Tapie
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On se penche aujourd'hui sur une excellente série Netflix : Tapie.

Bien souvent, l'on a tendance à uniquement s'intéresser aux biopics des personnages que l'on apprécie. C'est un tort car non seulement une vie suffisamment riche et mouvementée peut aussi être en résonnance avec une certaine époque et, surtout, une série, même basée sur des faits réels, reste en grande part une fiction, c'est donc de sa qualité d'écriture que va dépendre son intérêt. Et là, niveau qualité, c'est un sans-faute.
Bien évidemment, pour ce qui est du parcours professionnel, médiatique et politique de Bernard Tapie, Tristan Séguéla et Olivier Demangel, à l'origine du projet, se basent sur les grandes étapes du mec "qui marche à la Wonder". Mais pour ce qui est de sa vie privée, celle-ci est en grande partie romancée. 

Le casting est très bon, avec en tête bien sûr un Laurent Lafitte magistral. L'acteur parvient à incarner l'ancien ministre de Mitterrand à la perfection. Démarche, mimiques, phrasé, c'est assez impressionnant. Joséphine Japy, qui incarne sa compagne, apporte une touche de charme et d'élégance intemporelle. 
La mini-série, en 7 épisodes d'une cinquantaine de minutes, est parfaitement rythmée et sans aucun temps mort. Tout s'enchaîne parfaitement, avec moments de tension, humour subtil mais présent, et dialogues parfois épiques.



Tout commence alors que Bernard Tapy (avec un "y") s'essaie à la chanson. Cela donnera lieu à un leitmotiv à base de Polnareff qui durera jusqu'à la fin et son émouvant générique. Brillant. 
Rapidement, Tapie se lance dans le dur monde des affaires. Qui le mènera dans celui, encore plus glauque et cynique, de la politique. Adidas, l'OM, les affaires, la prison... la série brosse un portrait assez honnête de Bernard Tapie, sans verser dans la critique acerbe mais sans l'encenser non plus. Bien évidemment, le personnage principal va forcément générer de la sympathie (ne serait-ce que parce que l'on perçoit parfaitement ses souffrances), mais l'ensemble reste mesuré.

L'on passe ainsi des années 70 et 80 à la décennie 90 et l'incarcération de Tapie. Les différentes époques sont fort bien retranscrites à l'écran, avec parfois l'utilisation habile d'images d'archive. Le sujet est en soi passionnant, le type parti de rien qui devient millionnaire, star de la télé, puis ministre et député, ou patron d'un des plus grands clubs de football de France, on pourrait croire que c'est là de la pure invention si l'on ne l'avait pas vécu. 
Futé, parfois vicieux mais très humain, à la fois implacable et peut-être trop naïf pour la racaille politicienne et le nid à vipères de la mitterrandie, le Tapie incarné par Lafitte s'avère être un héros tragique et vibrant, que l'on a presque envie d'admirer. Tout est dans le "presque".

Probablement la meilleure série française depuis (dans un tout autre genre évidemment) Cœurs Noirs.
Si vous n'avez pas connu cette époque, cette série vous en offrira un aperçu assez fascinant. Et si vous l'avez connue, cette représentation ne trahira en rien vos souvenirs. Tout juste les embellira-t-elle un peu. Mais n'est-ce pas le lot de la fiction de transformer en douce mélancolie la brutalité du passé ?




+ Les points positifs - Les points négatifs
  • La performance de l'ensemble des acteurs, Lafitte en premier lieu.
  • Une narration exemplaire.
  • Une certaine objectivité dans la représentation de Tapie.
  • Certaines scènes, épiques (la confrontation avec le procureur !) ou émouvantes.


  • La série utilise des ellipses parfois un peu violentes, notamment pour l'acquisition d'Adidas ou de l'OM, mais il faut avouer que c'est plus surprenant que gênant.