The Gifted, l'autre série mutante
Publié le
3.1.19
Par
Vance
Continuant sur la lancée du troublant et ambitieux Legion,
la 20th Century Fox développe son univers super-héroïque autour des X-Men dont elle détient toujours les droits acquis auprès de Marvel Comics.
En puisant dans l’énorme réservoir des séries mutantes de la Maison des Idées, le showrunner Matt Nix et ses producteurs (dont l’incontournable Bryan Singer qui signe en outre la réalisation d’un premier épisode efficace) avaient de quoi peupler les franges de cet univers riche de possibilités et toujours porteur de sens, délivrant bon an mal an des messages de tolérance et d’équité. Si la métaphore de la condition mutante est depuis bien longtemps entrée dans les mœurs (rappelez-vous dans l’excellent X-Men 2 la fameuse question que pose sa maman à Bobby Drake : « N’as-tu pas essayé de… ne plus être mutant ? »), le propos demeure toujours aussi pertinent.
En puisant dans l’énorme réservoir des séries mutantes de la Maison des Idées, le showrunner Matt Nix et ses producteurs (dont l’incontournable Bryan Singer qui signe en outre la réalisation d’un premier épisode efficace) avaient de quoi peupler les franges de cet univers riche de possibilités et toujours porteur de sens, délivrant bon an mal an des messages de tolérance et d’équité. Si la métaphore de la condition mutante est depuis bien longtemps entrée dans les mœurs (rappelez-vous dans l’excellent X-Men 2 la fameuse question que pose sa maman à Bobby Drake : « N’as-tu pas essayé de… ne plus être mutant ? »), le propos demeure toujours aussi pertinent.
Cependant, contrairement à Legion cité plus haut, série
adulte, retorse et complexe - et particulièrement ardue à suivre - The Gifted
s’adresse ouvertement au grand public, et plus particulièrement aux jeunes. Non
dénué de violence, le feuilleton s’appuie sur un grand nombre de personnages
issus des comics et sur certains de leurs invariants (comme le fait d'inclure la plus
grande variété possible au sein des groupes, tant du point de vue des pouvoirs
que du sexe ou des origines ethniques), en créant d’autres ex nihilo ou par
synthèse artificielle d’individus préexistants.
Le lecteur expérimenté retrouvera ainsi forcément l’ambiance des New Mutants, des Morlocks ou du X-Factor de Peter David (cf. la Parenthèse de Virgul #15), il associera aisément le Programme Sentinelle à ceux de Bolivar Trask et Stephen Lang (pas l’acteur, mais le personnage) provenant des histoires imaginées par le regretté Stan Lee et développées par Chris Claremont, mais également au film Days of Future Past ; il s‘amusera également à tenter d’identifier les mutants en s’émouvant de la présence de John Proudstar, un X-Man tombé dès le premier numéro des Nouveaux X-Men – ici plutôt nanti des capacités de son frère James ; il tiquera évidemment sur les petits hommages qui parsèment cette saison 1, depuis l’apparition de Stan Lee en personne, façon Hitchcock, dans l’épisode pilote (qui engendrera fatalement la petite larme chez les aficionados) jusqu’aux noms de Kirby et Claremont, lisibles çà et là sur des bâtiments ou des camions de livraison.
Le lecteur expérimenté retrouvera ainsi forcément l’ambiance des New Mutants, des Morlocks ou du X-Factor de Peter David (cf. la Parenthèse de Virgul #15), il associera aisément le Programme Sentinelle à ceux de Bolivar Trask et Stephen Lang (pas l’acteur, mais le personnage) provenant des histoires imaginées par le regretté Stan Lee et développées par Chris Claremont, mais également au film Days of Future Past ; il s‘amusera également à tenter d’identifier les mutants en s’émouvant de la présence de John Proudstar, un X-Man tombé dès le premier numéro des Nouveaux X-Men – ici plutôt nanti des capacités de son frère James ; il tiquera évidemment sur les petits hommages qui parsèment cette saison 1, depuis l’apparition de Stan Lee en personne, façon Hitchcock, dans l’épisode pilote (qui engendrera fatalement la petite larme chez les aficionados) jusqu’aux noms de Kirby et Claremont, lisibles çà et là sur des bâtiments ou des camions de livraison.
