Dans ce dessin sexiste, une femme est maltraitée. Sauras-tu expliquer pourquoi ? |
De nos jours, où l’hystérie et
l’extrémisme dominent dans tous les domaines, les dérives du politiquement
correct ne sont pas seulement nombreuses, elles tournent tellement à l’absurde
que l’on se demande s’il faut en chialer de rire ou en frissonner d’angoisse.
Certainement un peu des deux.
Évidemment, les œuvres
artistiques en général, et les livres en particulier, font l’objet d’attaques massives de la part d’activistes manquant clairement de recul et de nuance. Un
article de Slate expliquait par exemple fin 2017 en quoi des tas de
classiques de la BD et de la littérature (ou même du cinéma d’ailleurs) étaient
d’horribles étrons sexistes à peine dignes de finir dans une benne de recyclage
du papier.
L’on va essayer de revenir sur
les arguments avancés et voir en quoi ils sont spécieux. Au minimum.
Alors, la journaliste à l'origine de cet article
s’étonne de ressortir de vieux bouquins du placard et de ne plus les trouver à
son goût. Elle se demande même comment elle a fait à l’époque pour ne pas voir
l’odieux sexisme dont ils débordaient.
Eh bien, c’est assez facile, à
l’époque, ce n’était tout simplement pas sexiste. C’est un principe un peu connu,
des historiens notamment : on ne peut pas chausser des lunettes modernes
pour juger une époque passée. La morale, les mœurs, les dogmes sont différents
d’une époque à l’autre.
Je vais prendre un exemple
cinématographique pour illustrer ce propos. J’ai revu récemment Un éléphant ça
trompe énormément et Nous irons tous au paradis, deux comédies très populaires
réalisées par Yves Robert dans les années 70. Ça a vieilli, forcément, mais
rien que pour le plaisir de retrouver Jean Rochefort, ça vaut le visionnage.
Bref, dans l’un de ces films (le second si je me souviens bien), il y a une
scène très particulière, qui provoquerait un tollé de nos jours.
L’un des personnages, Bouli
(joué par Victor Lanoux), est agacé par la musique que sa secrétaire écoute,
selon lui trop fort. Il lui demande alors de « baisser sa musique de
nègre ». C’est bien simple, ça m’a carrément fait sursauter tellement la
réplique a l’air violente de nos jours. Et la secrétaire réplique
« musique de nègre, pfff, du Bach ! » (je ne me souviens plus de
ce qu’elle écoute, je mets « Bach » par défaut, peu importe [1]). Ce qui
est intéressant ici, c’est que la secrétaire n’est pas outrée par le terme
« nègre », mais par le fait que son patron dénigre ce qu’elle écoute
et n’ait qu’une culture musicale superficielle. Et le pire, c’est que le
personnage de Bouli, dans le film, n’est même pas raciste. C’est un type un peu
bourrin, mais plutôt sympathique, qui d’ailleurs s’occupe des enfants de ses ex
(certains relèvent les œuvres qui mettent en scène des femmes au foyer mais
oublient de citer celles qui montrent le contraire).
Si l’on juge ce film avec les
codes moraux actuels, il est ouvertement raciste. Mais en réalité, non, il a
juste été réalisé à une époque ou le terme « nègre » n’avait pas la
même connotation violente. Je ne dis pas que c’est « bien », c’est
juste un fait.
Je ne m’étais pas choqué,
enfant, de cette scène, alors qu’elle m’a vraiment interpelé aujourd’hui. Ce
n’est pas parce que j’étais raciste étant gamin et que je suis subitement
devenu un humaniste une fois adulte, c’est parce que l’époque et ses codes ont
changé.
Si Yves Robert et Jean-Loup
Dabadie écrivaient le même film en 2018, ce dialogue n’existerait pas. En tout
cas, pas avec ce terme. Mais ça ne veut pas dire que le personnage ou les
auteurs étaient racistes.
Donc, aller dénicher du
« sexisme » dans de vieilles BD ou des films des années 80, en
scrutant tout cela avec une lunette de sniper moderne, ça n’a aucun sens. Si
j’étudie la Rome antique et que je dis que les jeux du cirque sont horribles,
c’est une idiotie, car j’exprime alors une opinion moderne et non une analyse
tenant compte du contexte historique et social.
