Grand Dossier sur les Encyclopédies concacrées aux Comics


Nous vous avons préparé aujourd'hui un bon gros dossier sur des publications un peu particulières : les ouvrages techniques et autres encyclopédies consacrés aux comics.
Il y a du très bon, du carrément naze, de la VF, de la VO, des ouvrages généralistes ou centrés sur un seul personnage, du Marvel, du DC Comics, du Vertigo, bref, de quoi assouvir la soif d'information du lecteur passionné.
En tout, ce sont 11 collections ou ouvrages que nous passons au crible. Avec bien sûr quelques illustrations histoire de vous donner une idée du binz.

Pour accéder à tout cela, rendez-vous dans notre rubrique Dossiers ou bien cliquez sur l'image ci-dessous.
Enjoy !


The Art of the Brick : Expo Lego de Super-Héros



Petit coup d'œil sur une expo Lego centrée sur les personnages de DC Comics.

Prolongée jusqu'au 26 août 2018, The Art of The Brick, une exposition de sculptures en Lego réalisées par Nathan Sawaya (un avocat new-yorkais qui a lâché sa carrière pour se consacrer à sa passion : les petites briques colorées), vous propose d'admirer des covers mythiques de comics, la Batmobile (500 000 pièces !!), Superman en plein vol ou même Aquaman dans... son bain !
Cela se déroule dans l'espace Chapiteaux de La Villette, à Paris.

Bien entendu, nous sommes allés y faire un tour, et Thomas nous a ramené quelques photos.
Voilà largement de quoi vous faire une idée. D'un point de vue pratique, l'entrée coûte 15 euros et la visite vous prendra tout de même une petite heure.
Miaw !















Infinite Crisis : Le Projet OMAC


Gros plan sur les débuts de l'un des plus importants évènements éditoriaux de DC Comics : Infinite Crisis.

En 1985, l'évènement Crisis on Infinite Earths bouleverse l'univers DC et met fin aux Terres parallèles. Il faut attendre 2006, et la remise à plat provoquée par Infinite Crisis, pour voir le retour du multivers, bouleversant par la même occasion les séries régulières de l'éditeur américain.
Urban Comics a réédité cette importante saga dans cinq tomes librairie de la collection DC Classiques. Nous vous présentons ici le premier d'entre eux, intitulé Le Projet OMAC.

Au sommaire : Countdown to Infinite Crisis, The OMAC Project #1 à #6, Superman #219, Action Comics #829, Adventures of Superman #642 et Wonder Woman #219, soit plus de 300 pages en tout.
Beaucoup de monde aux manettes, citons Greg Rucka, Geoff Johns ou Judd Winick au scénario, Rags Morales, Ed Benes, Ivan Reis ou Phil Jimenez au dessin.

Tout commence en fait par l'enquête de Blue Beetle, héros secondaire et complexé, qui découvre par hasard une machination visant à éradiquer tous les méta-humains. Maxwell Lord, à la tête de l'organisation Checkmate, a en effet pris le contrôle de l'Œil, un satellite dont Batman se servait pour surveiller les agissements - et les éventuels dérapages - de ses collègues justiciers. Pire, Lord va même réussir à contrôler Superman, l'obligeant à s'en prendre à ses amis...
L'histoire impacte tous les personnages de l'univers DC. Tout comme pour Identity Crisis, qui peut être considéré comme une sorte de prélude, certains évènements de la saga ayant ici leur importance, le récit s'avère sombre et désenchanté. Surtout, de nombreuses questions sont soulevées concernant le rôle des héros, les limites morales qu'ils s'imposent et la menace qu'ils peuvent représenter.


Cependant, contrairement à Identity Crisis qui fonctionnait sur le mode du whodunit [1], Infinite Crisis s'avère plus ambitieux, plus dramatique aussi. Les auteurs accentuent encore le sentiment de suspicion qui règne entre les Masques, ils les poussent à remettre en cause leurs principes les plus chers (dont celui de ne pas tuer) et n'hésitent pas à joncher leur récit de quelques cadavres.
La manière d'utiliser les seconds couteaux, comme Blue Beetle ou Booster Gold, est très habile et permet de modifier un peu le regard que le lecteur peut avoir sur les poids lourds que sont Batman, Superman, Wonder Woman ou Green Lantern. La hiérarchie implicite au sein de la communauté super-héroïque est notamment fort bien décrite, tout comme les conséquences qui en découlent (que ce soit des erreurs de jugement ou une certaine pression psychologique pour les encapés les moins puissants).

