L'Ombre de Doreckam



Hey les Matous, ça ronronne ?

Le nouveau roman de notre ami Nolt, alias Cyril Durr, vient de sortir aux éditions Souffles Littéraires.
Il s'agit d'un thriller fantastique se déroulant de nos jours, en Moselle.

Hop, une petite présentation s'impose !


Doreckam, une ville de Moselle en apparence paisible. Pourtant, les drames et les actes violents vont s’y accumuler, défiant la logique et les statistiques. 
Viktor Vanila, qui a quitté la brigade anti-criminalité pour retrouver un peu de tranquillité et se consacrer à la musique, va devoir bien malgré lui gérer une menace venue du fond des âges.  
Au milieu de l’agitation, Nolan et ses amis vivent leur dernier été d’adolescence, qui apportera son lot d’amours naissantes et d’amitiés brisées. Et puis il y a cette bande, menée par Achil et Bartosz, deux jeunes dont le plus grand plaisir est de pourrir la vie de ceux qu’ils croisent. Ils ont toujours été pénibles, voire dangereux, mais cette fois ils vont se surpasser. Comme si quelque chose pourrissait tout dans Doreckam, corrompant les âmes les plus nobles et excitant les esprits les plus vils… jusqu’à l’ultime confrontation. 

La pire des menaces est tout au fond de vous. 




Éditeur : Souffles Littéraires
Publication : 31 mai 2023
Genre : roman (thriller/fantastique)
380 pages / 20 euros

Disponible dans toutes les librairies.

N'hésitez pas à vous plonger dans ce récit poignant et tendu si vous êtes prêt à affronter ce qui se cache dans Doreckam ! Miaw !





Quelques sites où acheter ce roman :










Crédit photo : Tiffany Durr

Sleepy Boy - tome 1


"Nous, les humains, sommes toujours très occupés.
Tellement occupés que nous en avons oublié une chose importante...
Nous avons oublié de dormir."


Nous vivons dans un siècle de surstimulation permanente ; pas besoin de vous pondre une thèse sur le sujet, vous êtes en train de lire la chronique d'un inconnu sur un manga européen qui en est à son premier tome. En gros : vous prenez de votre temps de sommeil potentiel pour une activité qui n'existait même pas il y a quelques décennies. Et elle est très loin d'être la seule qui vous bouffe du temps de dodo (je hais les adultes utilisant de tels termes gagatisants pour se les appliquer mais c'est la chasse aux synonymes pour éviter les répétitions, je fais ce que je peux) : réseaux sociaux, jeux vidéo, geekeries de toutes sortes... On ne va pas vous faire la morale à ce sujet, chez UMAC... On est tellement rongés par le problème qu'on en a fait une vocation : partager avec vous nos avis sur certains de ces bouffeurs de repos pour éviter que vous perdiez du temps avec les plus dispensables, voire les plus mauvais, d'entre eux. Et c'est là que vous nous remerciez pour notre sacrifice... J'attends... Non ? Ah, vous êtes ingrats et de mauvaise volonté quand même !
Sleepy Boy n'est pas de ces loisirs que l'on vous recommandera de fuir à tout prix pour vous faire gagner quelques dizaines de minutes d'oreiller.
Ce premier tome signé Marika Herzog (Capacitas, Legacy of the Ocean, Grimoire, Demon King Camio, Whispering) et édité par Ankama est tout à fait recommandable et, s'il exploite convenablement à l'avenir les jalons d'ores et déjà posés, il risque bien de devenir un manga tout aussi divertissant que sémantiquement intéressant. 
Posons le décor. Nate est un garçon pour le moins atypique : lorsqu'il s'endort, ses cauchemars prennent vie, sous la forme de petits fantômes noirs particulièrement agaçants qui empêchent ses proches de dormir depuis des lustres, lorsqu'ils ne les mettent pas carrément en danger.
Pour éviter toute catastrophe, le pauvre gosse se gave de canettes de café froid comme un courtier du Kabuto-Cho en pleine crise financière.

