Goldorak - Black Box Edition
Publié le
16.5.15
Par
Nolt
Comme beaucoup de dessins animés des années 70/80, Goldorak, avant d'être une série animée mythique qui passionna des millions d'enfants, fut un manga. Une première version (introuvable, ou vendue à des prix peu raisonnables) avait été éditée en France par Dynamic Visions (sous le nom Ufo Robot Goldorak) mais c'est cette fois Black Box qui sort une intégrale en quatre volumes, accompagnée d'un one-shot inédit.
L'éditeur a en effet décidé de mettre à l'honneur divers titres de Go Nagai, comme Devilman, La Divine Comédie ou le fameux Goldorak (ou Ufo Robot Grendizer).
Il n'est peut-être pas inutile de rappeler l'histoire de Goldorak, même si celle-ci se révèle relativement simple : les forces de Véga tentent d'étendre leur domination en envahissant la planète Terre. Celle-ci est défendue par Actarus, prince d'Euphor, pilote d'un robot surpuissant.
Si Goldorak/Grendizer est la création de Go Nagai la plus populaire en France, cette œuvre s'intègre en fait dans un ensemble comprenant Mazinger Z et Great Mazinger, deux séries qui introduisaient le personnage d'Alcor et se sont révélées précurseurs dans ce qui deviendrait le populaire genre "mecha".
Commençons tout d'abord par nous intéresser au one-shot, pour la première fois publié par chez nous. Dessins et scénario sont de Go Nagai. Vous pouvez lire ce volume indifféremment avant ou après la série principale car il n'a en fait, bizarrement, aucun rapport avec la continuité de celle-ci. Par exemple, Actarus et Alcor ne se rencontrent pas de la même manière dans les deux récits. Un peu déroutant...
Ce volume a cependant un réel intérêt puisque c'est de son style graphique que s'inspirera plus tard le dessin animé. Les robots y sont plus soignés que dans la série principale, et les personnages principaux paraissent bien plus vieux. C'est également l'occasion de découvrir les robots précédents, puisqu'ils y font tous une apparition.
La série en quatre tomes est toujours écrite par Go Nagai mais les dessins sont cette fois l'œuvre de Gosaku Ota. Le style est plus enfantin, l'exagération typiquement nippone des attitudes des personnages y est plus présente. Certaines cases sont toutefois inégales, parfois même peu lisibles.
Une tentative de colorisation a été faite sur quelques planches. Toujours étrange cette manie (déjà constatée sur l'édition Deluxe de Saint Seiya) de bâcler la couleur sous prétexte qu'il s'agit d'un manga. A part une double planche magnifique, représentant un combat entre des navettes de Véga et des Phantom japonais (cf. image ci-dessous), tout le reste est immonde et ressemble aux coloriages d'un enfant de quatre ans...
Mais voyons maintenant le principal, le récit en lui-même.
Il ne faut pas se le cacher, la narration est terriblement datée (tout cela remonte tout de même aux années 70). L'action est brouillonne, les personnages peu développés, les scènes s'enchaînent (trop) rapidement, délaissant parfois la trame principale pour s'enfoncer dans des intrigues secondaires ennuyeuses (l'alliance avec les Mykènes, peuple découvert dans Great Mazinger, ou la partie concernant le dragosaure). Même Goldorak manque finalement de panache dans les affrontements et n'utilise pas autant d'armes et techniques que dans le dessin animé.
Du coup, c'est naze alors ?
Ben non, pas totalement en tout cas.
Car, des points positifs, il y en a. A commencer par des ennemis pas si manichéens que ça. La rivalité entre Minos et Hydargos, ou la volonté d'Horos de sauver la planète Terre de ses habitants, sont autant de subtilités insuffisamment développées mais présentes.
Du côté des "gentils", tout n'est pas rose non plus (moins en tout cas que dans l'anime). Le professeur Procyon essaie de manipuler son fils adoptif en le conditionnant pour qu'il privilégie le combat et la défense de la planète plutôt que la vie de ses amis. De plus, Actarus, loin d'être un simple idéaliste amoureux des oiseaux et des couchers de soleil, envisage sérieusement de s'emparer de la Terre si le comportement de ses habitants ne change pas.
Le fait que les Golgoths abritent l'esprit, sous contrôle, des anciens habitants d'Euphor pose également un problème moral intéressant.