Malgré la multitude de personnages et les ramifications nombreuses, l'ensemble se suit sans trop de problème (la lecture préalable d'Identity Crisis peut constituer un plus, d'autant que c'est une excellente saga).
Comme toujours, Urban Comics a soigné l'aspect rédactionnel. En plus de la traditionnelle frise chronologique permettant de situer les évènements importants, l'on dispose d'un texte d'introduction, de topos sur les personnages principaux et même de fiches de personnage très complètes sur les protagonistes secondaires. Une galerie de covers conclut l'ouvrage.

Une saga importante, bien écrite, qui soulève une problématique complexe interrogeant également sur l'évolution globale d'un genre.
À ne pas rater.


[1] Le whodunit (littéralement "qui l'a commis ?", en parlant d'un crime) est un sous-genre de la littérature policière dans lequel l'intrigue est basée sur la résolution d'une énigme.




+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Une étape majeure pour l'univers DC.
  • Un récit tendu et bien mené.
  • Habile utilisation des personnages secondaires.
  • Une approche psychologique réaliste.
  • Le soin apporté au rédactionnel de la VF.

  • L'aspect des OMAC, pas très folichon, mais bon... question de goût.

X-Men : Schism


La saga X-Men : Schism a constitué une étape importante pour les mutants. Tout de suite, le bilan complet sur les évènements.

Les mutants, sous la direction de Scott Summers, alias Cyclope, sont rassemblés sur Utopia, un ilot-nation devenu leur refuge sur la côté ouest des États-Unis.
Malheureusement, une nouvelle menace se profile à l'horizon. Car l'humanité continue de haïr et craindre ces êtres aux pouvoirs exceptionnels. Pire encore, alors qu'il leur faudrait être unis pour sortir vainqueurs de cette épreuve, Scott et Wolverine, en complet désaccord sur les méthodes à adopter, vont provoquer une scission au sein du groupe.
Le temps est venu pour chacun de choisir son camp...

En 2014, Panini a sorti cette saga en Marvel Deluxe, nouveau format : exit la jaquette et la cover noire et place à une hardcover illustrée. Le tout est bien plus joli et pratique. Dommage qu'ils aient mis si longtemps à s'en rendre compte (ce n'était pas faute de le répéter régulièrement).
Par contre, niveau contenu, c'est un peu léger pour le prix : 10 épisodes et les covers. La traduction est, elle, satisfaisante, il doit rester deux ou trois coquilles sur l'ensemble, ce qui n'est pas parfait mais très loin d'être honteux selon les normes actuelles. L'éditeur a même réussi à pondre un texte explicatif introduisant le récit.
C'est sûr que lorsque l'on n'est plus en position de monopole sur le mainstream, ça incite à se sortir les doigts du cul.

Voyons l'histoire en elle-même. Elle est en fait composée de trois parties distinctes. X-Men : Prelude to Schism (4 épisodes), X-Men : Schism (5 épisodes) et X-Men : Regenesis (une sorte de conclusion en un épisode).
Au scénario, l'on retrouve dans l'ordre Paul Jenkins, Jason Aaron et Kieron Gillen. Au dessin, il y a un paquet de monde, dont, entre autres, Roberto de la Torre, Carlos Pacheco, Billy Tan ou encore Adam Kubert.
Graphiquement, c'est plutôt agréable à regarder dans l'ensemble. Quelques pleines pages vraiment belles mais aussi quelques planches parfois un peu fades mais sans défauts majeurs.


Le scénario est, lui, assez réussi. La première partie, aux accents shakespeariens, installe une tension dramatique certaine et permet de revenir sur le passé de certains personnages (Scott, Logan ou Magneto). Scott y est décrit comme un chef en proie au doute, écrasé par ses responsabilités et hanté par la violence des décisions qu'il se devra peut-être de prendre.
Entre les réminiscences de Magneto sur les camps de concentration, le sacrifice d'une mère et certains aphorismes pas dégueulasses, Jenkins (que l'on savait habile depuis ses Frontline ou sa version des Inhumains) démontre encore une fois - contrairement à ce que pensent certains - que les comics de super-héros ne sont pas voués à être caricaturaux ou niais.