Comme si ça ne suffisait pas à faire de la vie du gamin un enfer léthargique permanent, d'étranges horloges géantes volantes apparaissent dans le ciel partout dans le monde, comme autant de rappels que le temps est important. D'étranges créatures les accompagnent, apparemment issues des royaumes oniriques, et bien des humains tombent peu à peu dans des sommeils permanents proches du coma.
Concomitamment (oui, "en même temps", mais je me la pète grave), les cauchemars de Nate se mettent à refuser de disparaître à son réveil et hantent le monde réel, ravageant sa maison et manquant de tuer toute sa famille.
Ajoutez à ça le surpuissant et ténébreux reflet de Nate qui semble vouloir prendre parfois la place du jeune homme dans le monde réel et vous commencerez sans doute à repérer quelques idées légères visant sans doute, dans les tomes suivants, à expliquer narrativement l'importance, trop oubliée de nos jours, du sommeil réparateur. 
Nate décidera de quitter sa famille pour les protéger et trouvera refuge dans la "coloc des tarés", une bande de potes étranges dont certains sont humains (comme Chris et Alénia) et dont certains se présentent comme étant des entités oniriques (tels Lucian et ses quatre bras squelettiques lui sortant du dos ou l'étrange fleur qui a élu domicile sur l'épaule de Chris).
Vous l'aurez compris : on est en plein shônen, avec son ado en pleine quête initiatique, à la découverte de lui-même, qui réalise que l'amitié transcende les différences et que l'union fait la force (je suis belge, ça me parle). Mais cette fois, ça semble moins vain et fourre-tout qu'un One Piece (oh, ça va bien, les fans ; quand on a pour idole un mangaka qui fait écrire ses arcs narratifs par ChatGPT, on se la boucle à la glue !). Impossible de vous expliquer ce que l'on imagine poindre à l'horizon pour cette série sans trop en dévoiler mais il semble évident qu'elle a un message à faire passer et qu'elle compte bien le faire de façon originale et divertissante.

Formellement, c'est dessiné en respectant les standards les plus agréables et exigeants du genre. Même pour nos yeux pourtant formatés aux bandes dessinées européennes en couleurs et aux comics dégoulinants de teintes saturées, le noir et blanc de Sleepy Boy est parfaitement lisible. C'est uniquement dû à la maîtrise de la dessinatrice et c'est très appréciable car le contraire aurait fait regretter que seules quatre planches en début du volume soient colorisées et sur papier glacé. Alors que, dans le cas présent, l'on y voit surtout un bonus bienvenu (et ça va, hein, les Jean-Kévin ; je sais que c'est assez courant dans les mangas : je lisais du Masamune Shirow avant même que vous ayez imaginé que votre déversoir à pipi pouvait servir à autre chose).
D'ailleurs, si vous regardez même distraitement la troisième planche que nous vous présentons ci-contre, vous constaterez que le message de ce manga ne peut laisser grand doute : tous ces gens en monochrome, penchés sur autant d'écrans... Vous pourriez dire que ça manque de subtilité mais, l'attention se focalisant sur le personnage central, je pense que cela peut carrément échapper à une lecture un peu superficielle qui ne s'attardera que sur le compteur de caféine dans le corps de Nate. Entre subtilité relativement visible et évidente clarté, le message nous est introduit et sera sans doute par la suite développé... on a hâte.
Graphiquement attrayant, bourré de clins d'œil, de notes d'humour, de personnages attachants et intrigants, de bonnes idées et de rebondissements, ce petit bouquin devrait aisément trouver place dans votre poche. 
Très personnellement, en ce qui me concerne, c'est le premier manga qui me donne envie d'en faire la promotion depuis un moment tant il apporte en fraîcheur. C'est d'ailleurs chose faite !



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Le thème est prometteur.
  • Le propos est très actuel.
  • Le dessin est maîtrisé.
  • L'ensemble est aussi intéressant qu'amusant.
  • On doit attendre la suite pour être sûr que c'est aussi ambitieux que ça en a l'air, métaphoriquement parlant. 

La Parenthèse de Virgul #43




Hello les Matous ! Ça ronronne dans les chaumières ?
Aujourd'hui, on se tape un trip psychédélique avec le Top 3 des films dans lesquels on peut suivre le Lapin Blanc. Ça a l'air bizarre comme sujet, mais vous allez voir, ça le sera sans doute plus que vous le pensez.


Follow the White Rabbit
En 1966, Grace Slick compose et écrit White Rabbit, un titre psychédélique qui évoque la prise de puissants psychotropes de manière métaphorique. Elle va interpréter cette chanson avec son groupe de l'époque, The Great Society, avant de rejoindre rapidement le mythique Jefferson Airplane, qui en enregistrera la version la plus célèbre. Le groupe va connaître un énorme succès (citons notamment son autre classique, Somebody to Love) et va évoluer au fil du temps, se transformant en Jefferson Starship puis simplement Starship (le Starship des années 80, qui signa entre autres Nothing's Gonna Stop Us Now, grand succès de 1987 et bande originale du film Mannequin). 
Mais revenons à notre lapin blanc. White Rabbit est si ancré dans la culture populaire que de très nombreuses œuvres, et notamment un paquet de films, vont s'offrir ce titre (ou une reprise) pour leur piste audio. Et parmi eux, de sacrés bons films même, comme nous allons le voir tout de suite.


