Rewind : Ace of Spades
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Bon, après du reggae, de la variété bien frenchy et même les Bronski Beat, il fallait bien en venir enfin à un titre metal. Et là, pas question de choisir un truc trop moelleux à la Scorpions (j'aime beaucoup Scorpions hein, ce n'est pas la question, mais il existe des styles un peu plus... rugueux) ! Non, on va taper dans le lourd, avec Motörhead !

Ouais, rien que le nom, ça sent la sueur, l'huile de moteur, la crasse de redneck qui prend une douche par an... mais en fait, non, rien de tout ça, les gars sont des britanniques pur sucre, originaires de Londres. Vous me direz, on peut être londonien et n'avoir qu'une vague notion de l'hygiène, m'enfin, ce n'est pas le propos.
Motörhead fait partie de la New Wave of British Heavy Metal, un courant musical qui va accoucher, en vrac, de groupes tels que Iron Maiden, Def Leppard, Judas Priest ou les moins connus mais tout aussi efficaces Tank. À sa tête, le mythique Ian Fraser "Lemmy" Kilmister, fondateur, bassiste et chanteur du groupe.

Attention, Lemmy, ce n'est pas le genre propre sur lui et gendre idéal. Il vient d'une famille pauvre, il aime les jeux de hasard et les psychotropes, légaux ou non, et il a une fâcheuse tendance à inventer des riffs agressifs et à chanter fort. Et quand tu vois sa gueule, bah, tu te doutes que son passe-temps favori, ça ne doit pas être les mots-croisés. Le genre de pote que t'appelle pour passer une bonne soirée (du genre dont tu ne te rappelles rien... du genre dont tu ne veux surtout rien te rappeler !). Par contre, si c'est ta fille qui le ramène, en te disant "j'ai trouvé l'homme de ma vie", là tu te dis "bon, tant pis, je vais le tuer, le jury comprendra..."
Trêve de (semi) plaisanteries, intéressons-nous au titre du jour !

Je sais bien que certains vont me dire que c'est une chanson caricaturale, un brin trop lourdingue dans ses paroles et même sa rythmique, que le metal c'est bien plus que cela (et, je l'admets, c'est tout à fait vrai), mais bon, ça ne s'appelle pas "heavy" metal pour rien. Et même si Lemmy lui-même était saoulé par ce titre emblématique, toujours vivement apprécié des fans, et ce des décennies après sa sortie (en 1980), il figure néanmoins parmi les morceaux mythiques du rock, dans son acception la plus large mais aussi la plus qualitative. 

Ace of Spades
(littéralement, l'as de pique), c'est une boule de rage et d’agressivité, grasse, saturée, une sorte de métaphore à interprétations multiples, éructée d'une manière aussi charismatique que puissante, par un Lemmy fascinant, levant son visage vers son micro comme un loup hurle à la Lune. 
Bon, ça parle de jeu, forcément, il y a donc quelques expressions faisant référence à cette thématique (par exemple the dead's man hand, ou la "main de l'homme mort", une combinaison de cartes jugée "maudite", et qui fut celle obtenue par Wild Bill Hickok avant d'être abattu à Deadwood) mais tout cela peut aussi s’interpréter de diverses manières, plus ou moins évidentes. Le pari, le fait de se foutre de gagner ou perdre, de tout miser, de brûler l'instant dans un flash d'adrénaline, peut aussi faire référence à une philosophie de vie certes infantile mais bien réelle, voire à un mal de vivre déjà plus complexe. 

Le titre a un succès énorme en Angleterre. Il se classe 19 semaines dans les charts et atteint la douzième place. Bon, les chiffres diffèrent un peu suivant les sources, mais le succès est là. En 1980 !! Pour un titre aussi "dur", wow ! À la même époque, en France, ce qui cartonne, c'est Une Femme amoureuse, de Mireille Mathieu, et Elle est d'ailleurs, de Pierre Bachelet. Je ne déconne pas. Ah ben, le côté sombre, rebelle et arrosé au whisky, ce n'était pas encore le genre le plus populaire de ce côté-ci de la Manche...

Forcément, ce Ace of Spades, ce n'est pas du easy listening, c'est clair, ça ne s'écoute pas n'importe quand, n'importe où. Faut être dans l'ambiance, se concentrer un peu. Mais quand ça vient, putain, c'est des frissons partout, comme si votre porn-star préférée vous léchait les couilles alors que vous sirotez un milk-shake à la vanille !
Ce n'est pas une comparaison très classe, j'avoue (après tout, votre arôme préféré n'est pas forcément la vanille), et j'aurais hésité si le sujet avait été Frédéric François, mais si vous êtes fans de Motörhead, a priori, ça devrait passer sans trop de grimaces. 

Place à Lemmy ! Puisse-t-il passer une agréable éternité au Valhalla...
Oh, pour l'anecdote, "Lemmy" viendrait de "lend me a fiver" (passe-moi un billet de cinq), condensé dans la forme argotique "lemme a fiver", puis devenu Lemmy.