Et même en quelques décennies,
dans le monde occidental, les normes ont bien changé. Je ne porte aucun
jugement de valeur (il y a des changements positifs, d’autres plutôt puants),
c’est simplement une remarque concernant la grille de lecture, qui ne peut plus
être la même.
L’enseignante et chercheuse
qui intervient dans l’article explique d’ailleurs assez bien pourquoi personne
n’a vu de sexisme à l’époque dans les ouvrages attaqués aujourd’hui. Les gens
« n’avaient pas la bonne grille de lecture ». C’est vrai. Sauf que
pour elle, c’est le signe d’une fourberie du « patriarcat », alors
qu’il s’agit tout connement d’une évolution des mœurs.
La sociologue qui prend la
parole ensuite ne dit rien d’autre que ce que je défends : « Ce qu’on
retient des livres, c’est ce qui nous intéresse […], en les relisant plus tard,
ce n’est pas la même chose qui ressort parce que les horizons d’attentes sont
différents. »
Les « horizons
d’attentes »… le terme est si pédant qu’il en devient ridicule, mais c’est
vrai sur le fond. Elle ne s’en aperçoit pas (hou, voilà que je fais du
mansplaining !!) mais la sociologue est tout bonnement en train de dire
que les œuvres n’étaient nullement sexistes à la base, c’est simplement le
point de vue de certains lecteurs qui a changé.
Alors, voyons un peu ces
œuvres qui agressent et oppressent certaines féministes. On commence par
Blanche Neige. Apparemment, ce dessin animé est sexiste parce que Blanche
Neige, une fois arrivée chez les nains, fait un peu de ménage et… prépare des
tartes aux pommes. Je n’avais pas encore identifié la tarte comme odieux
symbole du patriarcat, mais bon, admettons. Par contre, elle débarque à
l’improviste chez des nains personnes de petite taille qui ont la gentillesse
de l’héberger gratos, heu, elle peut peut-être passer un coup de balai pour
remercier, non ? Pour satisfaire les paranoïaques, on lui aurait bien fait
mettre les mains dans le cambouis en réparant le 4x4, mais il se trouve que ces
cons de nains n’ont pas de bagnole. Alors, comme elle n’a pas été élevée par des
sangliers au milieu de la forêt et qu’elle est sympa, elle aide au ménage.
Pas de quoi défriser un poil
de chatte.
Quelques exemples de films
viennent ensuite, je préviens, c’est gratiné. Déjà, rien que l’intro, écrite en
« écriture inclusive », cette sous-novlangue de merde pour oisifs
fragiles, donne l’idée de départ. Les gens seraient
« nombreux.ses » à pleurer en regardant Retour vers le futur,
Wargames, Les Goonies, Crocodile Dundee, Indiana Jones ou SOS Fantômes.
Tain, mais, c’est qu’elles
foutent toute mon adolescence aux chiottes ces radasses !
Bon, on prend Crocodile
Dundee, au hasard. Ce film ne montre pas la supériorité de Mike sur Sue, il
joue sur le contraste entre deux milieux très différents : la brousse
australienne et New York. Dans la brousse, Sue ne connaît rien (pas parce
qu’elle est une femme, mais parce que c’est une citadine), ce qui permet à Mike
de montrer sa supériorité. Par contre, dans la deuxième partie du film, quand
Mike débarque à New York, c’est lui qui n’a plus les codes et a des réactions
décalées et drôles. On pourrait faire exactement le même film avec un
journaliste à la place de Sue, sauf que c’est plus sympa pour l’histoire
d’avoir aussi une love story.
Et les autres films ne sont
pas plus sexistes. C’est simplement le regard que leur portent certains (ou
certaines) qui est perverti par une obsession malsaine.
Allez, on s’accroche,
parce que ce qui suit est encore pire.
On nous dit maintenant que les
« cartoons ont de quoi faire hurler : songez à l’affreux personnage
de Pépé le putois qui confond amour et agression en passant le plus clair de
son temps à suivre des partenaires apeurés pour les embrasser de force. »
Wow. Ah là j’ai repris la
phrase entière, parce que la connerie à ce point-là, ça devient fascinant. La
meuf nous dit qu’un putois imaginaire qui fait des bisous à un chat imaginaire,
c’est une agression sexuelle. Il y a même un gif qui illustre le propos.
Je vais faire une parenthèse.
