Lockwood & co.
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Gros plan sur une excellente série de romans : Lockwood & co.

Voilà maintenant de nombreuses années que les autorités ont reconnu l'existence du Problème, terme employé pour désigner une véritable épidémie d'apparitions fantomatiques à Londres et dans tout le pays. Les morts reviennent hanter les vivants, et leurs visites ne sont pas sans danger. En effet, le "toucher spectral" peut aller jusqu'à entraîner la mort. Rapidement, il a donc fallu s'organiser et se protéger contre les spectres. Heureusement les lampadaires antifantômes, l'argent, le fer, le sel, le feu grégeois et l'eau vive (ainsi que la lavande et la lumière du jour) offrent une protection efficace. Mais pour se débarrasser définitivement d'un "visiteur", le brave citoyen fait appel aux différentes agences spécialisées dans l'éradication de revenants. Les enfants étant les seuls à pouvoir sentir ou voir les fantômes, les équipes sont donc constituées d'adolescents intervenant sous la supervision d'un adulte, en général un ancien "sensible" ayant perdu son don. Il existe cependant des exceptions, comme la jeune agence Lockwood, constituée du flegmatique George, de la talentueuse Lucy et du sympathique et énergique Lockwood en personne ! Eux travaillent seuls, sans filet et se mettent parfois dans des situations aussi dangereuses qu'embarrassantes...

Voilà pour le pitch général de ces très bons romans (cinq à ce jour) écrits par Jonathan Stroud et publiés en français chez Albin Michel. Il s'agit d'une série jeunesse (conseillée dès 12 ans apparemment) qui a la rare particularité d'être tout à fait lisible par des adultes. En effet, non seulement Stroud construit des récits intéressants mais il parvient à un excellent équilibre entre surnaturel angoissant, humour et relations intimes entre les protagonistes. Ajoutons à cela que la traduction, malgré de rares coquilles, est elle aussi de grande qualité. Temps au passé, descriptions riches, style agréable, on est loin du dépouillement désastreux de certains ouvrages pour enfant ou "young adult".




L'histoire est racontée à la première personne par Lucy Carlyle, une sensible qui était promise à un brillant avenir mais qui a eu le malheur de déplaire à un superviseur arrogant et lâche. La voilà donc à Londres, débarquant dans une agence inconnue et ayant de lourdes difficultés financières. 
Stroud plonge immédiatement le lecteur dans l'action et dépeint peu à peu les particularités de son univers (une Angleterre à l'époque incertaine, en tout cas située avant l'apparition des ordinateurs et après celle de l'automobile). Entre les méthodes pour contenir les spectres (l'utilisation de rapières apporte notamment une touche anachronique et un brin de classe), les différents types de fantômes, les agences et les changements économiques ou sociétaux dus au Problème, le monde décrit s'avère à la fois familier mais baigné d'étrange et de dangers.

Là où Stroud s'avère excellent, c'est dans l'interaction entre les différents protagonistes, tous parfaitement caractérisés. Les échanges, notamment entre Lucy et George, sont savoureux. Quant aux personnages secondaires, là aussi, ils sont parfaitement campés, en quelques lignes (les têtes à claques, notamment Quill Kipps, sont par exemple parfaitement irritantes et antipathiques). 
L'humour des dialogues vient agréablement entrecouper les scènes plus tendues, et l'on s'attache très vite au trio principal. Au final, le mélange s'avère quasiment parfait entre enquêtes, petites frayeurs et relations personnelles. 
Notons qu'un glossaire, nullement indispensable mais qui clarifie tout de même certains points, est présent à la fin de chaque ouvrage. Enfin, signalons qu'il existe une adaptation Netflix. Visiblement, ils ont pour une fois évité de tomber dans un délire wokiste, avec fantômes gay, une Lucy lesbienne, un George asiatique et un Lockwood noir, mais bon, même si la série TV est fidèle, le style de Stroud est si bon que ce serait dommage de passer à côté des romans et des particularités qui ne seront pas transposables à l'écran. 

Du surnaturel au charme certain, bénéficiant du savoir-faire d'un auteur efficace et d'une traduction à la hauteur. 





+ Les points positifs - Les points négatifs
  • L'univers décrit.
  • Le trio principal.
  • L'humour très british.
  • La qualité de la VF.


  • Quelques illustrations auraient permis d'avoir une édition papier remarquable.
  • Le prix de la version kindle VF, scandaleux (12,99 € alors que la version papier est à 18,90 €).