien, cela fait partie d'une culture, d'une Histoire, autant être un cul-terreux du Sud, même "profond", c'est beaucoup plus vague, surtout de nos jours. Cependant, dans ces premiers épisodes, ce qui est représenté du Vieux Sud est assez négatif. Un gamin censé être arriéré, un shérif couard, des pleutres soumis, des connards violents, un chef débile craint par tous... et le cow-boy qui a bourlingué et qui cogne dur mais qui conchie ses origines.
Difficile de ne pas se dire que l'on est un peu dans la facilité, même si la dernière page de ce premier tome réserve une grosse surprise et laisse prévoir une suite tout aussi haletante.

Une très bonne série, qui se lit bien et garde le lecteur en haleine, mais qui semble être une transposition un peu facile, au moins sur le fond, de Scalped. Mais il y a évidemment pire comme référence.
Disponible chez Urban Comics (une quinzaine d'euros environ par tome).



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Un récit parfaitement orchestré et rythmé.
  • Style Graphique.
  • Un bon gros perso "larger than life".
  • Une police adéquate (on parle rarement de cet élement, mais cela contribue aussi à l'ambiance générale).

  • Un peu plus de nuances aurait permis de rendre cette campagne américaine plus crédible.