Un début de discours écologique est bel et bien présent, ainsi qu'une timide réflexion (mais louable pour un manga destiné aux enfants) sur la guerre, les actes passés du Japon ou la menace nucléaire (le fait que Stykadès, planète d'origine de Véga, finisse par être totalement dévastée par les radiations n'est pas innocent et prend une ampleur particulière en regard de l'Histoire nippone).
Un certain niveau de violence est présent également, ce qui contraste fortement avec l'aspect enfantin des personnages principaux ou le côté peu réaliste des robots. L'attaque de Tokyo montre notamment des scènes de massacre explicites (300 000 japonais sont ainsi "décomposés" dans d'énormes machines). Dans le one-shot également, la violence atteint parfois des sommets étonnants. L'on peut ainsi voir un combat de robots géants dans lequel l'un des pilotes utilise des otages enchainés à sa machine, ce qui rend chaque "coup" particulièrement dramatique.
Au niveau des différences entre le dessin animé et le manga, l'on peut encore noter des allusions sexuelles plus appuyées, même si elles sont essentiellement humoristiques, ainsi que quelques réflexions parfois sexistes et relativement niaises. Surtout, la conclusion est bien plus sombre et triste (avec en prime une explication sur les liens entre terriens et végans un peu tirée par les cheveux).
En ce qui concerne l'adaptation française, elle est plutôt correcte. Je ne reviens pas sur l'absurdité crasse qui consiste à publier un livre en français dans le sens de lecture japonais (cf. cet article pour les détails) et me concentre donc uniquement sur le texte. Ce dernier contient surtout des problèmes liés aux termes spécifiques à l'univers de Goldorak. Stykadès devient par exemple à un moment Stykalès. Les Mykéniens sont parfois appelés Mycéniens. Et la traduction hésite sans cesse entre différents adjectifs concernant Véga (végan, végalien, véganien). Une belle bourde également avec le "ranch du boulot blanc" (le bouleau peut être blanc, le travail, lui, a rarement une couleur).
Pour le reste, je n'ai noté qu'une seule coquille dans tout le texte (un "s" manquant), ce qui est fort honorable de nos jours.
Au final, voilà une série un peu vieillotte, parfois maladroite, mais possédant une réelle valeur historique et quelques ingrédients qui demeurent assez épicés malgré le temps écoulé.
À réserver sans doute en priorité aux curieux et aux fans de la série animée.
L'éditeur a en effet décidé de mettre à l'honneur divers titres de Go Nagai, comme Devilman, La Divine Comédie ou le fameux Goldorak (ou Ufo Robot Grendizer).
Il n'est peut-être pas inutile de rappeler l'histoire de Goldorak, même si celle-ci se révèle relativement simple : les forces de Véga tentent d'étendre leur domination en envahissant la planète Terre. Celle-ci est défendue par Actarus, prince d'Euphor, pilote d'un robot surpuissant.
Si Goldorak/Grendizer est la création de Go Nagai la plus populaire en France, cette œuvre s'intègre en fait dans un ensemble comprenant Mazinger Z et Great Mazinger, deux séries qui introduisaient le personnage d'Alcor et se sont révélées précurseurs dans ce qui deviendrait le populaire genre "mecha".
Commençons tout d'abord par nous intéresser au one-shot, pour la première fois publié par chez nous. Dessins et scénario sont de Go Nagai. Vous pouvez lire ce volume indifféremment avant ou après la série principale car il n'a en fait, bizarrement, aucun rapport avec la continuité de celle-ci. Par exemple, Actarus et Alcor ne se rencontrent pas de la même manière dans les deux récits. Un peu déroutant...
Ce volume a cependant un réel intérêt puisque c'est de son style graphique que s'inspirera plus tard le dessin animé. Les robots y sont plus soignés que dans la série principale, et les personnages principaux paraissent bien plus vieux. C'est également l'occasion de découvrir les robots précédents, puisqu'ils y font tous une apparition.
La série en quatre tomes est toujours écrite par Go Nagai mais les dessins sont cette fois l'œuvre de Gosaku Ota. Le style est plus enfantin, l'exagération typiquement nippone des attitudes des personnages y est plus présente. Certaines cases sont toutefois inégales, parfois même peu lisibles.