Platoon
C'est Oliver Stone, en 1986, qui ouvre le bal avec Platoon. Chris Taylor, engagé volontaire dans l'armée américaine, découvre la réalité du terrain en arrivant au Vietnam. Sa section est déchirée entre deux fortes figures : le sergent Barnes, un vétéran dur et impitoyable qui en impose même à son lieutenant, et le sergent Elias, expérimenté également mais bien plus humain. Pour Taylor, ces deux hommes symbolisent alors son dilemme intérieur et la lutte constante entre la violence nécessaire pour survivre et la conscience qui vient la modérer et la cadrer. 
C'est lors d'un moment de détente, alors que les soldats fument de la marijuana dans un baraquement spécialement aménagé et éclairé à l'aide de bougies, que White Rabbit se fait entendre. De la drogue, un titre populaire à l'époque où se déroule le film, une référence parfaitement logique donc.




The Game
C'est David Fincher, en 1997, qui ramène le lapin sur le devant de la scène avec l'excellent The Game.
Nicholas van Orton, un riche capitaine d'industrie, est un homme seul, implacable, hanté par le suicide de son père. Alors qu'il s'apprête à fêter ses 48 ans, son frère lui offre un cadeau intrigant. Une simple carte lui permettant de participer à un jeu. Un jeu dont Nic ignore le but, mais qui va bouleverser sa vie.
White Rabbit résonne quand Nicholas rentre chez lui, un soir. Il découvre que sa demeure est sens dessus dessous et que les murs ont été tagués. Ici, l'utilisation de la chanson est plus subtile. Elle marque un moment important, où le personnage central est désorienté, il évolue dans un monde dont il ne comprend plus les règles. L'effet est encore appuyé par l'utilisation de lumière noire, qui donne à la scène un côté irréel et fait ressortir les étranges inscriptions sur les murs. Nous ne sommes plus dans de la prise de drogue au sens strict, mais plutôt dans une déformation du réel, dans l'irruption de l'étrange au sein même de ce que l'on considère comme le monde normal et familier. 




Matrix Resurrections
Mais c'est avec Matrix Resurrections, en 2021, que White Rabbit atteint son apogée et, en quelque sorte, "boucle la boucle". Dans cette suite de la trilogie originelle, Thomas Anderson est chargé de développer la suite de son jeu le plus populaire : Matrix. Mais Thomas a un gros problème. En effet, il a de plus en plus de mal à se convaincre que l'univers qu'il a créé n'est pas la réalité. 
C'est lors d'une réunion de commerciaux, censés définir ce que sera la suite de Matrix, dans l'univers de fiction Matrix, que White Rabbit, dans une version très particulière, vient de nouveau taquiner nos tympans. Alternent alors les scènes montrant l'avis des commerciaux et les plans se concentrant sur la vie, répétitive et insatisfaisante, d'Anderson. 
Il est peu de dire que White Rabbit et Matrix sont liés. Ils sont en fait intimement intriqués. 

Rappelons-nous, dans le premier opus, Neo se voit conseiller de "suivre le lapin blanc", ce qui fait écho aux paroles : "And if you go chasing rabbits, and you know you're going to fall...". Dans la saga, le fait de s'éveiller, de faire face à la réalité, est symbolisé par l'absorption de pilules (la bleue pour rester endormi, la rouge pour s'éveiller), ce qui fait référence à la drogue (censée "ouvrir les portes de la perception") de la chanson : "One pill makes you larger, and one pill makes you small, and the ones that mother gives you don't do anything at all". L'on peut extrapoler un peu, et trouver même des connexions avec les agents de la matrice, censés défendre le système ("When the men on the chessboard, get up and tell you where to go"), ou encore trouver une similitude avec le caractère factice de la simulation, dont les règles peuvent être changées ("When logic and proportion have fallen sloppy dead"). 

La voix envoûtante de Grace Slick et l'univers de Matrix sont donc indissociables, mais on vous a gardé le meilleur pour la fin. Vous vous rappelez, au début de cette Parenthèse, quand la chanteuse compose White Rabbit et rejoint ensuite le groupe Jefferson Airplane ? Et savez-vous où ce groupe a effectué sa première apparition publique ? Eh bien, au 3138 Fillmore Street, à San Francisco. Et vous savez ce qu'il y avait, au 3138 Fillmore Street, de 1965 à 1972 ? Une boîte de nuit appelée... The Matrix. 
Miaw !

Remember what the dormouse said
Feed your head
Feed your heaaaad



Écho #12 : Le Journal de Beckett





On plonge dans l'univers de Vampire : La Mascarade avec un ouvrage revenant sur le lore du célèbre Jeu de Rôles.