La seconde partie conte l'affrontement en lui-même, avec notamment une scène très bien fichue dans laquelle Cyclope se rend à une conférence mondiale sur le désarmement, visant à supprimer les Sentinelles (des robots géants conçus pour exterminer les mutants). Évidemment, cela tourne mal et aboutit à un déchaînement anti-mutant mondial.
L'on a droit également à une version très spéciale du Club des Damnés. Pas forcément très vraisemblable mais au moins originale.
Plus d'action donc, avec deux logiques s'affrontant. Tout comme à l'époque de Civil War, chacun pourra instinctivement, ou après mûre réflexion, soutenir un camp. L'on ne peut toutefois s'empêcher de penser que la querelle ne repose pas sur grand-chose.
Enfin, la dernière partie entérine la séparation et détaille le choix de la plupart des mutants. Mention spéciale pour une Emma Frost toujours aussi classe et cinglante.

Cette histoire est plutôt de bonne qualité si l'on accepte de mettre de côté un aspect répétitif (on en reste encore aux Sentinelles, au Club des Damnés, à la relation tendue entre Scott et Logan...) et parfois presque illogique (l'attitude de Wolvie, alors qu'ils sont en danger, est assez étrange, surtout pour un personnage que l'on a connu plus radical).
Au niveau éditorial, si Panini montre des signes de bonne volonté, le travail rédactionnel reste encore trop superficiel : un topo de deux ou trois pages sur les personnages principaux n'aurait pas été de trop, surtout que l'ouvrage reste léger en pagination pour un Deluxe.

Globalement conseillé tout de même.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Un Jenkins subtil et émouvant.
  • Une bonne grosse baston à l'ancienne.
  • Une hardcover qui ressemble enfin à quelque chose.

  • Un dilemme moral un peu artificiel.
  • Des menaces déjà vues cent fois.
  • Prix élevé pour la VF, surtout sans réel bonus ni efforts concernant l'accessibilité.

Catwoman version New 52


L'on s'intéresse aujourd'hui au premier album Urban Comics consacré à la jolie féline, Catwoman.

Selina Kyle fonctionne à l'adrénaline. Elle aime le risque, le frisson qui la parcourt lorsque, dans Gotham, elle s'empare de ce qu'elle désire. Car Selina est une voleuse, particulièrement douée et qui s'en prend aussi bien à la haute société qu'à la pègre.
Malheureusement pour la jeune femme, elle va cette fois tomber sur un os, un os appelé Louis Ferryman. Ce dernier ayant été la victime d'une petite visite de la demoiselle, il va lui mener la vie dure et commencer par détruire son appartement. Avant de faire bien pire...
Et pour tout arranger, Selina va également avoir les flics sur le dos. Des flics du genre pourris, qui se goinfrent d'argent sale et préfèrent tirer avant de poser des questions.
Les chats ont beau avoir neuf vies, il arrive un moment où le facteur chance ne suffit plus.

Voici l'une des séries qui a bénéficié du reboot général du DC Universe et qui est sortie en 2012 en France. La qualité de ces premiers épisodes, scénarisés par Judd Winick et dessinés par Guillem March, justifiait d'ailleurs largement un bel album librairie.
Les auteurs remplissent en effet un cahier des charges pourtant exigeant : non seulement le titre est accessible, et ce même si l'on ne connaissait pas le personnage, mais il s'avère agréable à lire et graphiquement très réussi.


L'accueil a cependant été parfois réservé aux États-Unis, certains critiquant le côté supposément trop sexy de Catwoman ainsi qu'une scène quelque peu osée (osée pour un enfant de 12 ans disons) avec Batman.
Pourtant, cette scène est à la fois sensée et parfaitement maîtrisée. Si March parvient à exprimer parfaitement le côté bestial de Selina (et de Bruce d'ailleurs), il ne tombe jamais dans la vulgarité. Et surtout, comment s'étonner que des "marginaux" (c'est le moins que l'on puisse dire !), qui se déguisent et prennent leur pied en sautant d'immeuble en immeuble, puissent avoir des pulsions quasi animales et une sexualité... intense ?