Évidemment que les agressions sexuelles c’est odieux, illégal, traumatisant,
condamnable, et j’en passe. Il faudrait être complètement con pour dire le
contraire. Mais voir une agression sexuelle quand deux peluches se font des
bisous dans un dessin animé, perso, je pense que ça relève de la maladie
mentale. Si vous en êtes là, c’est un psy qu’il faut aller emmerder, pas des
auteurs ou des dessinateurs.
D’autres dessins animés sont
cités. Petit Ours Brun notamment (oui, ça prête à rire, mais bon…) parce que
maman ours serait tout le temps en tablier en train de cuisiner, ranger, laver…
Ben, oui, c’est un stéréotype.
Mais les stéréotypes, on ne les sort pas magiquement de son cul, ça part d’une
situation à une époque majoritairement vraie. Ou suffisamment fréquente pour
devenir un stéréotype disons. De toute façon, quoi, il faudrait que plus aucun
personnage féminin ne soit représenté en train de s’occuper de ses enfants ou
de faire une tarte pour que l’œuvre soit adoubée par les féministes ?
C’est débile.
Le sexisme, ce serait de dire
« une femme ne peut faire que ça ». Or, ce n’est pas le message
véhiculé par ces films ou ces dessins animés, loin de là.
Dans la longue liste des
œuvres condamnées, on trouve aussi Il était une fois l’Homme, non pour le titre
(ah, dommage) mais parce que, dans l’épisode consacré à Cro-Magnon, la femme y
est décrite comme un « modèle de charme ».
Dire d’une femme qu’elle est
charmante est sexiste. Si vous faites ça, vous êtes un enculé. Moi perso,
jamais je ne me laisserais aller à ces bas instincts rétrogrades et
paternalistes en complimentant ces mégères (je ne sais pas si tout le monde
saisira à chaque fois l’humour et le second degré, si ce n’est pas le cas,
allez pleurer chez votre mémé, ça vous fera une anecdote à lui raconter).
Pomme d’Api aussi, c’est de la
merde selon la « journaliste ». Ben c’est vrai que Pomme d’Api, c’est
un peu la « gazette des mascus », c’est d’une violence…
On passe aux BD, avec les
Schtroumpfs et Astérix, d’infâmes torchons sexistes, comme on le sait bien.
Pour les Schtroumpfs,
l’argument vient du fait que la Schtroumpfette est définie par sa seule
féminité. C’est probablement ce qui a été dit de moins con jusqu’ici. C’est
vrai, tous les autres Schtroumpfs ont un trait de personnalité (boudeur,
joyeux, bricoleur…). Bon, Peyo doit maintenant être habitué aux Immelmann dans
sa tombe, depuis le temps (certains abrutis ont accusé les Schtroumpfs d’être
totalitaristes, racistes ou encore antisémites, alors sexistes en plus,
honnêtement, ça va pas noircir le CV a priori).
En fait, ici, l’explication
est simple. Comme bon nombre de personnages pour enfant de l’époque, les
Schtroumpfs sont asexués au départ. On ne peut pas reproduire une quelconque
logique humaine dans leur organisation sociale. L’introduction de la
Schtroumpfette est une simple (et bonne) idée de scénariste, à une époque où il
était encore possible de manier des concepts simples sans déchaîner les
accusations des procureurs d’opérette.
L’argument sexiste serait
valable si la Schtroumpfette était présente dès le départ. Or, non, on voit
bien que c’est juste un ressort scénaristique amusant, pas une volonté de
réduire la femme à sa condition (hallucinant qu’il faille en venir à
de telles explications…).
Pour Astérix, je n’ai pas lu
l’album en question, mais je me doute que ça doit être du même niveau que ce
qui avait déclenché la polémique sur l’accent de la vigie pirate (cf. cet
article).
Ah, il y a aussi la série des
Martine, qui serait une merde immonde parce que la jeune fille y est montrée
(dans un album) en train de s’occuper d’un bébé. Ah les salauds d’auteurs
misogynes, les fils de pute, oser montrer une nana en train de s’occuper d’un
mioche, il faudrait les écarteler ces bâtards !
Non mais là, ils vont trop
loin, comment osent-ils traîner dans la boue à ce point l’image de la
femme ? Elle serait responsable, aimante, raisonnable et rouage
indispensable du développement d’un enfant… non, mieux vaut ne pas être sexiste
et la montrer en train de picoler au bar du coin avant d’aller supporter devant
la téloche trois crasseux qui tapent dans un ballon.