Une tentative de colorisation a été faite sur quelques planches. Toujours étrange cette manie (déjà constatée sur l'édition Deluxe de Saint Seiya) de bâcler la couleur sous prétexte qu'il s'agit d'un manga. A part une double planche magnifique, représentant un combat entre des navettes de Véga et des Phantom japonais (cf. image ci-dessous), tout le reste est immonde et ressemble aux coloriages d'un enfant de quatre ans...
Mais voyons maintenant le principal, le récit en lui-même.
Il ne faut pas se le cacher, la narration est terriblement datée (tout cela remonte tout de même aux années 70). L'action est brouillonne, les personnages peu développés, les scènes s'enchaînent (trop) rapidement, délaissant parfois la trame principale pour s'enfoncer dans des intrigues secondaires ennuyeuses (l'alliance avec les Mykènes, peuple découvert dans Great Mazinger, ou la partie concernant le dragosaure). Même Goldorak manque finalement de panache dans les affrontements et n'utilise pas autant d'armes et techniques que dans le dessin animé.
Du coup, c'est naze alors ?
Ben non, pas totalement en tout cas.
Car, des points positifs, il y en a. A commencer par des ennemis pas si manichéens que ça. La rivalité entre Minos et Hydargos, ou la volonté d'Horos de sauver la planète Terre de ses habitants, sont autant de subtilités insuffisamment développées mais présentes.
Du côté des "gentils", tout n'est pas rose non plus (moins en tout cas que dans l'anime). Le professeur Procyon essaie de manipuler son fils adoptif en le conditionnant pour qu'il privilégie le combat et la défense de la planète plutôt que la vie de ses amis. De plus, Actarus, loin d'être un simple idéaliste amoureux des oiseaux et des couchers de soleil, envisage sérieusement de s'emparer de la Terre si le comportement de ses habitants ne change pas.
Le fait que les Golgoths abritent l'esprit, sous contrôle, des anciens habitants d'Euphor pose également un problème moral intéressant.
Un début de discours écologique est bel et bien présent, ainsi qu'une timide réflexion (mais louable pour un manga destiné aux enfants) sur la guerre, les actes passés du Japon ou la menace nucléaire (le fait que Stykadès, planète d'origine de Véga, finisse par être totalement dévastée par les radiations n'est pas innocent et prend une ampleur particulière en regard de l'Histoire nippone).
Un certain niveau de violence est présent également, ce qui contraste fortement avec l'aspect enfantin des personnages principaux ou le côté peu réaliste des robots. L'attaque de Tokyo montre notamment des scènes de massacre explicites (300 000 japonais sont ainsi "décomposés" dans d'énormes machines). Dans le one-shot également, la violence atteint parfois des sommets étonnants. L'on peut ainsi voir un combat de robots géants dans lequel l'un des pilotes utilise des otages enchainés à sa machine, ce qui rend chaque "coup" particulièrement dramatique.
Au niveau des différences entre le dessin animé et le manga, l'on peut encore noter des allusions sexuelles plus appuyées, même si elles sont essentiellement humoristiques, ainsi que quelques réflexions parfois sexistes et relativement niaises. Surtout, la conclusion est bien plus sombre et triste (avec en prime une explication sur les liens entre terriens et végans un peu tirée par les cheveux).
En ce qui concerne l'adaptation française, elle est plutôt correcte. Je ne reviens pas sur l'absurdité crasse qui consiste à publier un livre en français dans le sens de lecture japonais (cf. cet article pour les détails) et me concentre donc uniquement sur le texte. Ce dernier contient surtout des problèmes liés aux termes spécifiques à l'univers de Goldorak. Stykadès devient par exemple à un moment Stykalès. Les Mykéniens sont parfois appelés Mycéniens. Et la traduction hésite sans cesse entre différents adjectifs concernant Véga (végan, végalien, véganien). Une belle bourde également avec le "ranch du boulot blanc" (le bouleau peut être blanc, le travail, lui, a rarement une couleur).
Pour le reste, je n'ai noté qu'une seule coquille dans tout le texte (un "s" manquant), ce qui est fort honorable de nos jours.
Au final, voilà une série un peu vieillotte, parfois maladroite, mais possédant une réelle valeur historique et quelques ingrédients qui demeurent assez épicés malgré le temps écoulé.
À réserver sans doute en priorité aux curieux et aux fans de la série animée.
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