The Gifted n’est donc pas un projet reniant le passé, ou
chargé de faire table rase, mais bien une entreprise visant à enrichir le
contexte actuel tout en récupérant la plupart des situations et personnages
déjà créés.
L’idée (clairement exposée dans les épisodes où l'équipe des Mutants underground explique qu’ils doivent continuer le travail entrepris par les X-Men qui ont disparu) est de combler l’attente des spectateurs avant la mise en chantier d’un nouveau film de la franchise X. Ceux qui y sont familiarisés connaissent d’ores et déjà les enjeux : le monde est de plus en plus hostile aux mutants qui prolifèrent sans que des lois ne viennent clairement contrôler leurs agissements, comme le Registration Act déjà mentionné dans le premier film X-Men, dans la bouche du sénateur Kelly.
Des manifestations pro-mutantes ont engendré des heurts et des victimes, ce qui a exacerbé les tensions existantes. Les progressistes estiment que les mutants, tout aussi humains qu’eux, ont le droit de vivre en paix malgré la menace latente que représentent leurs pouvoirs, les autres adoptent les opinions proférées par des groupuscules du genre Purity qui ne prônent rien d’autre que la mise à l’écart (voire l’extermination) des mutants, dans le but de préserver l'intégrité de la race humaine.
Entre les deux, des factions se font une place au soleil, plus ou moins appuyées par le gouvernement qui essaie de mettre à l’ombre tout individu dangereux, sans se douter que des expériences terrifiantes sont menées sur des petits groupes de mutants capturés, dans des buts inavouables (qui seront l’un des sujets de la saison 1).
L’idée (clairement exposée dans les épisodes où l'équipe des Mutants underground explique qu’ils doivent continuer le travail entrepris par les X-Men qui ont disparu) est de combler l’attente des spectateurs avant la mise en chantier d’un nouveau film de la franchise X. Ceux qui y sont familiarisés connaissent d’ores et déjà les enjeux : le monde est de plus en plus hostile aux mutants qui prolifèrent sans que des lois ne viennent clairement contrôler leurs agissements, comme le Registration Act déjà mentionné dans le premier film X-Men, dans la bouche du sénateur Kelly.
Des manifestations pro-mutantes ont engendré des heurts et des victimes, ce qui a exacerbé les tensions existantes. Les progressistes estiment que les mutants, tout aussi humains qu’eux, ont le droit de vivre en paix malgré la menace latente que représentent leurs pouvoirs, les autres adoptent les opinions proférées par des groupuscules du genre Purity qui ne prônent rien d’autre que la mise à l’écart (voire l’extermination) des mutants, dans le but de préserver l'intégrité de la race humaine.
Entre les deux, des factions se font une place au soleil, plus ou moins appuyées par le gouvernement qui essaie de mettre à l’ombre tout individu dangereux, sans se douter que des expériences terrifiantes sont menées sur des petits groupes de mutants capturés, dans des buts inavouables (qui seront l’un des sujets de la saison 1).
Le sujet est vaste. La méfiance qu’engendrent les freaks,
ces erreurs de la nature que certains vont pourchasser et opprimer, que
d’autres vont tenter de comprendre lorsque la plupart préfèrent ne pas prendre
parti, est à l’origine de toute la structure de la série. Les premières minutes
du pilote nous montrent une jeune fille poursuivie par les forces de l’ordre et
qui finit par user de son pouvoir de téléportation (il s’agit de Blink, mais
elle est très loin encore d’avoir la possibilité de se transporter sur d’autres
planètes) pour se mettre à l’abri, jusqu’à ce qu’un groupe de jeunes gens (Polaris
– oui, oui, la fameuse fille de… [spoiler-qu’il-est-trop-facile-de-deviner] - Thunderbird
et Eclipse – celui-ci étant créé de toutes pièces avec des éléments empruntés à
Solar des Nouveaux Mutants) ne vienne la retrouver pour la convaincre de se
joindre à eux, au sein d'un réseau souterrain de mutants. Mais la situation dérape
et Polaris est capturée, puis menée devant le procureur Strucker, un homme
rigide qui n’a de cesse de trouver le QG des rebelles. Strucker qui devra, par
la force des choses, embrasser la cause de ceux qu’il traquait car... ses deux
enfants s’avèrent être des mutants.