Commençons par planter le décor pour ceux qui ne connaîtraient pas cet univers gothique fascinant. Le monde de Vampire : La Mascarade est peuplé de nombreux clans de vampires, ayant chacun leurs spécificités, leurs origines et leurs buts. L'on peut néanmoins les diviser en trois grands courants : la Camarilla, dont le but est de préserver le secret de l'existence des vampires et de se dissimuler au sein de la société humaine (une "mascarade" dont est tiré le nom du jeu) ; le Sabbat, dont le but est de mettre fin à la mascarade pour asseoir la domination des vampires sur le monde ; et enfin, des clans neutres. 

Le JdR en est à sa version 5 et propose même des univers dérivés permettant de jouer dans d'autres époques que le monde contemporain (Moyen Âge ou Ère Victorienne, par exemple). Il a connu aussi moult adaptations, en jeux vidéo, romans et BD. 
Mais ce qui nous intéresse plus spécifiquement aujourd'hui est un livre développant la méta-intrigue de cet univers.

Le Journal de Beckett est un pavé (plus de 550 pages) luxueux (papier glacé, jolies illustrations, hardcover) regroupant des tonnes d'informations sous forme d'entretiens, de coupures de presse, de conversations sur le net ou encore de notes manuscrites. 
Les trente chapitres permettent de couvrir plus de 20 ans d'intrigues et présentent des vampires de tous les clans, des fragments de mythologie, de nombreux lieux, le tout offrant évidemment de multiples pistes de scénario. 
Dans le lot de ces informations foisonnantes, l'on va par exemple retrouver une analyse très détaillée du développement psycho-sexuel du vampire ou encore un long résumé de la méta-intrigue, détaillant notamment les particularités de chaque version.

La qualité de l'ouvrage est indéniable, c'est dense et très bien mis en page. Par contre, malgré le fait que deux traducteurs et deux relecteurs soient crédités, les bourdes sont présentes dès la quatrième de couverture (ce qui n'aide pas à se rassurer quant au contenu des pages intérieures) : un très moche "ç'a" ouvre le bal (rappelons que, contrairement à "ce", "ça" ne peut s'élider) alors qu'un tout aussi affreux "nul part ailleurs" trône fièrement un peu plus loin. 
Ce sont certes des détails qui ne suffisent pas à condamner l'ensemble du travail de l'éditeur, m'enfin, ça crispe un peu, surtout pour le prix (50 euros).

Bref, si vous possédez déjà une version des règles de base (indispensables pour comprendre la thématique générale et la mécanique de jeu) de Vampire : La Mascarade, ce journal à l'atmosphère envoûtante devrait vous fournir des pistes multiples pour envoyer vos aventuriers à travers le monde tout en vous permettant d'approfondir les intrigues et rivalités entre les clans.






Un Livre dont vous êtes le Héros - sélection d'illustrations




Retour sur une collection de livres mythique qui a passionné bien des lecteurs dans les années 80 : Un Livre dont vous êtes le Héros.

Nous avons déjà souvent abordé ce genre d'ouvrages, notamment dans cette Parenthèse où Virgul revenait sur la légendaire Saga du Prêtre Jean, ou encore dans cet article qui présentait le bien plus récent Magiciens du Fer. Cette fois, nous allons survoler toute une collection, de manière essentiellement visuelle, grâce à la gamme publiée sous le label Folio Junior à partir de 1984.

Il faut bien comprendre à quel point ces livres ont été une révolution (et un formidable appel d'air permettant à de nouveaux lecteurs de découvrir le si passionnant domaine du papier). À l'époque, les jeux de rôles étaient encore balbutiants. Si D&D est déjà l'objet de quelques polémiques absurdes, L'Œil Noir vient à peine de sortir. Mais surtout, les JdR nécessitent du matériel, un groupe de joueurs, un apprentissage minimum de règles parfois complexes...
Avec les Livres dont vous êtes le Héros, Gallimard (précédant de peu Hachette et sa Saga du Prêtre Jean, évoquée plus haut et sortie en 1986) va rendre l'expérience de lecture interactive et permettre à bien des curieux de s'initier aux jeux de rôles de manière simple et instinctive. L'arpenteur de pages n'est plus seulement le témoin d'une aventure, il incarne le héros, il fait des choix, il décide de son parcours !

Cette gamme va proposer plusieurs séries. Parfois des one-shots mais aussi des sagas trépidantes et incroyablement riches, comme l'extraordinaire (et fleuve !) Loup Solitaire. Notons également La Voie du Tigre et son système de combat ambitieux (il était possible de choisir quel coup de poing, de pied ou quelle projection employer !).
Bien sûr, les choix semblent bien limités en regard de ce que propose un véritable JdR, mais la sensation d'influer sur l'histoire est bien là, et les meilleures séries permettent de véritablement profiter des acquis durement gagnés dans les aventures précédentes.  