On passe ensuite à la trilogie
des Sissi, qui trouve tout de même grâce aux yeux de la pourfendeuse de
salopards. Ça m’étonne pas, ils sont chiants à mourir ces films ! Qui
regardait ça, même à l’époque ? Aucune de mes amies en tout cas.
Mais bon, elle « a un
caractère affirmé » (belle analyse menée à coups de pages Wikipédia), donc
ça passe. En réalité, pour ce qu’on en connaît, la vie de Sissi est bien moins
idéale et romancée que dans les films, elle est notamment probablement plus
dépressive que rebelle, mais qu’importe puisque nous en restons au symbole et à
la surface des choses.
Et là, j’en arrive au moment
où je vais sortir l’artillerie lourde, où je vais trucider, où je vais découper
de la pouf ignorante en rondelles. Le Club des Cinq !!
L’imbécile qui rédige l’article
sur Slate reproche au Club des Cinq (des romans écrits par une femme)
tout et son contraire. Annie, ça ne va pas parce qu’elle est trop douce, timide
et coquette. Mais Claude (Claudine), ça ne va pas non plus parce qu’elle est un
« garçon manqué » (donc, elle n’est pas… douce, timide et coquette).
Mais, au nom du ciel,
qu’est-ce que cette pauvre Enid aurait dû faire pour plaire aux ignorantes
actuelles ? Écrire un personnage transgenre ? Ah ben oui, ça aurait
été très bien perçu au sein de la Bibliothèque Rose ou chez sa maison d’édition
anglaise, dans les années 40 et 50 (encore une fois, l’analyse, si l’on peut
appeler ça comme ça, ne tient aucun compte du contexte).
L’on voit bien ici que si une
personne veut voir du sexisme quelque part, elle en trouvera, quitte à se
contredire. Parce qu’enfin, parvenir à dire dans le même paragraphe que le
personnage d’Annie est sexiste parce qu’elle est féminine et que celui de
Claude l’est tout autant parce qu’elle ne l’est pas, heu… soit la personne a un
besoin urgent d’un psy, soit son QI est inférieur à sa pointure de godasse.
Dans les deux cas, Slate a du mal à filtrer visiblement.
Pour être honnête, vient
ensuite un propos relativement correct, qui explique que l’identification des
petites filles aux personnages masculins (chose normale, l’identification ne
dépend pas du sexe ou de la ressemblance avec le personnage, cf. cet article)
est due au fait que les personnages masculins, souvent, sont des sujets
agissants, alors que les personnages féminins subissent plus l’action.
C’est souvent vrai, même si
l’on peut trouver des tonnes d’exemples contraires dans la pop culture (que ce
soit dans des romans, séries TV, films, jeux vidéo ou BD) : Buffy,
Fantômette, Lisbeth Salander, Wonder Woman, Lara Croft, Mafalda, Miss Marple,
Arya Stark, Candy, Scarlett O’Hara, Bridget Jones, Clarice Starling, Kerry
Chang, Harriet « Makepeace » Winfield, Ellen Ripley…
Il existe donc des personnages
féminins « agissants ». Certains sont même carrément classe (Lisbeth
ou Arya par exemple, mais bon, je suppose qu’elles tombent dans la catégorie
« Claudine » du Club des Cinq : pas assez féminines pour être
validées, alors que si elles l’avaient été, c’est ce qui les aurait
disqualifiées aux yeux des extrémistes qui voient du sexisme partout).
Viennent ensuite des propos
sur la censure, où les consultantes avouent ne pas interdire les œuvres
qu’elles jugent « sexistes » à leurs enfants. Heureusement, parce que
franchement, vu l’immensité de ce que recouvre pour elles le « sexisme »,
leurs pauvres gamins n’auraient rien le droit de lire ou regarder.
Ce discours est assez
nauséabond, car il a pour but de faire passer ces extrémistes (oppresseurs
réels pour le coup, qui foutent la pression sur les auteurs) pour des gens
« tolérants », qui vont jusqu’à permettre à leurs gosses de regarder
Crocodile Dundee ou de lire un Club des Cinq, ces brûlots sexistes bien connus.
