La Parenthèse de Virgul #18
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Salut les Matous ! Au menu de cette Parenthèse, l'un des super-héros les plus puissants du Marvelverse. Et un joli coup de bluff éditorial.
Miaw !

Schizophrène et Surpuissant
Sentry est un puissant surhumain ayant combattu notamment aux côtés des Fantastic Four il y a de nombreuses années. Sentry, c'est aussi un coup de génie éditorial qui a consisté à faire croire pendant un temps que ce nouveau venu était en fait une vieille création de Stan Lee qui serait restée dans les tiroirs. Par la suite, les scénaristes, Paul Jenkins (son véritable créateur) en tête, ont largement joué sur cet aspect en écrivant son passé et ses origines dans un style très années 60.
Sentry, alias Robert Reynolds dans le civil, va rapidement prendre une place non négligeable dans le marvelverse. D'abord au sein des New Avengers, puis aux côtés des Dark Avengers de Norman Osborn. Sa toute-puissance est néanmoins un problème de taille. Pour pallier cet inconvénient, Jenkins l'a doté d'une psyché fragile et d'une schizophrénie galopante qui donnera naissance à Void, une sorte de personnalité alternative et maléfique. Ce brave Reynolds, qui aurait pu être un atout imparable, devient ainsi une source d'inquiétude constante pour les équipes qui l'emploient. Cette menace intérieure est fort bienvenue car le problème numéro un d'un tel personnage reste sa trop grande puissance. Le type dispose d'une force si phénoménale qu'aucun vilain ne peut réellement se mesurer à lui. On le voit lors de l'évasion massive du Raft où Sentry prend Carnage sous le coude et va le... déchirer (littéralement) dans l'espace, comme si c'était un simple post-it ! (cf. la scène #2 de notre Anthologie des Combat Marvel).

C'est ensuite Brian Michael Bendis qui va considérablement faire évoluer le personnage (dans le mensuel français Dark Reign publié par Panini). Dans un premier temps, le scénariste va encore augmenter le niveau de puissance de Sentry démontrant qu'il peut maintenant contrôler la matière ! C'est d'ailleurs lui qui sauvera ses coéquipiers, bien mal en point, en réussissant à vaincre l'Homme-Molécule. Bob, qui était déjà quasiment invulnérable, qui pouvait voler, cramer un type rien qu'en le regardant ou traverser une montagne de part et d'autre sans même être décoiffé, ajoute donc encore une corde (et pas des moindres !) à son arc déjà bien chargé.
Ce sont pourtant les origines du gaillard, complètement revues, qui vont apporter une réelle surprise. Exit le sérum découvert par hasard et la transformation accidentelle, tout cela n'était que du vent destiné à impressionner le grand public, la vérité est bien plus douloureuse : Reynolds est un junkie. C'est en cherchant de la drogue que, ce jour-là, il s'est envoyé le contenu du fameux tube à essai, déclenchant par la même occasion ce qu'il est permis d'appeler un "trip ultime".

Bendis va en profiter pour s'interroger sur la signification de pouvoirs aussi immenses que ceux de Sentry. Après tout, l'on a l'habitude de dire qu'il détient la puissance d'un million (ou d'un millier suivant les auteurs et les traductions) de soleils qui explosent. Mais, pour un être humain, qu'est-ce exactement que la puissance même d'une seule étoile ?
Toujours sur ce mode interrogatif, Bendis va également évoquer la personnalité profonde des super-héros et laisser entendre très clairement que pour contrôler un tel pouvoir, il faut des êtres d'exception, des hommes à l'intégrité exceptionnelle, des... héros. Le "super" est accessoire, il vient bien après. L'héroïsme habitait Steve Rogers, Peter Parker ou Reed Richards bien avant qu'ils ne reçoivent leurs pouvoirs. Reynolds, lui, ne possède pas cette envergure, cette abnégation véritable. Du coup, cela fait de lui un "super-quelque-chose", mais pas un super-héros.
Outre cette intéressante réflexion sur la capacité à gérer l'ingérable, l'auteur va ensuite développer une passionnante thématique sur la nature mystique et métaphysique des pouvoirs de Sentry. Linda, la femme de Reynolds, s'interrogera ainsi sur l'humanité de son mari. Elle, qui le connaît bien, finira même par admettre qu'elle suppose que son incroyable énergie a quelque chose de "biblique".
L'on va ensuite encore plus loin dans le symbolique puisque Sentry, après avoir traversé la distance qui nous sépare du soleil, tente, désespéré, de se suicider. Il se tient devant l'astre, source de vie, contenant une puissance si phénoménale et si ancienne qu'il nous est difficile de se l'imaginer, et brûle avant de se reconstituer presque immédiatement. Or, si même le soleil ne peut venir à bout d'un homme, est-il encore vraiment raisonnable de ne le considérer que comme un homme ?
Bref, un super-héros passionnant que les scénaristes se doivent de manipuler avec précaution...

Au niveau des ouvrages VF consacrés au personnage, l'on peut citer les deux tomes parus en 100% Marvel (regroupant 10 épisodes) et les Marvel Mega Hors Série #26 et #27 (regroupant 8 épisodes). Tous ont été scénarisés par Paul Jenkins.

Des covers "rétro", permettant de conforter l'idée que Sentry est un personnage méconnu du Silver Age.


Sentry : de quoi impressionner les plus costauds des super-vilains !