Saint Seiya - Dark Wing





Début d'une nouvelle série dérivée de l'univers des Chevaliers du Zodiaque : Saint Seiya - Dark Wing !

Un spin-off Saint Seiya, c'est toujours un peu du quitte ou double. On a eu par le passé du très bon (Next Dimension - Le Mythe d'Hadès) mais aussi du franchement pas terrible (Episode G - Assassin). C'est donc avec une certaine prudence que l'on accueille ce nouveau titre dont le premier tome est sorti le mois dernier, chez Kurokawa.
Niveau dessin, on est sur quelque chose de très classique. Shinshu Ueda livre un travail correct, avec cependant des visages souvent trop semblables. Certaines scènes d'action sont parfois difficilement lisibles, mais dans l'ensemble, ça reste sympa, avec de jolis décors (quand il y en a, ça reste très épuré) et des armures dans le style kurumadien. Graphiquement donc, pas de faux pas rédhibitoire.

Intéressons-nous maintenant au cœur du projet, c'est-à-dire le scénario écrit par Kenji Saito
Ce premier tome ne livre pas encore tous les tenants et aboutissants de l'intrigue, évidemment, mais l'on peut déjà dire que l'on se situe apparemment... dans un univers parallèle. Il ne s'agit donc pas d'une suite à proprement parler, mais plutôt d'une réinterprétation, avec des personnages différents. Mais... on a tout de même des personnages classiques, et même des allusions à la saga originelle. Ouais, ça devient compliqué du coup. Par exemple, dans cette histoire, Aiolos existe bien. C'est un prof, en plus d'être un chevalier, et il connaît plus ou moins le même destin que dans la série mère. Et lors d'un combat, alors qu'il est en très mauvaise posture, des bribes de souvenirs lui reviennent en mémoire. Des souvenirs d'une vie qu'il n'est pas censé avoir vécue.
Donc, nouvel univers, certes, mais aussi d'importantes connexions (ou au moins références) à ce que les lecteurs connaissent déjà.

Tout débute par une longue présentation des nouveaux protagonistes, des élèves d'un lycée privé regroupant des surdoués. Chacun à sa spécialité, qui va de la boxe, au tir à l'arc, en passant par le piano, le karaté, le chant ou la peinture. C'est quand même bien éclectique hein, je ne me souviens pas qu'il y ait eu autant d'options cool lors de mes années lycée. Ceci dit, ça sert à quoi une spécialisation en "tir à l'arc" ? Pourquoi pas pétanque tant qu'on y est ? 
Bref, après ce tour obligé de la galerie de personnages, une catastrophe étrange entraîne la mort de presque tout le monde, ce qui est l'occasion pour le personnage principal de se réveiller à Elysion et de découvrir qu'il est l'un des Spectres d'Hadès, plus précisément Wyverne de l'étoile céleste de la férocité.

Le fait de suivre un personnage sympathique et attachant qui va très vite avoir pour but de tuer Athéna (et pour une excellente raison), est très habile sur le plan narratif. D'autant que le frère de ce dernier est, lui, l'un des chevaliers d'or censés la protéger. Un conflit fratricide, c'est classique mais ça fonctionne toujours bien.
D'ailleurs, le contraste entre l'innocence, le jeune âge des personnages, leur attitude parfois très enfantine et le poids de l'enjeu qui repose sur leurs épaules est également assez intéressant. Pour l'instant, ce n'est pas encore bien développé, mais ça peut donner quelques scènes intenses et tragiques.



C'est donc plutôt un bon début, même s'il est encore trop tôt pour savoir si la série sera ou non une réussite. Il n'y a toutefois pas que des bons points à décerner, certains éléments posent problème. Par exemple, au niveau du texte, les phrases peuvent se terminer par un point d'interrogation ou d'exclamation, ou par des points de suspension, mais quand il devrait y avoir un point, il n'y a... rien. Problème de lettrage ou d'impression, en tout cas, tous les points ont disparu. Autre souci, découlant cette fois d'un choix volontaire, l'une des polices choisies (heureusement pas la principale) a des "s" qui ressemblent à des "1" (cf. ces deux exemples). C'est un détail, ça n'empêche pas de lire, mais quel choix peu inspiré !

En ce qui concerne le récit en lui-même, toujours ce petit problème d'anachronisme qui fait cohabiter l'univers fantastique (et presque médiéval) des chevaliers et des dieux avec un monde moderne classique. L'on peut noter aussi le choix étrange des noms des personnages dans cette VF. Certains, comme Shoichiro, ont des noms imprononçables (et dont il est difficile de se souvenir) alors que d'autres sont affublés de prénoms occidentaux (Charlotte Kazahana par exemple). Question cohérence et logique, on repassera. 
Même chose pour les noms de techniques martiales, qui apparaissent en trois langues (japonais, anglais et français) ! À quoi ça sert ? Mystère... et pourquoi s'arrêter là ? Perso, je n'aurais pas été contre du russe et du celte.
Certaines scènes (heureusement peu nombreuses) sont également très bas de plafond et vulgaires, du style "c'est super gênant d'être attendu quand on finit son caca". Wow. J'ignore si c'est censé être drôle, mais on se demande vraiment ce que de telles réflexions viennent faire là-dedans. Soit il faut s'arranger pour que la situation ou la réplique devienne vraiment irrésistible, soit il vaut mieux éviter d'étaler ce genre de sentences désastreuses. C'est peut-être moi, mais je ne trouve pas que ça sonne très "Saint Seiya".

L'on peut aussi revenir (mais ce n'est pas lié à cette seule série) sur la connerie intersidérale qui consiste à imprimer un texte français dans un livre qui se lit de droite à gauche. Non, ça ne "respecte" pas l'œuvre, ça la dénature. Une œuvre, quand on la respecte, on la travaille en l'adaptant (cf. cet article). Toujours aussi ce noir & blanc tristouille et peu lisible, qui a un sens au Japon sur certains produits (ce n'est pas une volonté artistique, c'est une contrainte économique et surtout logistique vu le rythme ahurissant qui est imposé) mais qui n'en a plus sur des licences très connues, rentables, et qui pourraient du coup être totalement colorisées pour le marché international. 
Mais bon, il ne faut pas se faire d'illusions, les mauvaises habitudes sont trop implantées pour qu'il y ait une chance qu'elles changent, surtout vu l'apathie d'un lectorat qui se contente d'aussi peu (c'est une généralité, il y a donc des exceptions, mais comme toute généralité, elle reste massivement vraie). 

En conclusion, voilà une série dérivée qui ne manque pas d'intérêt et de bonnes idées. Il faudra néanmoins certainement quelques tomes supplémentaires pour se faire une opinion définitive sur ce contenu mélangeant nouveaux héros, réminiscences anciennes mais aussi petits défauts agaçants. 
Suite au mois de mai pour le tome 2 !




+ Les points positifs - Les points négatifs
  • De nouveaux personnages, sympathiques pour la plupart mais encore peu développés.
  • Le "camp" Hadès, présenté d'une manière non manichéenne.
  • Les frères se retrouvant chacun dans une faction opposée.


  • Des scènes d'action parfois confuses.
  • Un Hadès qui ressemble à une gamine de 12 ans...
  • Le flou et l'incertitude quant aux connaissances des personnages sur les aspects martiaux et divins de leur propre monde.