One More Day


Bien après la célèbre et controversée Saga du Clone, un autre évènement a bouleversé le destin de Spider-Man et causé une vive polémique. Retour sur One More Day et ses conséquences.

La Fin d'une Vision
En lisant le dernier épisode de One More Day, l'on comprend un peu mieux la réaction de Joseph Michael Straczynski, ayant menacé à l'époque de retirer son nom des crédits. Le procédé semblait fort peu courtois, un auteur bossant pour Marvel sachant, à l'évidence, qu'il n'est pas réellement maître des grandes orientations de son récit, surtout lorsqu'il officie sur un titre comme Amazing Spider-Man. Néanmoins, il faut admettre qu'il ne s'agissait pas là d'un simple mouvement d'humeur mais plutôt d'une saine réaction devant un véritable saccage éditorial qui va anéantir la totalité du travail (gigantesque, cf. cet article) de l'auteur sur la série historique du Tisseur. Pourtant, le long run de Straczynski pouvait légitimement être considéré comme l'un des plus réussis, et en tout cas celui qui avait le plus fait évoluer le personnage depuis sa création par Stan Lee et Steve Ditko. Le scénariste avait bousculé l'éternel et pénible statu quo en donnant notamment à Spidey des origines mystiques particulièrement bien pensées. C'est aussi lui qui fera découvrir l'identité secrète de Spider-Man à l'insubmersible May Parker...
Autant d'avancées annulées au nom d'une évolution qui ressemble bien plus à un terrible et bien inutile retour en arrière.

L'Histoire
Après Civil War et la révélation de l'identité secrète de Spider-Man, May Parker, la tante de Peter, est touchée par le tir d'un sniper qui visait en fait son neveu. Peter, plus pleurnichard que jamais, remue ciel et terre pour lui éviter de passer l'arme à gauche.
Réaction intéressante et involontairement drôle, à un moment, expliquant son refus de la voir mourir, il dit : "Si elle meurt dans des années... de vieillesse, dans son lit... d'accord... mais pas comme ça."
De vieillesse ??
Mais... elle n'était pas déjà vieille dans les années 60 ? Elle a survécu à tout, 17 enlèvements, 832 malaises, 7 crises cardiaques, Jimmy Carter, le choc (que l'on nous avait promis fatal pendant des lustres) de savoir que son neveu est Spider-Man, le rap, un sniper, bref, elle EST vieille !! Mais, increvable. C'est une sorte de Jeanne Calment shootée à la DHEA. De plus, ces "je meurs/je ne meurs pas" à répétition finissent par être passablement ridicules (même si, parfois, cela donne l'occasion de placer quelques répliques savoureuses, cf. la scène #46 de notre Bêtisier Marvel). D'une part cela enlève toute la dramatisation dont la série pourrait bénéficier, d'autre part, cela rend Parker de plus en plus névrosé (car, enfin, il n'est pas normal, à son âge, d'être ainsi anéanti par la vision de sa tante à l'article de la mort, on peut être triste, évidemment, mais là, c'est tout juste s'il n'en perd pas la tête !).
Bref, Peter essaie de trouver de l'aide auprès de ses connaissances, sans pour autant trouver de solution. Finalement, c'est Mephisto - le diable en personne ! - qui propose un marché à Peter : il sauve la vie de May mais, en échange, Peter doit renoncer à MJ et leur mariage. Tout sera effacé, comme si cette période n'avait jamais existé. Bien sûr, Peter, qui est un garçon sensé et courageux, refuse l'odieux pacte et... ah ben non, en fait, il trouve que c'est une super idée, et il sacrifie sa femme.
Ouch...