Et si l'heroic fantasy se taille la part du lion dans cette collection, l'on trouve aussi de l'épouvante, de la science-fiction ou même des enquêtes policières. Chacun peut donc s'embarquer dans le genre qui le fait le plus vibrer. Et pour ne rien gâcher, ces livres disposent de couvertures colorés et fascinantes, aussi effrayantes parfois (à l'époque, personne ne chiale parce qu'il est "traumatisé" par un bouquin) que sublimes et poétiques (voir aussi, dans le même registre, notre sélection de couvertures de la collection Épouvante de J'ai Lu). 
C'est à un voyage graphique dans le passé que nous vous convions donc aujourd'hui. Parce que, pour ceux qui ont connu cette plongée enivrante dans l'épique et les frissons, pour ceux qui ont passé des heures à arpenter des contrées merveilleuses et à découper du bandit de grand chemin, rien ne vaut la vue de ces anciennes couvertures pour ouvrir, dans nos esprits, ces portes rouillées menant vers la réminiscence de plaisirs passés mais intacts...







Écho #11 : Swan Song




On se penche aujourd'hui sur du post-ap, présenté dans une belle édition aux allures pulp : Swan Song.

Il s'agit, selon l'éditeur, d'une "aventure grandiose et bouleversante" qui se déroule après une guerre nucléaire entre les États-Unis et l'Union Soviétique. Le monde est plongé dans le chaos et subit un hiver sans fin. C'est dans ce contexte sinistre que Black Frankenstein, un colosse, se voit confier la mission de protéger une enfant très spéciale. 

Survie, fantastique, lutte pour le pouvoir et combats épiques se mélangent dans cette fresque qui s'étale sur deux romans, bien épais (plus de 1000 pages en tout, même si, on le rappelle, la "page" n'est pas une unité de mesure, cf. cet article). 
Si vous avez aimé Le Fléau, de Stephen King, vous devriez être séduit par ce récit, d'autant que les points communs entre les deux histoires sont nombreux (jusqu'au mystérieux Homme en Noir, appelé ici "the Man with the Scarlet Eye").

Cette saga écrite par Robert McCammon est disponible aux éditions Toussaint Louverture depuis deux jours. C'est donc tout frais !
À la base publiée en 1987, cette œuvre qui a pourtant connu un grand succès (McCammon a d'ailleurs remporté un Bram Stoker Award pour ce roman) n'avait jamais été publiée en français.  

Une réserve cependant, et elle est de taille, le traducteur a cru bon de saloper les dialogues en virant la plupart des adverbes de négation et en pratiquant l'ellipse sauvage (du genre "j'suis" ; "tu r'tournes" ; "Y t'a virée"... une catastrophe !). On sait à quel point c'est pertinent (cf. cet article). Donc, non, ça ne rend pas les dialogues plus "réalistes" et, surtout, on se demande bien pourquoi il faudrait se baser sur une très hypothétique retranscription phonétique alors qu'on n'entend pas le texte mais qu'on le lit...
Résultat, non seulement c'est pénible à lire mais en plus, les personnages ont tous l'air de demeurés. Argh. 

Bref, un bel écrin mais un contenu très largement perfectible.



Natalie & Léon


— La vie, c'est comme ça tout le temps ou seulement quand on est petit ?
— C'est comme ça tout le temps.




Récemment, Natalie Portman a fait des déclarations quelque peu critiques envers le film Léon qui a lancé sa carrière en 1994.
Alors, dans ce qu’elle dit, il y a des éléments qui sont problématiques mais il y a aussi, pour une fois, des choses sensées. Ce qui est suffisamment rare, de la part d’une actrice, américaine de surcroit, pour être souligné.

On tape suffisamment sur les dindes décérébrées (cf. cet article) pour, de temps en temps, nous permettre de reconnaître que tout n’est pas à jeter dans les discours tendant à remettre en question les œuvres du passé.
Mais commençons par voir un peu ce que Natalie Portman a dit. En gros, elle pense que Léon contient des aspects malaisants à cause de la sexualisation de son personnage. Elle reconnaît aussi qu’elle doit beaucoup à cette œuvre de Luc Besson, ce qui est à porter à son crédit. 

Nous allons donc essayer de comprendre ce qui se cache derrière se terme « malaisant » ; pourquoi c’est une critique en général inacceptable mais qui, ici, peut se comprendre au vu du contexte. Eh oui, c’est toujours le contexte qui prime, sans ça, on est condamné à des lieux communs et des positions de principe absolues qui ne marchent absolument pas dans la réalité.

