Paranoïa
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Humour noir, dystopie et roleplay sont au cœur de Paranoïa, un JdR déjà ancien mais toujours aussi amusant et original.

En matière de jeux de rôles, difficile d'échapper aux deux géants que sont Donjons & Dragons et L'appel de Cthlulhu. Toutefois, parmi la vaste galaxie des jeux moins renommés se trouvent parfois quelques pépites dont Paranoïa fait clairement partie.
Si la première version est sortie en 1984 (pas de net donc à l'époque il fallait fureter dans le célèbre magazine Casus Belli pour découvrir les nouveautés), la dernière édition est toute récente et se devrait d'être traduite en français par l'éditeur Sans Détour. Preuve de la vitalité de ce jeu.
Mais voyons tout de suite son univers et les principes un peu particuliers qui impactent les joueurs.

Les parties se déroulent dans le complexe Alpha, coupé du monde et régi par un Ordinateur expéditif qui peut à tout moment vous demander de bien vouloir vous rendre dans la chambre d'extermination la plus proche pour y subir une exécution sommaire.
Les joueurs incarnent des Clarificateurs, sorte d'agents du système qui se doivent de traquer et éliminer les traitres et autres mutants. Car il existe moult dissidents et autres sociétés secrètes, toujours prêts à venir contrarier l'ordre établi : Illuminati, Communistes, Club Sierra, Romantiques et même Trekkies ou Chevaliers de la Chose Ronde, ce ne sont pas les organisations qui manquent.

Jusqu'à présent, l'on a un univers SF certes un peu oppressant mais assez classique. C'est le système de jeu qui va venir donner à Paranoïa tout son sel.
En effet, chaque clarificateur fait également partie d'une société secrète. Et est également un mutant. Dans l'équipe de personnages joueurs, en plus de tenter de mener à bien la mission principale, chacun va donc devoir dissimuler ses accointances (et son pouvoir mutant) et tenter de mettre à jour celles des autres. En plus de l'Ordinateur tatillon, il faut donc se méfier des membres de l'équipe.
Mieux encore, chaque mot prononcé durant la partie est considéré comme du roleplay [1]. Or, si vous évoquez un point de règle (que vous n'êtes pas censé connaître), l'Ordinateur conclura immédiatement à une trahison ce qui entraînera... une exécution.
En fait, vous êtes supposé mourir si souvent que vous disposez de plusieurs clones prêts à prendre le relais.

Le second degré est constamment présent et certaines idées se révèlent tout simplement brillantes. Ainsi, le niveau d'accréditation par exemple, représenté par le spectre des couleurs (d'infrarouge pour la masse à ultraviolet pour le maître de jeu, les couleurs intermédiaires représentant les niveaux des clarificateurs), fait peser une menace constante sur les joueurs (s'ils évoquent les règles connues uniquement par le niveau ultraviolet par exemple) mais elles peuvent aussi se détourner facilement, en repeignant un objet (chaque objet étant de la couleur de l'accréditation minimum dont on doit disposer pour avoir le droit de l'utiliser).
Les clins d'œil et autres références sont en outre très nombreux. Les auteurs évoquent d'autres jeux, des films, des chansons, des romans ou encore des séries télévisées.

Les règles, très simples (à base de D20, caractéristiques et compétences), sont conçues pour faciliter l'immersion et donner la priorité à cette ambiance humoristique, tendue par les soupçons et les traîtrises fortement encouragées.
Le maître de jeu, s'il a compris le principe, pourra donc les mettre de côté quand la situation l'exige et préférer une résolution basée sur l'inventivité et la propension naturelle à embrouiller tout le monde. Évidemment cette particularité fera que l'on réservera ce jeu à des rôlistes confirmés, qui savent différencier le roleplay de la réalité (car aussi incroyable que cela puisse paraître, certains en arrivent parfois à se vexer réellement de la perfidie des personnages).

Pas d'épiques campagnes et des personnages évoluant longuement donc, mais plutôt des parties fun à l'ambiance lorgnant du côté d'un Brazil.
Les différentes versions du jeu font parfois évoluer certains concepts (entreprises au lieu de services centralisés), l'une des dernières versions propose en outre d'incarner des membres de la sécurité intérieure, voire même des dirigeants du complexe.

Chaudement recommandé.


[1] Petite explication pour ceux qui ne sont pas familiers du concept. Dans une partie de JdR, en plus de l'aspect "technique" (des combats par exemple, résolus souvent par un jet de dés), la manière dont vous incarnez votre personnage (en le faisant s'exprimer) va grandement influer sur l'ambiance de la partie. Mais, pendant la durée de celle-ci (parfois plusieurs heures), vous parlez aussi parfois en tant qu'individu ("je vais pisser", "t'as pas des chips ?", "tain, on a déjà niqué la bouteille de whisky"...). À l'inverse, dans Paranoïa, tout ce que vous dites est censé provenir de votre personnage, ce qui peut avoir des conséquences fâcheuses à cause des accréditations évoquées plus haut.

+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Original.
  • Système de jeu simple et efficace.
  • Priorité au roleplay.
  • L'univers déjanté et stressant.
  • Le second degré.

  • Pas forcément très facile d'accès si l'on manque de recul.