Conséquences et Aberrations
Il y a deux conséquences principales à One More Day. D'une part, le mariage de Peter et Mary Jane, leur amour même, est "annulé". Il n'a jamais eu lieu. Ils n'ont aucun souvenir de cette période de leur vie. On sentait le coup venir tant Quesada avait l'habitude de claironner que le mariage de Parker était une erreur et avait fait prématurément vieillir le héros. Un point de vue pour le moins discutable (cf. cet article sur le processus d'identification dans la fiction).
L'intrigue est néanmoins assez bien menée. Le récit est émouvant, bien écrit, seule réserve : la psychologie de Spider-Man. Comment ce dernier peut-il sacrifier sa femme, dont il est éperdument amoureux, pour sauver... sa vieille tante, à l'article de la mort ?
Il ressort du personnage, au pire, un égoïsme malsain (il dit à plusieurs reprises que la mort de sa tante ne le dérange pas mais qu'il refuse d'en porter la responsabilité), au mieux, une rare idiotie.
Mais, admettons.
Voilà une péripétie violente, un comportement cruel, mais OK, c'est acceptable car cela ouvre pas mal de possibilités et surprend un lectorat qui ne demande finalement que cela.
La deuxième conséquence est, elle, bien plus discutable. L'identité de Spider-Man redevient secrète. Plus personne ne sait qui se cache sous le masque du Tisseur. Plus personne cela veut dire ni sa tante, ni les Vengeurs, ni Daredevil, ni Johnny Storm, ni Black Cat... personne.

Le syndrome Clone Saga
On n'avait pas vu ça depuis la très controversée Saga du Clone évoquée en introduction. N'importe quel auteur un peu sensé le sait bien, le coup du "ce n'était qu'un rêve, on annule tout" est la pire chose à faire vis-à-vis d'un lecteur qui a alors l'impression (fondée) que l'on se fiche de lui mais qui, en plus, en vient à perdre tout intérêt pour des rebondissements qui n'ont, au final, jamais d'impact réel.
Là, les dégâts sont énormes. Sans rentrer dans les détails, l'on peut donc jeter à la poubelle un nombre incroyable d'histoires dans lesquelles la relation entre Parker et un autre personnage connaissant son identité constitue un pilier central du récit. Des exemples ? L'époque Straczynski où May Parker apprend que son neveu est Spider-Man, le rapprochement entre Daredevil et Spidey, unis par une perte semblable (lors du run Smith/Quesada dans la série du Diable Rouge), toute sa relation avec Black Cat, tout le passif concernant Tony Stark, bref, la plupart des arcs, récents ou très anciens, sont touchés par cet incroyable retournement de situation.
Voilà qui était bien la peine d'organiser des séances de brainstorming si c'est pour en faire ressortir une idée qui complique la continuité et qui insulte l'intelligence des lecteurs les plus assidus...


Brand New Day ou comment faire passer un retour en arrière pour un nouveau départ
C'est à peine croyable mais Steve Wacker (responsable éditorial certainement poussé au contact des fans par le grand Quesada) affirme, dans Amazing Spider-Man #546, qu'il s'agit d'un nouveau départ dans la vie du Tisseur. Ainsi, pendant 45 ans, nous aurions lu, à travers toutes les séries, le premier chapitre de Spider-Man, Brand New Day étant le premier épisode du deuxième...
Pourtant, loin d'être une évolution, tout ici à l'apparence d'un retour en arrière !
Parker habite chez sa tante, il est sans le sou, personne ne sait qu'il est Spider-Man, il traîne avec ses anciens amis du lycée, il est célibataire... bienvenue en 1962 !
Sur la forme, la pilule passe grâce à une narration prenante, des dessins souvent enthousiasmants et un nouveau vilain plutôt charismatique. Mais sur le fond, Marvel n'ouvre pas un deuxième chapitre, au contraire, l'éditeur enterre une grande partie de la continuité pour favoriser l'arrivée de "nouveaux lecteurs" (cet eldorado mythique autant que trompeur), une tendance que l'on pensait atténuée depuis le succès de la gamme Ultimate et le recentrage des séries classiques vers un public plus adulte.
Il s'agit, à l'évidence, d'une décision commerciale et non d'un parti pris artistique. D'où la colère (ou réserve, au minimum) de Straczynski. D'où aussi l'impression d'être un peu considérés, nous lecteurs, comme de braves benêts incapables de s'offusquer lorsque l'on nous dénie le droit à la mémoire, à une trame sensée, à une continuité qui fait l'attrait de nos séries.