Commençons donc par voir pourquoi une telle critique n’est pas recevable.
Léon est un film dur, âpre, émouvant aussi, qui raconte une histoire d’amitié entre deux êtres abîmés par la vie. D’une part un tueur à gage un peu simplet, d’autre part une fillette qui se retrouve seule au monde après avoir vu ses parents (pas très recommandables), sa sœur et son petit frère (qu’elle aimait sincèrement) se faire assassiner. 
C’est de base une histoire qui doit susciter un malaise. 
Si voir dans quoi vit cette gamine et à quoi elle doit faire face ne provoque pas de malaise chez vous, c’est que vous êtes probablement un psychopathe. Donc, c’est fait exprès. Parce que tous les récits ne peuvent pas être juste des histoires aseptisées dégoulinantes de sucreries et de bisous.

Mais est-ce légitime de raconter de telles horreurs ?
Ben… oui. D’une part on en a besoin pour se construire, d’autre part cela permet d’expérimenter des événements extrêmes sans pour autant en subir les conséquences. Penchez-vous sur le Petit Poucet ou Hansel et Gretel, ce sont des contes parfaitement malaisants (on y découvre tout de même des parents abandonnant leurs enfants ou des pratiques anthropophages), et ces contes ont pourtant bercé l’enfance de bien des gamins en Occident. Outre les frissons « sécurisés », ils permettent aussi de délivrer une morale ou, tout au moins, des pistes de réflexion permettant à un jeune esprit de se blinder contre de possibles aléas de la vie.
Et plus important encore, dans toute tragédie, l’on teste votre humanité. Un drame est censé vous faire éprouver non de la peur mais de l’empathie. Et l’empathie, c’est la base du comportement civilisé et un élément crucial dans la survie de l’espèce. Je ne me comporte pas comme un barbare parce que je suis capable de me mettre à la place d’autrui, et donc de m’imaginer sa souffrance à travers des scénarios que je vais désapprouver (sauf si, bien entendu, j’ai une bonne raison d’en vouloir à quelqu’un).

Au-delà de ça, l’on pourrait même revendiquer la simple liberté artistique de l’auteur. Tant que l’on reste dans les limites de la loi (il est interdit par exemple de représenter un mineur dans des scènes pornographiques, ce que certains éditeurs semblent ignorer, cf. cet article), tout est possible.
Cela va même au-delà de « c’est possible », c’est même nécessaire. Une histoire, sans problème à résoudre, sans menace à affronter, sans dilemme permettant de faire en sorte que le héros puisse se dépasser et évoluer, n’est pas vraiment une histoire.
On ne peut donc pas reprocher à un récit d’être malaisant si c’est son but intrinsèque. 
Il y a des scènes très dures et touchantes dans Stand by Me par exemple. Et c’est ce qui en fait une bonne nouvelle (et un bon film). La Vie est Belle, de Roberto Benigni, confronte un enfant à la pire horreur qui soit (la guerre et les camps), et pourtant, c’est aussi un film beau, tendre, poétique même. 
On a besoin, en fiction, de la saleté, du malaise, de la noirceur et des pires merdes. Parce que sans cela, le héros et son parcours ne peuvent accéder au lyrisme. 

Bien entendu, chacun regarde et lit ce qu’il souhaite, ce qu’il aime. Je connais des gens qui ne supportent pas qu’une histoire ne se termine pas « bien » [1], et c’est leur droit. Tout comme il est aussi du droit des auteurs et lecteurs d’écrire et lire des récits qui sont d’une approche plus rugueuse. 
Pour prendre une métaphore simple, on ne reprochera à personne de ne boire que de l’eau et du lait, mais une limonade, une bière ou un whisky, ça peut avoir son charme. 

Donc, non, dire d’une œuvre qu’elle est « malaisante » (quand elle est clairement basée sur des situations et personnages dramatiques) n’est pas une critique recevable.
MAIS, de la part de Natalie Portman, ça peut s’entendre, et l’on va également voir pourquoi.

Tout d’abord, il faut bien comprendre que lors de la sortie de Léon, la jeune actrice qui interprète Mathilda a à peine 13 ans. C’est une très jeune adolescente qui va être propulsée sur la scène internationale, sous le regard de millions de gens. J’ignore si elle a ou non été bien entourée, mais même en l’étant, on ne ressort pas indemne de ça. 
Pour preuve, elle-même raconte une anecdote édifiante. Alors qu’un jour elle se précipite sur un courrier de fan (le premier selon elle, mais même si c’était le centième, l’impact reste identique), elle lit alors les propos abjects d’un homme qui lui dit qu’il a pour fantasme de… la violer.
Ça doit marquer un peu quand on est une gamine de 13 ans. Et par « un peu », vous aurez compris que je veux dire « beaucoup ». Ça marquerait même un adulte, donc une enfant…
Du coup, comme Natalie Portman l’explique, elle s’est construite dans l’angoisse d’être objetisée et de servir de fantasme à des tarés qui pouvaient lui faire n’importe quoi. Tous les hommes ne se comportent pas comme des merdes, bien entendu, mais même si c’est 1 % des mecs, sur plusieurs millions, ça commence à faire du monde. Ça fait même bien trop de monde pour se sentir en sécurité. 
Et cette peur, viscérale, lourde, quotidienne, Portman l’a associée (à raison) au film Léon. Non parce que le film est mauvais ou problématique, mais parce que certains spectateurs sont des fils de pute qui envoient des menaces de viol à des gamines. 

