Loveless
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Un comic dans le genre western, voilà qui est suffisamment rare pour que l'on s'intéresse à Loveless, une série réaliste et soignée se déroulant peu de temps après la guerre de sécession.

Le vieux Sud est tombé. Pour Washington, cela signifie la fin de la guerre. Pour les habitants de Blackwater, occupés et dépossédés de leurs biens par les yankees, c'est une autre lutte qui commence. Pour la terre... pour l'honneur.
Sale temps donc pour rentrer au pays, surtout lorsque, comme Wes Cutter, l'on découvre une demi-douzaine de nordistes sous son porche. Surtout quand toute une ville vous croyait mort et que cet état de fait en arrangeait certains. Surtout quand vous êtes amené à devenir le shérif d'un lieu où la violence semble être la forme de langage la plus évoluée.

Loveless, de Brian Azzarello, est une série de 24 épisodes, publiée entre 2005 et 2008 sous le label Vertigo. Le public ciblé étant plutôt adulte, attendez-vous à un langage fleuri, un peu de sexe et quelques scènes choc (une amputation à l'ancienne par exemple). Mais, on le sait bien, les gros mots et le sang ne suffisent pas à rendre une série agréable à lire. La force d'Azzarello réside dans une narration intelligente, parfois complexe, qui, dit-on dans certains milieux, aurait rebuté plus d'un lecteur et influé sur les ventes.

L'on peut ainsi voir, dès les premiers épisodes, deux scènes se déroulant à des époques différentes mais étant présentes dans les mêmes cases (à expliquer comme ça, ça n'a pas l'air évident mais c'est bien plus clair à lire). On a donc un flashback se déroulant non pas au premier plan mais au centre de l'image avec, autour, l'action présente, comme si les évènements d'aujourd'hui s'articulaient autour de causes centrales plus anciennes. Toute l'histoire n'est évidemment pas construite comme ça, mais le procédé est suffisamment original et éclairant sur l'auteur pour être signalé.


Autre élément important (et enrichissant le récit) : le traitement des personnages est particulièrement habile. Nordistes, confédérés, Blancs ou Noirs, tous ont une part d'ombre, un côté sale et malsain, et une ou plusieurs bonnes raisons d'en vouloir à tout le monde. Le climat est donc tendu et la mort rode et est omniprésente sans pour autant prendre le visage d'un camp en particulier.

Le graphisme de Marcelo Frusin (qui dessine les premiers épisodes) génère, lui, moins d'enthousiasme dans un premier temps. Les décors sont un peu dépouillés, les traits parfois minimalistes et, surtout, la colorisation et l'encrage jouent à fond la carte du clair-obscur, avec des contrastes parfois sublimes et à d'autres moments très quelconques voire naïfs. L'avantage d'un tel parti pris consiste toutefois à donner, aux visages et à quelques scènes, une ambiance crépusculaire qui convient parfaitement à l'époque et au propos. Et puis, bon, après tout, l'on s'y fait et on reconnaît même certaines trognes ressemblant étrangement à des acteurs habitués à porter un six coups.

Un tome a été publié en VF en 2008 par Panini, malheureusement, la série n'a pas non plus connu un franc succès en France. Fort dommage étant donné la qualité de l'ensemble.
Un comic qui donne envie de prendre un colt, un canasson et d'aller descendre quelques desperadoes.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Une narration habile et originale.
  • Une ambiance étouffante et tendue.
  • Des personnages bien écrits.
  • Certaines cases franchement jolies.
  • Le travail sur les plans et la mise en scène.

  • Des décors parfois trop minimalistes.