Le début de cette période Brand New Day vaut tout de même le coup d'œil. Ce serait même drôle si ce n'était pas si désespérant. Cela a lieu dans le numéro 102 de la revue Spider-Man (Panini, à l'époque, n'avait pas encore l'habitude de remettre sans cesse la numérotation de ses revues à zéro).
Dans l'épisode Swing Shift (distribué gratuitement aux US lors du Free Comic Book Day), Parker se rend à l'anniversaire de sa tante May (pour qui il a donc sacrifié sa femme). Il manque de se faire renverser par une voiture, il en réchappe de peu et sa première réaction est de vérifier si le gâteau qu'il destine à la tantine n'a rien... heureusement, la précieuse pâtisserie est intacte ! Dans le cas contraire, il aurait probablement fait la tournée des héros (Strange, Stark, Richards...) pour voir s'ils ne pouvaient pas lui redonner sa forme initiale. Ou il aurait sacrifié sa future petite amie. Après tout, rien n'est plus important que de nourrir la vioque.
Oui, bon, on a droit à un peu de cynisme quand même...
L'Amazing Spider-Man #546 fait office de réel point de départ de Brand New Day. Dan Slott au scénario et Steve McNiven aux dessins se chargent de cette première fournée. L'on y découvre notamment un nouveau vilain, Mister Negative, qui est plutôt réussi, tant esthétiquement qu'au niveau de son profil psychologique (le gars est un adepte de la méthode "attends, je vais te découper en fines lamelles, tu comprendras mieux").
Le tout est complété par trois petits "teasers" (si l'on peut dire) de trois planches chacun. L'un est consacré à Jackpot , l'autre à Harry Osborn et le dernier à... la tante May ! En plus, sous le titre Astonishing Aunt May. On point où l'on en est, ils auraient pu l'appeler Immortal Aunt May.

Cercle infernal
Au départ, Joe Quesada justifie l'annulation de tout le précieux passé du Tisseur par la volonté de revenir aux "fondamentaux" de la série. Le problème vient du fait qu'étonnamment, Quesada se trompe sur la nature même de ces fondamentaux. Le célibat de Parker ou sa tante May ne sont nullement nécessaire au personnage, ce sont là des "effets" des fondamentaux, pas les bases elles-mêmes. Le principe sur lequel repose le personnage de Peter Parker est lié au fait que son activité de super-héros lui pose des problèmes dans sa vie professionnelle et sentimentale. Il a certes besoin de proches autour de lui, mais il peut fort bien être marié sans pour autant que cela ne dénature le personnage.
Brand New Day ne rétablit nullement les fondamentaux qui n'avaient jamais été perdus, ce fameux "nouveau départ" rétablit au contraire d'anciens effets des fondamentaux, en niant l'évolution pourtant indispensable du personnage qui, une fois trentenaire, n'a plus du tout de raisons d'être un célibataire fauché, comme lorsqu'il était adolescent (cela a même tendance à en faire une sorte de loser et de paumé, ce qu'il n'est pourtant pas).
Spider-Man, et tous les héros Marvel avec lui, sont-ils condamnés à revivre sans cesse les mêmes tourments, tels d'improbables Sisyphe(s), défiant la mort et faisant rouler, pour l'éternité, le même rocher le long d'une même pente ?
Si c'est le cas, à quoi bon attendre la conclusion des récits les plus éprouvant ou excitants ? À quoi bon trembler ou s'inquiéter puisque rien n'a jamais d'impact sur rien ?
Si c'est pour partir vers de nouveaux horizons, le sacrifice d'une MJ est concevable. Mais sommes-nous prêts à faire à jamais du sur-place ? Rien n'est moins sûr.
Il existe un pacte tacite entre l'auteur talentueux et l'honnête lecteur. Le premier dit "hé, fais-moi confiance, je sais ou je vais" et le second tente de ne pas trop traîner les pieds, histoire de lui faciliter la tâche. Quand ce pacte est brisé, que reste-t-il ? Peut-être simplement des lecteurs qui regardent s'éloigner, avec un pincement au cœur, l'ancien esquif qu'ils respectaient naguère et qu'ils maudissent aujourd'hui, peut-être parce que ses voiles, pourtant tendues par un vent prometteur, masquaient un manque d'ambition évident de la part de celui ou ceux qui tiennent la barre.