Attention, Selina est loin de n'être employée que comme une fille sexy aux formes avantageuses. Winick parvient, dès les premières pages, à la rendre attachante. Surtout, par la suite, il ne va nullement l'épargner, que ce soit au niveau physique (elle se prend tout de même de sacrées raclées !) ou psychologique (ses erreurs ayant de lourdes conséquences).
Tour à tour désemparée, pleine de ressources, fragile ou incroyablement séduisante, elle apparaît comme une héroïne moderne et très humaine.

Pas de réflexion alambiquée ou de thématique cachée ici, juste une très bonne histoire, intéressante, parfaitement dosée entre action et psychologie, et visuellement léchée. Ce qui est tout de même un résultat on ne peut plus méritant, n'en déplaise aux râleurs qui ne supportent pas que l'on ose des choses - pourtant bien innocentes et totalement justifiées - avec leur personnage favori.

Un excellent comic, travaillé et divertissant.
Idéal pour un premier (bon) contact avec Catwoman.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Accessible.
  • Fun.
  • Visuellement abouti.
  • Personnage principal attachant.
  • Quelques scènes gentiment sexy.

  • RAS.

Lancement de Jessica Jones volume 2



Alors que la nouvelle on-going Jessica Jones vient tout juste de débuter, nous nous penchons sur les deux premiers épisodes disponibles.

Marvel vient de donner le coup d'envoi d'une nouvelle gamme de comics intitulée Digital Originals.
Ces BD numériques sont censées faire écho aux versions Marvel Television de certains personnages, afin de profiter bien entendu de la publicité faite autour des séries TV.
C'est Jessica Jones qui ouvre le bal, avec d'emblée 40 pages disponibles depuis mercredi (soit un tiers du premier arc) au prix de 4,99 dollars. Les deux autres parties suivront fin août et fin septembre. Et il y aura probablement par la suite une publication papier, comme cela avait été le cas pour Spider-Woman en version Motion Comics.
L'on se souvient des débuts de Jessica dans l'excellente série Alias de Brian Michael Bendis, cette fois, c'est Kelly Thompson qui est au scénario, les dessins sont réalisés par Mattia de Iulis.

Tout commence alors que la détective (toujours en couple avec Luke Cage, ils ont d'ailleurs un enfant) fait un tour à son agence, Alias Investigations. Elle a alors la surprise de découvrir un corps au milieu de son bureau. À peine a-t-elle le temps de prendre le pouls de l'individu que la police débarque et l'arrête.
Jessica apprend alors que le corps est celui de Dia Sloane, une jeune femme qui l'avait engagée quelques années auparavant pour enquêter sur les infidélités de son conjoint. L'interrogatoire ne se passe pas très bien mais, fort heureusement, un certain Matt Murdock est là pour la tirer des griffes des policiers. Jessica va maintenant tenter d'en apprendre un peu plus sur ce cold case.
Et ce qu'elle va découvrir est pour le moins surprenant.


C'est un vrai plaisir de retrouver Jessica Jones, un personnage enthousiasmant qui renoue ici avec l'humour et les enquêtes parfois sombres et amères qui ont fait le charme d'Alias. Évidemment, Jessica a pas mal évolué depuis. Terminé les parties de jambes en l'air improvisées et les soirées arrosées, elle est maintenant casée et maman. Loin d'affadir le personnage, cela permet d'en montrer une autre facette, Jessica étant maintenant obligé de composer avec son rôle d'épouse et de mère. La scénariste écarte d'ailleurs d'une manière assez habile le puissant Cage afin de ne pas rendre Jones trop "intouchable".

L'intrigue qui débute ici s'avère plutôt bien fichue, avec une histoire de tueur de Masques, une piste magique (d'où la présence, assez drôle, du Docteur Strange en... pyjama, c'est à voir !) et quelques guests, dont le Captain Marvel actuel, autrement dit Carol Danvers, ou encore une courte apparition de Nico Minoru, des Runaways.