Or, si l’on prend ça en compte (et il me semble que ce n’est pas idiot de le faire), l’on peut parfaitement comprendre les réserves de Natalie Portman sur ce film qui est associé, dans son esprit, à des menaces de psychopathes et à une découverte de la sexualité qui a été freinée par la crainte de l’image qu’elle pouvait renvoyer à l’écran. 
En fait, pour quelqu’un qui a dû gérer une telle situation à un si jeune âge, elle a plutôt un recul assez ahurissant et des propos très modérés (rappelons qu’elle ne condamne ni Besson ni le film, et qu’elle rappelle que cette œuvre a lancé sa carrière).

Au regard de ce qu’elle a vécu, le fait qu’elle émette des réserves sur ce film (que personnellement j'apprécie, je pense même que c’est, de loin, le meilleur Besson), surtout des réserves modérées et raisonnables, me paraît parfaitement légitime. Et du coup, ça fait du bien, putain, dans ce monde de wokistes hystériques, de se rendre compte que des personnalités peuvent encore s’exprimer avec un minimum de nuances et livrer leur opinion sans en faire une généralité ou un brûlot absurde. 

Par contre, il ne faut pas pour autant oublier que les auteurs ont le droit au malaise, à l'erreur, à la provocation, au mensonge et même à la médiocrité. Parce que les auteurs ne vous doivent rien. Certains sont médiocres et incapables de construire un récit qui tiennent la route, d'autres sont brillants et créent des chefs-d'œuvre, beaucoup tâtonnent et naviguent dans un entre-deux aussi flou que confortable, mais aucun, même le pire, n'a de compte à rendre à celui qui le lit. Même (surtout !) quand il bouscule, surprend, expérimente et dérange (encore une fois, dans les limites de la loi). Parce que c'est ça son rôle, sa raison d'être, sa mission. 
Alors oui, une petite fille plongée trop tôt sous les projecteurs hollywoodiens a le droit de se plaindre et d'émettre des réserves sur un film qui l'a touchée personnellement et a grandement modifié sa vie. Cela ne justifie en rien la longue litanie des pleurnicheurs qui se sentent offensés ou traumatisés par quelque chose qui n'existe pas. On ne peut pas tordre la fiction selon les besoins, diktats et délires de chacun. Alors, à moins d'avoir reçu des menaces de viol à cause d'une fiction quand vous étiez enfant, prenez vos blessures imaginaires, faites-en un beau paquet, enterrez ça dans votre putain de subconscient, là où toutes vos larmes de pacotille auraient dû finir, et ne rendez pas les auteurs (même les mauvais) responsables de votre état misérable et de votre manque de résilience. Si vous êtes détruit par des mots, de l'imaginaire, des choses qui n'existent pas, alors c'est vous le problème. 


Apprends à écrire tes blessures dans la sable et à graver tes joies dans la pierre.
Lao Tseu




[1] Ils sous-entendent alors que ça doit se terminer par une « happy end », alors que pour moi, « une histoire qui se termine bien » signifie plutôt « une histoire qui a une fin logique et émotionnellement forte ».


Écho #10 : Nerf M41A




Hey les Matous, ça ronronne ? 
On évoque aujourd'hui un flingue mythique issu d'un film non moins légendaire !

Le M41A est une arme futuriste apparue dans le film Aliens, en 1986. Ce fusil d'assaut, développé par Armat Battlefield Systems, équipe notamment les Marines qui vont se frotter aux nombreux xénomorphes rencontrés sur LV-426. 
Bref, une arme bien cool dont tout collectionneur rêverait de posséder la réplique.

Eh bien, c'est tout à fait possible, et vous avez même deux choix à votre disposition.
Soit vous optez pour la réplique exacte (ci-dessous), en airsoft, et il vous en coûtera plus de 350 euros, autrement dit un prix complétement délirant, soit vous pouvez vous rabattre sur la version Nerf (ci-dessus), qui fait bien plus "jouet" mais dont le prix, toujours trop élevé, est quand même plus abordable (une centaine d'euros).