One Moment in Time
Quelque temps après ces évènements, Marvel tente d'éclairer les zones d'ombre laissées par One More Day avec un arc, publié dans les Amazing Spider-Man #638 à #641, et intitulé One Moment in Time.
Rappelons que Brand New Day est à l'époque très controversé. L'équipe éditoriale a tenté de limiter les dégâts en lançant quelques fausses pistes (notamment avec une Jackpot ressemblant étrangement à Mary Jane) et en introduisant de nouveaux vilains (Mr Negative ou encore l'Anti-Venom) avant de revenir aux grands anciens (Electro, l'Homme Sable, le clan Kraven, le Lézard...) ou à leurs héritiers (les nouvelles incarnations du Rhino et du Vautour). Les arcs se suivent, certains étant tout de même plutôt réussis, mais l'amertume reste.
Est-ce qu'au moins ce pan de l'histoire du Tisseur, jeté aux orties, a permis d'attirer de nouveaux lecteurs ? Même pas. Même si, à l'occasion du numéro #666 de la série, Amazing Spider-Man s'offre la première place du top des ventes, le titre du personnage phare de Marvel subit tout de même l'érosion généralisée actuelle qu'aucun "sacrifice" ne semble pouvoir endiguer.
Puisque le "raz de marée" attendu n'est pas arrivé suite à ce reboot violent qui ne dit pas son nom, il était donc permis de penser que Marvel, qui n'en est pas à son premier revirement, allait tenter, sinon de rattraper le coup, au moins  de ménager les fans qui, eux, n'ont pas encore quitté le navire. Le résultat s'avère malheureusement décevant.

Précisons que les quatre épisodes en questions sont écrits par Joe Quesada et dessinés (de fort belle manière d'ailleurs) par Paolo Rivera. Tout commence par une rencontre, de nos jours, entre Peter et MJ, cette dernière ayant décidé de faire le point, une bonne fois, sur ce qui s'est passé entre eux. Le récit est donc un long dialogue, entrecoupé de nombreuses analepses. C'est plutôt bien fichu, parfois émouvant, à ce niveau-là, comme OMD, OMIT (on remarquera le choix bien pensé de l'acronyme) s'avère soigné.
Voyons maintenant de quoi il est question.
Tout d'abord, l'on apprend comment et pourquoi le mariage de Peter et MJ a été annulé. Rien de bien fondamental. Plus intéressant, Quesada fournit une explication aux chuchotements de Mary Jane (à l'oreille de Mephisto) et au fait que l'identité de Spider-Man redevienne secrète. Marvel n'annule rien, au contraire, il s'agit tout bonnement d'une opération visant à colmater quelques failles et arrondir les angles. Notamment en jouant sur la forme plus que le fond.
L'explication globale donnée permet en effet de considérer (comme Quesada l'avait affirmé à plusieurs reprises) que tous les évènements que nous connaissons, jusqu'à Civil War, ont bien eu lieu. Il n'empêche qu'à partir du moment où ils n'ont plus - ou presque ! - d'impact sur la vie de Peter, leur existence reste somme toute symbolique. En gros, le principal aménagement effectué par OMIT vient du fait que Peter et MJ ont bien vécu ensemble, mais sans être mariés. Ce qui rend possible, à ce détail près, le déroulement que nous connaissons.

Plusieurs éléments de One Moment in Time semblent cependant aller dans le bon sens et redonner un peu d'aura positive au Tisseur. La scène, chez Strange, où il ne peut se résoudre à effacer la mémoire de MJ, permet d'atténuer le côté froid et égoïste qui prédominait après OMD. De même (et c'est plutôt habile d'un point de vue scénaristique), le fait que Mary Jane devienne la principale responsable de leur séparation contribue à "réhabiliter" un Peter qui a tout de même accepté de sacrifier la femme de sa vie pour une tante (voire une mère, cf. la série Trouble de Millar, mais ça ne change rien) à l'article de la mort depuis des décennies.
En subissant une partie des évènements, et en souffrant de leurs conséquences, Peter s'humanise de nouveau. Mais, est-ce pour autant suffisant ?
Sans doute pas. Car, même si MJ endosse le mauvais rôle après l'effet Mephisto, c'est bien Peter qui le déclenche par son attitude et son acceptation. Et par la suite, Peter semblera finalement vite faire une croix sur MJ, allant même jusqu'à dire qu'il se sent "libre". Et, pire, allant jusqu'à la considérer comme... sa meilleure amie (histoire de bien faire comprendre qu'il n'y aura plus rien, au moins dans l'immédiat, entre eux).
Encore une fois, tout cela est joliment fait, et l'on pourrait même verser sa larmichette si les motivations de départ (un "rajeunissement" du personnage et un retour aux "fondamentaux") n'étaient pas si pitoyables.
Car, ce que l'on nous dit ici, c'est en gros qu'un personnage comme Spider-Man... ne peut pas se marier ? Pourquoi ? Parce que, inconsciemment, même les éditeurs (c'est un comble !) en sont encore à penser que les lecteurs de BD sont tous des enfants. Et qu'en plus ils ne peuvent s'identifier qu'à un personnage leur ressemblant dans les détails. Deux erreurs.
Deux erreurs d'autant plus rageantes que Marvel disposait, avec son Ultimate Spider-Man, d'un Tisseur adolescent convenant parfaitement aux nouveaux lecteurs (et même aux plus anciens d'ailleurs), ce qui aurait dû, en toute logique, permettre à la série historique de s'adresser à un lectorat venant chercher autre chose que des "fondamentaux" qui, en réalité, n'avaient jamais disparu.