La série est donc bien connectée au marvelverse mais pas d'inquiétude, elle est tout à fait accessible et peut être abordée sans connaissances préalables.
Graphiquement, ça tient bien la route, avec notamment de jolis effets de lumière et quelques scènes aux plans particulièrement efficaces. Petit bémol en ce qui concerne les visages de certains personnages secondaires, un peu lisses et artificiels. Jessica, elle, est par contre fort jolie et expressive.
Au niveau du public visé, la série est classée "12+" et un gros "parental advisory - not for kids !" figure sur la cover. Bon, franchement, jusqu'à présent, il n'y a rien qui puisse vraiment justifier cela. Peut-être quelques gros mots, et encore. M'enfin, le ton se veut clairement adulte tout de même.

Un retour réussi pour Jessica.
À tester sur la longueur.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Jessica Jones !
  • Une mise en page efficace.
  • Jolie colorisation.
  • Un début d'intrigue intéressant.
  • L'humour.

  • Un côté un peu trop numérique au niveau des dessins, mais difficile de reprocher ça pour une collection "digitale".

La Pro : du trottoir au super-héroïsme



Petit coup d'oeil sur une parodie décapante signée par un auteur habitué à ne pas faire dans la dentelle : La Pro. Moins de 18 ans s'abstenir.

C'est une prostituée. Elle a un gosse à nourrir, des clients à satisfaire et une vie passablement glauque. Un jour, un être cosmique souhaitant mener une petite expérience sur l'héroïsme va la doter de super-pouvoirs. Elle est maintenant plus rapide, plus forte, elle peut voler... mais est-ce suffisant pour changer vraiment ?
En rejoignant la Ligue d'Honneur, elle va être confrontée à un autre monde, policé et respectable en apparence mais loin d'être parfait. Peut-on changer de vie en endossant un autre costume ? En a-t-elle seulement envie ?

C'est Garth Ennis que l'on retrouve au scénario de cet album datant de 2003. Si le scénariste est parfois considéré comme un spécialiste du trash, l'on voit tout de même ici, derrière les scènes osées et les gros mots, poindre une vision anticonformiste et acide qu'il confirmera dans d'autres œuvres comme The Boys (très proche au niveau de la thématique) ou Preacher.
Les dessins, de fort bonne facture, sont l'œuvre d'Amanda Conner.

L'entrée en matière est directe, avec une scène explicite décrivant les "conditions de travail" de l'héroïne principale. Très vite, l'on bascule dans la franche parodie avec une Ligue d'Honneur s'inspirant des personnages de DC Comics. Le Saint campe un Superman propret et quelque peu niais, Le King et le Sous-Fifre forment un duo très tendancieux librement inspiré de Batman & Robin, Le Citron Vert remplace Green Lantern dans un style très hip-hop, bref, tout le monde en prend pour son grade, Wonder Woman et Flash ayant également leurs pendants.


La Pro, sous la plume de Garth Ennis.


— La prochaine fois que je dis merde ou putain ou trou du cul ou bite, jetez un coup d'oeil par la fenêtre. Je vous parie cinquante dollars que le monde ne s'arrête pas de tourner.



Il faut l'avouer, le cocktail, à base de fellations, d'hémoglobine et de langage de charretier, est corsé et est à déconseiller aux âmes sensibles. Pourtant, malgré une forme très..."rock n'roll", le fond est loin, comme souvent avec Ennis, d'être stupide. L'on sent au contraire une critique très acerbe du politiquement correct à travers la mise à mal des mythes super-héroïques classiques.
Mieux encore, l'auteur s'autorise même un début de réflexion sur le pouvoir et son apparente incapacité à changer les choses. Ainsi, alors que l'un des personnages se vante des périls qu'il a pu vaincre dans sa carrière, la Pro a cette réflexion douloureuse : "dommage que vous ne puissiez pas faire en sorte que je ne suce plus de bites pour nourrir mon gosse."
La sentence est cruelle mais loin d'être gratuite, quant au côté brut du style, il est presque ici nécessaire, tant pour crédibiliser ce personnage malmené par la vie que pour bousculer des oreilles (ou des yeux dans notre cas) habitués à recouvrir les vilaines blessures de notre société par de beaux mots bien plus acceptables.

Bon, bien entendu nous ne sommes pas ici dans un traité de philosophie, mais tout de même, pour qui sait voir au-delà des apparences, Ennis devient alors plus qu'un scénariste un peu trash.
Ceci dit, le but de la manœuvre reste essentiellement de divertir. Vous aurez ainsi l'occasion de voir ce que donne une éjaculation de surhomme par exemple. Eh, c'est logique non ? Super vitesse, super force, super éjac ! Et gros dégâts.