Outre Polaris, Blink et Thunderbird, on verra passer Sage, Fenris
et les Stepford Cuckoos au milieu de tant d’autres, et pas forcément dans les
mêmes camps que les originaux de papier. D'autant que l’histoire ne se contente pas d’un banal
chassé-croisé mais ajoute progressivement des protagonistes dont les objectifs
s’accordent parfois avec ceux du gouvernement ou des rebelles mutants, tout en
ayant des visées divergentes. Du coup, bien que convenablement rythmés, les
épisodes sont régulièrement le fruit de questionnements éthiques, de débats
moraux et de choix cruciaux à adopter : faut-il en sacrifier un lorsque la
survie du plus grand nombre est en jeu ? Doit-on répondre à la violence
par la violence ? Jusqu’où peut-on aller pour extorquer des informations
vitales ?
En outre, la série se permet d’aller un peu plus loin que les X-films en n’hésitant pas à adopter différents points de vue : si les mutants sont clairement les héros de The Gifted, l’agent Turner à la tête du Programme Sentinelle est montré sous un jour plus ambivalent que le simple adversaire de circonstance. Ses raisons d’en vouloir au monde mutant sont rien moins que légitimes, et les rebelles le confortent en outre plusieurs fois, quoique sans le vouloir, dans sa détermination teintée de vengeance.
En outre, la série se permet d’aller un peu plus loin que les X-films en n’hésitant pas à adopter différents points de vue : si les mutants sont clairement les héros de The Gifted, l’agent Turner à la tête du Programme Sentinelle est montré sous un jour plus ambivalent que le simple adversaire de circonstance. Ses raisons d’en vouloir au monde mutant sont rien moins que légitimes, et les rebelles le confortent en outre plusieurs fois, quoique sans le vouloir, dans sa détermination teintée de vengeance.
Ainsi, bien que traité sur un mode téléfilm avec
des effets spéciaux un peu légers et des décors déserts, la densité du script
et l’importance des enjeux emportent progressivement l’adhésion. Certains personnages s'avèrent assez fascinants et disposent tous de petites failles susceptibles de faire
basculer leurs penchants, voire leurs alliances. Toutefois, placés au centre du
nœud gordien formé par les intrigues, les enfants Strucker décevront sans doute
les spectateurs aguerris : Lauren a des airs de petite poupée toute
mignonne, Andy se la joue p’tit con victime de brimades, et leurs atermoiements
se voient venir de loin. Heureusement, leurs parents, forts de leur statut
unique (des humains luttant aux côtés de la frange mutante), bénéficient du
jeu convaincant de comédiens expérimentés, même si Amy Acker a nettement moins
d’impact en mère courage et dévouée qu’en disciple ironique de la Machine dans Person
of Interest.
Malgré un jeu quelque peu stéréotypé, Emma Dumont interpelle par son regard magnétique (en même temps, elle joue Lorna Dane…) et Blair Redford campe un remarquable Proudstar tout en force tranquille ; quant à Skyler Samuels, elle fait parfaitement la peste qu’on adore détester.
Malgré un jeu quelque peu stéréotypé, Emma Dumont interpelle par son regard magnétique (en même temps, elle joue Lorna Dane…) et Blair Redford campe un remarquable Proudstar tout en force tranquille ; quant à Skyler Samuels, elle fait parfaitement la peste qu’on adore détester.
Malgré de nombreuses situations convenues et un nombre trop
important de personnages à gérer, The Gifted apparaît étonnamment stimulante,
enjouée, et plutôt adroitement conçue : une série familiale au potentiel
certain, d’une réelle maturité dans sa conception, bourrée de références aux
grandes heures des comics mutants et créée pour durer quelque temps.
Diffusée en France depuis décembre 2017, elle vient d’être éditée en vidéo.
Diffusée en France depuis décembre 2017, elle vient d’être éditée en vidéo.
Article précédemment paru sur l’Ecran-Miroir.
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