On enchaîne avec le principe
de contre-stéréotype (pff… je vous jure, c’est d’un niveau, on dirait un débat
morandinesque avec des poufs de télé-réalité) que les intervenantes trouvent
dangereux parce que ça donnerait une image trop valorisante de la femme, ce qui
obligerait les nanas à se conformer à des dogmes trop ambitieux…
Bon, ben selon les féministes,
pour bien parler de la femme dans des œuvres de fiction, il faut… qu’il n’y ait
pas de femme. Ah ben, ça donne envie de vomir tellement c’est con, c’est vrai,
mais c’est bien que ces gens en arrivent d’eux-mêmes à constater l’absurdité de leurs dérives.
Et, comme il fallait s’y
attendre, l’article se termine en beauté en évoquant la « réécriture » des
classiques. On attend impatiemment la version non-genré de 1984
réécrite par Christine Angot, cette « autrice » (là pour le coup, on
peut dire « autrice ») qui a prouvé que l’on pouvait tout ignorer de
la technique littéraire et vendre tout
de même des livres vulgaires qui feraient passer Jackie Sardou pour le summum de
la distinction.
Et ça continue dans l’illégal
cette fois, puisque l’une des intervenantes se félicite du fait que
« heureusement, les créateurs n’ont pas le monopole de la réécriture de
leur œuvre ».
Ben… si. En fait, peu importe
ce que tu penses de telle ou telle œuvre miss, tu n’as pas le droit de la
modifier. Et les fan-arts évoqués, s’ils sont parfois sympathiques, sont
illégaux (sauf dans le cas d’une parodie, ce qui n’est que très rarement le cas
des fan-fictions).
Bon, pfiouu…
On passe à la conclusion.
Quand j’ai commencé cet
article « réaction », je pensais manier bien plus l’humour que je ne
l’ai fait. En fait, les imbécilités que je commente ne sont pas juste des
inepties balancées à la va-vite par des incompétents, elles sont
symptomatiques, je le crains, d’une évolution radicale de notre société. Une
évolution où chacun se pose en victime, par défaut, de son
« statut ». Et c’est compliqué de se marrer avec ça… parce que ça
suppose un avenir très, très sombre (et pas seulement pour le domaine de l’édition).
Pour faire vite, je crois
sincèrement que l’on devrait juger les gens sur ce qu’ils FONT, et non ce
qu’ils SONT. Donc, bien entendu, je suis contre le racisme, le sexisme, l’homophobie,
etc. Mais uniquement quand cela recouvre une réelle attitude raciste, sexiste
ou homophobe. Si l’on déconsidère quelqu’un à cause de ses origines, son sexe,
ses préférences sexuelles, bref, ce qu’il EST, c’est stupide (et illégal en
prime). Par contre, on a beau être une femme, noire, lesbienne, si l’on sort
une connerie, ben ça reste une connerie. Et si l’on braque une banque, ça reste
un comportement criminel.
Beaucoup, de nos jours,
brandissent ce qu’ils sont comme un étendard, et comme si cela pouvait servir de
passe-droit ou excuser ce qu’ils FONT. C’est non seulement assez peu digne comme
attitude, mais c’est très dangereux au niveau social. Car cela admet des
jugements qui ne concernent plus les faits mais les auteurs des faits, comme si
certains avaient un permis « d’aller trop loin ».
Je ne crois pas du tout à une
guerre, même intellectuelle, entre hommes et femmes.
Je me suis engueulé, dans la
vraie vie ou sur internet, avec autant de féministes bas de plafond que de mecs
arriérés et méprisants.
Et comme souvent, je n’ai aimé
aucun des deux camps.
Peut-être parce que je vois
trop les défauts des doctrines pour être sensible à leurs éventuelles qualités.
Ça doit expliquer en partie mon côté asocial.
L’essentiel des sujets d’actualité
me laisse de marbre. Je ne regarde pas la télévision (pas les émissions en tout
cas), je ne vote pas, je travaille chez moi, je me préoccupe de mes proches, de
mon environnement immédiat, mais ça s’arrête là. Le reste, j’ai appris à l’ignorer. Mais, lorsque
des abrutis sectaires touchent aux livres, je réagis encore.
En tant que lecteur d’abord.
