Marvel Icons : Spider-Man par McFarlane
Publié le
18.5.15
Par
Nolt
Le Marvel Icons de Panini qui sort ce mois est consacré à la série Spider-Man, réalisée par Todd McFarlane. Point complet sur cet imposant recueil.
La réputation de Todd McFarlane n'est aujourd'hui plus à faire. Créateur de Spawn, à l'origine du concept de Haunt, il fut également l'un des fondateurs de Image Comics. C'est à la fin des années 80 que l'auteur explose vraiment, il se voit alors confier par Marvel les commandes d'une nouvelle série consacrée au Tisseur, sobrement intitulée Spider-Man.
C'est donc l'intégralité de son run sur le titre (plus un épisode de X-Force concluant un petit crossover) qui est rassemblé ici, soit en tout seize épisodes datant de 1990 et 1991. A ne pas confondre avec le travail du même McFarlane sur Amazing Spider-Man, disponible en Omnibus.
Le premier numéro de ce Spider-Man est devenu mythique à plus d'un titre, notamment pour son tirage de 2,5 millions d'exemplaires, un chiffre ahurissant de nos jours. McFarlane signe ici scénario, dessin et encrage, mais c'est bien son style graphique qui va marquer les esprits.
Sous son crayon, Spidey évolue drastiquement. Plus impressionnant, adoptant des postures plus animales, les yeux de son masque perdent leur côté purement fonctionnel et s'agrandissent. Même sa toile devient plus détaillée et "naturelle".
Bien entendu, c'est tout l'univers du Monte-en-l'air qui s'assombrit avec lui.
New York notamment se "gothamise" (la référence n'est pas innocente, les covers de l'époque évoquant souvent "the Arachknight"), ses ruelles sordides et étroites sont inquiétantes, ses immeubles démesurés. Même la mise en page contribue à accentuer cette ambiance oppressante, des cases fines et hautes servant à rendre toute la verticalité de Manhattan.
New York, oppressante et démesurée. |
D'un point de vue visuel, c'est une réussite totale.
D'un point de vue scénaristique, c'est tout autre chose, McFarlane étant loin d'égaler un Straczynski (cf. ce Marvel Icons) en ce qui concerne l'habileté et la profondeur.
Le premier arc n'est qu'un long affrontement verbeux contre le Lézard, manipulé par une sorcière (récit que l'on avait déjà pu redécouvrir dans ce tome des Incontournables). Le deuxième arc est très semblable mais Spidey affronte cette fois le Super-Bouffon, avec l'aide de Ghost Rider.
La troisième histoire est un peu plus originale puisqu'elle envoie Peter Parker en Colombie Britannique pour couvrir une affaire de gamins sauvagement assassinés. Malheureusement, alors que les forêts canadiennes auraient pu constituer un décor envoûtant, elles sont peu mises en valeur. Surtout, à part une condamnation du mode de fonctionnement des media et une intervention de Wolverine, il n'y a pas grand-chose à retenir, l'ensemble étant très répétitif et lent.
Le quatrième arc plonge Spider-Man dans les bas-fonds de New York, où un Morbius assoiffé de sang fait des siennes. Enfin, le dernier récit est un crossover proposant là encore de la baston (contre le Fléau) et des dialogues assez lourdingues.
L'écriture est donc très loin d'être à la hauteur des dessins et symbolise un peu le marasme dans lequel seront plongés de nombreux comics pendant les années 90, les dessinateurs prenant le pas sur les conteurs. McFarlane n'échappe pas non plus à l'emphase verbeuse de l'époque et aux pavés de texte venant commenter ce que l'on voit déjà sur les planches. Lorsque ce texte dévoile les pensées des personnages, il peut être intéressant (s'il n'est pas trop grandiloquent), mais lorsque celui-ci répète sans cesse la même chose, surtout des informations déjà fournies par le dessin, cela alourdit inutilement les scènes.
Tous les personnages possèdent un côté bestial et sauvage. |
Enfin, les personnages secondaires ne bénéficient vraiment pas d'un traitement de faveur, c'est le moins que l'on puisse dire. Mary Jane par exemple apparait comme une fille frivole, exigeante et particulièrement
Cette légèreté dans l'écriture de certains protagonistes, importants pour Peter, a tout de même des effets pervers. On voit mal Parker sortir avec une ravissante idiote sans cervelle. Et la "véritable" MJ est bien plus que cela.
Guère non plus de psychologie ou de subtilité à aller chercher du côté des ennemis (même Morbius, moins manichéen que les autres, fait finalement figure d'abruti qui ne se rend compte de rien).
Une belle galerie de "tronches" à la McFarlane. |
Autrement dit, il ne faut pas se leurrer, cet Icons emporte l'adhésion uniquement par son graphisme radical, sombre et innovant (en ce qui concerne le Tisseur du moins).
Les histoires sont, elles, réduites au minimum, ce qui est franchement désolant, on n'ose imaginer ce que ce run aurait pu donner si McFarlane avait été épaulé par un vrai scénariste.
Un mot encore sur l'adaptation française, plutôt correcte, surtout si on la compare à la navrante VF de l'Omnibus précité. En fait, à part une erreur de mode (subjonctif à la place de l'indicatif) et quelques absences injustifiées de l'adverbe de négation "ne", c'est même plutôt bon. Auraient-ils embauché des correcteurs ? En tout cas, ça va dans le bon sens, et c'est aussi à signaler.
+ | Les points positifs | - | Les points négatifs |
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