Une version française de La Pro est disponible aux Éditions USA. On peut encore trouver assez facilement l'ouvrage d'occasion et à un prix abordable. La traduction aurait mérité un plus grand soin, l'album comportant tout de même son lot de fautes de frappe ou même de sens ("peut" au lieu de "peu", "sensée" à la place de "censée"...).

Un comic drôle, osé et loin d'être bête.
Comme le dirait Ennis sur la planche finale, c'est déjà pas mal.




+ Les points positifs - Les points négatifs
  • L'humour.
  • Le côté trash et rentre-dedans.
  • Une véritable réflexion qui soutient le propos.
  • Quelques moments émouvants.
  • L'aspect parodique et les références.

  • La VF de piètre qualité.

Enquêtes, Magie & Gargouilles



La ville de Partington peut s'enorgueillir d'abriter le plus grand détective du monde. Faisons connaissance avec le personnage en parcourant les pages de Ruse.

Simon Archard est un détective aux capacités intellectuelles extraordinaires. Il résout régulièrement les affaires les plus complexes et finit même par s'ennuyer ferme, sans véritable défi à relever. L'arrivée de Miranda Cross va pourtant bouleverser le quotidien de Simon, la baronne de Kharibast va en effet bientôt mettre dans sa poche les notables de la ville et discréditer l'habile investigateur.
Emma Bishop, partenaire - ou assistante selon les points de vue - d'Archard va bien entendu lui apporter son aide. La jeune femme est non seulement débrouillarde mais possède aussi quelques dons et un bien curieux secret. Décidément, cette bonne ville de Partington est pleine de mystères, jusque dans son ciel où volent d'improbables gargouilles.

À première vue, voilà une histoire des plus classiques où un personnage à la Sherlock Holmes cherche à résoudre divers crimes. Pourtant le scénariste, Mark Waid (Fantastic Four, Captain America, Spider-Man : House of M), ajoute à sa recette quelques ingrédients inattendus. La magie tout d'abord. La blonde Emma a en effet le pouvoir d'arrêter le temps bien que cela ne soit apparemment pas sans danger. Les gargouilles ensuite, animaux communs dans la ville imaginaire, type Londres du XIXe siècle, où se déroulent les évènements. Ces éléments étranges tiennent un rôle important dans l'espèce de méta-intrigue sur laquelle viennent se superposer les affaires policières plus traditionnelles. Et si ces dernières sont résolues dans chaque recueil, de nombreuses questions restent posées à propos du passé des deux personnages principaux.


Les dessins sont l'œuvre de Butch Guice (Ultimate Origins, Iron Man) et sont réellement splendides. La ville est déjà fort belle mais certains décors intérieurs sont à tomber par terre, le simple parquet d'une salle de bal devenant soudainement un régal pour les yeux. Les nombreux détails dont fourmillent les planches incitent d'ailleurs à s'attarder longuement sur elles. Signalons, pour être complet, l'encrage de Mike Perkins mais surtout les couleurs de Laura Depuy, ces dernières venant magnifier les traits de Guice.

Trois volumes sont disponibles en version française chez Semic : L'affaire Miranda Cross, Némésis et Apparences. On peut encore les trouver en neuf, mais ils se font de plus en plus rares.
Notons que la traduction est plutôt soignée. Les livres arborent une élégante couverture en dur, un papier glacé et se présentent dans un format à l'italienne tout à fait approprié. La série a malheureusement été arrêtée aux États-Unis après la faillite de CrossGen en 2004. Onze épisodes demeurent totalement inédits en France, quant aux droits des séries CrossGen, ils appartiennent maintenant pour l'essentiel à Disney Publishing.

Une série très bien réalisée, à l'esthétisme envoûtant, qui n'a guère porté chance à ses éditeurs, américains ou français, et qui aurait mérité une plus longue vie.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • L'aspect fantastique.
  • Les magnifiques dessins de Guice.
  • Le principe de la méta-intrigue se superposant aux enquêtes.
  • Le charme de Partington.
  • Le format à l'italienne.

  • Pas de conclusion.