Un futur pour le Tisseur ?
En fait, qu'est-ce réellement que Spider-Man sinon l'histoire d'un type qui a plein d'emmerdes dans sa "vraie" vie et qui, une fois masqué, devient "fort" et "cool" ?
Peter Parker a toujours eu à gérer sa maladresse et son pouvoir, sa malchance et son courage, son côté "je suis juste un minable" et son côté "je vais te balancer une vanne qui tue et, en plus, je vais te mettre une bonne vieille droite que tu vas sentir passer". Cela, c'est applicable à 15 ans mais aussi à 30. Ou 50. Mêmes fondamentaux, conséquences différentes. Et nul besoin de sur-place narratif.
Mais les têtes pensantes de la Maison des Idées en ont décidé autrement.
OMIT est un peu un pansement, un baume qui se veut doux sur des blessures encore ouvertes. On bricole, on arrange, on tente de ménager des susceptibilités (et pas forcément maladroitement), mais on ne règle rien. Pire, l'on entérine. Et l'on enterre.
Si Gwen représentait le premier amour et les souffrances qui peuvent en découler, Mary Jane a toujours été un absolu. Quelque chose que l'on ne peut trouver certes que dans la fiction mais qui a du sens. Un phare dans la nuit. Un regard qui ne juge pas.
Détruire cela de manière dramatique (au sens romanesque du terme), pourquoi pas ? Mais détruire cet amour fondamental parce que les deux personnages ont peur des conséquences, c'est là une ode à la lâcheté.

Mettre un terme à une histoire d'amour, à leur histoire, par peur des représailles, voilà ce qui va à l'encontre des véritables fondamentaux. Le message délivré est désespérant. Car si l'amour que l'on porte à quelqu'un ne permet pas de prendre des risques, alors quand faut-il en prendre ?
Mary Jane pense qu'elle ne peut pas se permettre d'aimer Peter parce qu'il est un super-héros. Et s'il avait été flic, juge, avocat ? Et s'il avait été cardiaque, diabétique, obèse ? Aimer, n'est-ce pas partager la vie de quelqu'un, l'aider, assumer ce qu'il est ? Après le safe sex (qui se comprend, évidemment), voilà le safe love. Concept à la con où aimer signifie baisouiller de manière fade, dans une pièce capitonnée, avec une personne qui a un métier tranquille, des "idées" proprettes (ou, mieux, pas d'idées du tout), des amis respectables et, sans doute, de bien saines habitudes.
Le plus lamentable vient du fait que, par la suite, les fondamentaux de Peter Parler seront complètement jetés aux oubliettes, le personnage devenant non seulement un riche chef d'entreprise qui a des tonnes de gadgets à sa disposition, mais aussi un membre respecté des Avengers. Une image cette fois bien loin du Peter Parker que l'on connaît (qui est fondamentalement un type lambda) et qui se rapproche trop de celle d'un Bruce Wayne ou d'un Tony Stark.

Bien que proposant des moments poignants, One More Day et One Moment in Time s'avèrent trop brutaux sur la forme et trop peu convaincants sur le fond pour emporter véritablement l'adhésion.
OMD était une gifle, OMIT se veut une caresse, mais les deux cachent la même intention : maintenir un éternel et bien contre-productif statu quo.
Peter se relève et s'accommode de la situation, pas sûr que les lecteurs puissent en faire autant...