Notons que ce M41A de la gamme Nerf LMTD (pour "limited") est plutôt bien fichu, la réplique est correcte si l'on met de côté la couleur (qui n'est pas non plus trop naze pour du Nerf), il y a même un compteur de munitions, comme sur le modèle original, et le lance-grenades est bien entendu fonctionnel.

Ceci dit, niveau fléchettes, on ne peut pas dire que la marque ait fait un effort exceptionnel. En effet, vous ne trouverez dans cette boîte (elle aussi collector, avec des traces d'acide d'aliens) que trois "grenades" et dix "balles". Pas franchement énorme vu le prix. Et grandement dommage vu que ces munitions possèdent une couleur spécifique, que l'on ne retrouve pas sur les autres modèles. 

Bref, un gadget en plastique, qui ne vaut clairement pas le prix auquel il est vendu, mais qui va certainement en faire craquer plus d'un. Miaw !


Wolfskin



À la fin des années 2000, Warren Ellis, sans doute pour changer un peu des histoires de super-héros auxquelles il s'adonnait depuis plus de quinze ans (il a commencé à écrire pour Marvel dès 1994 cf. notre dossier sur l'auteur), et peu après la publication de son premier roman, a fait un petit détour par l'heroic fantasy, plus précisément cette sword & sorcery naguère mise à l'honneur par les aventures de Conan le Barbare, en s'intéressant aux pérégrinations d'un guerrier nordique dans les contrées hostiles de l'Europe centrale.

Ça a donné la mini-série Wolfskin, dont les premiers épisodes ont été dessinés par Juan José Ryp (ils avaient travaillé ensemble sur No hero et Black Summer) qui sont trouvables en France dans un album broché de la collection "Milady Graphics" chez Bragelonne, complétés par un autre épisode dispensable et une belle galerie de couvertures originales

Le contexte rappellera aux amateurs la série Thorgal (malgré des noms différents, on évoque les mêmes territoires et peuplades dans une époque similaire), sauf qu'Ellis et Ryp s'en donnent à cœur joie dans l'éviscération et la décapitation : le personnage principal, un "Peau-de-loup", est un guerrier féroce, tenace, plutôt malin et bretteur émérite, doté qui plus est d'une force spectaculaire (imaginez un grand guerrier viking capable de manier d'une main une épée longue ! Parfait personnage pour un rôliste à tendance grosbill) ; cependant, lorsqu'il est sous l'emprise des « têtes noires », les champignons sacrés de Wrod, son dieu de la mort, le voilà qui vire berserk ! Et c'est parti pour des pages entières sans texte, inondées du sang des malheureux adversaires de ce Lone Ranger des âges farouches : les têtes volent, les membres tombent, les tripes se déversent par les profondes entailles portées par ses deux armes de prédilection. Au besoin, il peut aussi défoncer des crânes à coups de marteau... 

À un contre dix, il garde l'avantage, ses sens suraiguisés lui permettant d'anticiper les pièges éventuels. En outre, doté de cette sagesse conférée par d'innombrables combats, il sait les éviter lorsque c'est possible et ne laisse pas aisément manipuler ou attendrir. Solitaire survivant des siècles sauvages, tel un John Wick des temps anciens, notre héros ne parle que lorsqu'il y est contraint - et le bougre n'est pas avare de bons mots.

Mais alors que Conan, cet autre fier-à-bras, ne craignait pas grand-chose en dehors de la magie, et respectait les cultes de ses adversaires, le Peau-de- loup ne recule que devant les machines : l'un des belligérants brandit en effet une sorte de mousquet rudimentaire (rappelez-vous les boute-feux dans Princesse Mononoké), arme qu'il considère juste bonne pour les traîtres et les veules qui frappent de loin, mais dont il connaît le pouvoir destructeur.

L'ensemble aurait pu être écœurant, cela dit, ou agaçant et répétitif, d'autant que le scénario ne brille guère par son originalité (notre fier barbare se trouve pris entre deux clans qui se disputent un village, chacun cherchant à s'attirer ses faveurs pour faire pencher la balance). Néanmoins, grâce à quelques répliques bien senties où pointe l'ironie mordante du Ellis de Supergod, ainsi qu'à une vision assez lucide des cultes qui régentent la vie des peuples en cette ère trouble, le lecteur tolérant devrait passer un bon moment, plein d'hémoglobine et de fureur. 



+Les points positifs-Les points négatifs
  • Un récit enlevé, brutal et sanglant, sans aucune concession sur la violence.
  • Une vision intéressante d'un âge proto-médiéval où la magie est quasiment absente.
  • Une édition française soignée.


  • C'est parfois très gore. Trop ?
  • Une histoire sans aucune originalité.
  • Plus disponible neuf en français.