Les livres m’ont façonné bien plus que l’école « républicaine »,
cette blague que l’on nous vend depuis des décennies comme un modèle d'efficacité et qui sombre de plus en
plus dans une forme de garderie. En tant qu'écrivain ensuite. Je revendique le
droit, pour les auteurs de fiction, de faire ce que bon leur chante, de se
tromper, d’user de stéréotypes (que ce soit pour les dénoncer ou non), d’aller
contre le sens du vent, de dire merde à la foule et de chier sur les censeurs
en puissance et les grands courageux du net, qui se transforment en tigres
derrière leurs écrans mais deviennent subitement souris quand on les croise par
hasard.
Lutter contre le sexisme, si
cela veut dire faire en sorte de ne pas admettre qu’une femme soit moins bien
jugée qu’un homme à cause du seul fait de son sexe, c’est une évidence. N’importe
qui d’un peu sensé partage ce combat.
Si cela veut dire scruter le
geste le plus insignifiant pour en déduire des conneries, c'est ridicule. Regardez par exemple cette vidéo, où
des consignes sont analysées par un vidéaste, et parmi ces consignes figure le
fait de ne pas « aider une femme si elle ne vous l’a pas demandé »,
parce que sinon, ben... vous êtes « sexiste ». Eh bien, non, moi, quand j’aide
quelqu’un qui est dans une situation difficile, je ne me demande pas s’il a des
couilles ou non dans le slibard, ça part d’une bonne intention, et y voir autre
chose, c’est… ça me dépasse. Et il y a bien pire, comme des connasses qui, au nom d'une idéologie débile, mettent en danger leurs enfants et les maltraitent (cf. cette vidéo). Donc, ouais, quand on en arrive là, on prévient la DASS, les flics et tout ce que l'on peut prévenir.
Le sexisme véritable (genre, les femmes c’est de la merde), je ne l'ai jamais rencontré IRL. Parfois
sur le net, mais c’est très marginal. Et je trouve normal de m’en offusquer,
car l’imbécilité ou la violence, ce n’est pas une histoire de sexe, mais d’intelligence.
Et j’ai l’impression de ne pas être totalement benêt.
Par contre, condamner des BD,
des romans, des films, pour des raisons absurdes (et contraires !), cela n’aide
en rien la cause des gens de bien. Je dis « gens de bien » parce que
je me refuse à croire qu’il existe une cause des femmes dont les hommes
seraient exclus. Nous ne sommes pas deux espèces différentes.
Trouver du sexisme dans des œuvres
innocentes, juger des propos anciens à l’aune de codes actuels, se complaire
dans le rôle de la victime et du juge alors que l’on ne connaît rien du domaine
que l’on aborde, c’est plus que navrant. C’est dangereux.
Les extrémistes de tous bords ont toujours voulu réécrire les livres. Ou même les brûler,
ce qui était déjà plus à leur portée. Le propre de l’agité, c’est de tenter d’éradiquer
tout ce qu’il n’aime pas. Le problème, ami.es agité.es (et là, je fais l’effort
de m’adresser à vous dans votre protolangage de peigne-cul), c’est qu’on ne peut pas
détruire une idée en brûlant du papier. Ou en tentant de réécrire l’histoire.
Des tas de gens ont essayé. Des gens bien mieux organisés que vous. Ou bien
plus sauvages. Et ils ont tous échoué.
Vous échouerez aussi. Pas
maintenant, je crois au contraire que l’ère qui s’ouvre est la vôtre. Mais rien
n’est éternel. Il arrivera un jour où le besoin de bon sens, de sécurité, de
liberté, sera plus fort que vos dogmes, vos saletés et votre réalité tordue. Et
ce jour-là, certains jugeront vos agissements avec la froide détermination de l’opprimé
qui veut sa vengeance. Et comme vous, ils iront trop loin.
J’ignore si ce yoyo sociétal est inéluctable.
Il n’est pas difficile en tout
cas de comprendre comment il se nourrit.
Bon, perso, je m’en retourne à
mes activités subversives de conteur. Il faut dire que j’ai été biberonné avec
les pires œuvres réactionnaires possibles, de Tintin au Seigneur des Anneaux,
en passant par le Club des Cinq ou Astérix. Et si ça fait de moi un nazi… ben…
Sieg Heil !
[1] En fait, c'était du Wagner. Plus exactement l'ouverture de Tannhäuser. Merci à Vance pour la précision.
[1] En fait, c'était du Wagner. Plus exactement l'ouverture de Tannhäuser. Merci à Vance pour la précision.