Un Chat dans le Culte #2
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Hey les matous ! Ça ronronne dans les gouttières ?
Si vous ne l'avez pas encore lu, je vous conseille le premier Chat dans le Culte. Et sinon, on passe tout de suite au sujet principal, avec une comédie mythique.
Miaw !

La Chèvre
Deuxième film de Francis Veber en tant que réalisateur (après Le Jouet), La Chèvre sort en 1981 et va devenir l'une des grandes comédies culte du cinéma français. Elle met en scène le personnage de François Perrin (Le grand blond avec une chaussure noire, On aura tout vu...), une variante de François Pignon (L'emmerdeur, Les compères, Les fugitifsLe dîner de cons...). À noter que François Perrin/Pignon n'est pas un même protagoniste vivant différentes aventures, mais bien une sorte d'archétype de personnage lunaire, naïf, maladroit, voire parfois un peu benêt.

Ça raconte quoi ?
La fille du PDG d'une grande entreprise disparaît alors qu'elle est en vacances au Mexique. Son père a beau tout tenter pour retrouver sa trace, rien n'y fait. L'un de ses employés a alors l'idée de lui présenter François Perrin, un individu particulièrement malchanceux. Or, la jeune fille disparue a la particularité d'être elle aussi une incroyable poissarde. La théorie étant que deux malchanceux chroniques vont se prendre les mêmes portes dans la figure, trébucher sur les mêmes obstacles, et donc avoir un parcours similaire. Désespéré, le PDG accepte de tenter cette mission de la dernière chance. Il engage Perrin en lui faisant croire que, grâce à son bon sens et son flair, il est en charge de retrouver sa fille. En réalité, il doit servir d'appât, de "chèvre", et Campana, un véritable détective privé, expérimenté et bourru, se charge de l'accompagner pour vérifier les résultats de cette improbable expérience.

Ça fonctionne comment ?
L'on est ici sur du très classique, à savoir l'opposition de deux personnages foncièrement différents, obligés de coopérer et de se supporter. C'est ce que l'on peut retrouver déjà dans La Grande Vadrouille, avec le gentil et naïf Bourvil et le plus dirigiste et colérique De Funès. Mais, ce n'est pas tout. Ici, le duo ne fonctionne pas seulement sur sa disparité mais également sur sa relation asymétrique, l'un en sachant plus que l'autre. Principe que l'on retrouvera, bien plus tard, dans L'Opération Corned Beef, alors que Jean Reno est obligé de supporter le pontifiant Clavier qui ne comprend rien à la situation. Le fait que Campana sache réellement les raisons pour lesquelles Perrin a été engagé participe bien entendu aux ressorts comiques. Enfin, dernier point, Perrin est ici particulièrement sûr de lui. Loin du Pignon du Dîner de Cons, qui se rend compte qu'il gêne ou que l'on se moque de lui et est conscient de ses limites, de ses défauts, Perrin, dans La Chèvre, est suffisamment niais pour se prendre au sérieux, pérorer et même sermonner un Campana pourtant bien plus efficace que lui.

Pourquoi c'est encore bon aujourd'hui ?
Là encore, pas de surprises : casting béton, avec un Pierre Richard et un Gérard Depardieu excellents dans leur propre registre, et surtout une écriture (de Veber, qui signe le scénario également) à la hauteur, avec un nombre de gags (et de gags efficaces !) qui devrait faire rougir les scribouilleux poussifs qui écrivent la plupart des "comédies" françaises actuelles. Le film dure seulement 1h35, ce qui n'est pas énorme (La Grande Vadrouille ou L'Opération Corned Beef, cités plus haut, durent respectivement 2h12 et 1h45), pourtant, il est tellement dense que l'on n'a aucunement l'impression qu'il est si bref. Et, fait rare, les situations comiques perdurent jusqu'à la fin, sans forcément cet emballement qui vire au burlesque et que la plupart des auteurs ou réalisateurs se croient forcés d'employer pour donner un effet de crescendo qui, bien souvent, rend le récit absurde.

La petite anecdote en sus
À l'origine, c'était Lino Ventura et Jacques Villeret qui étaient pressentis pour incarner Campana et Perrin, mais Ventura n'aurait apparemment pas été d'accord sur le choix de son collègue. Quand Depardieu est arrivé sur le projet, il a émis le souhait d'interpréter... Perrin. Veber ayant refusé, l'acteur s'est montré particulièrement insupportable durant le tournage. Enfin, selon la légende, parce qu'en réalité, Depardieu, aussi talentueux qu'il soit, c'est le genre à être chiant tout le temps, de base. Un type qui te pète dessus et qui trouve ça drôle, ça donne plus envie de lui mettre un coup de pied au cul qu'un César entre les mains.




Perrin, s'adressant à Campana, puis à un type qui l'a traité d'abruti, puis de nouveau à Campana, sous la plume de Francis Veber.


— Il m'a traité d'abruti, c'est une affaire entre lui et moi, je vous demande de ne pas intervenir. Vous m'avez traité d'abruti ?
— Oui.
— Je pratique les arts martiaux : judo, aïkido, karaté. La première chose qu'on nous apprend, c'est le contrôle. Un type me traite d'abruti, je ne cogne pas, je le regarde et je m'en vais.
— Et ben tire-toi alors.
— Hmf. Vous avez de la chance. Allez, prenez ce chariot et filez. Hmf... vous avez de la chance.
— Gros connard.
— Haha... vous avez de la chance...
— Pédé.
— Ffffiouuu. Je suis arrivé à un contrôle total, en route ! Pardonnez-moi cette démonstration de force, mais j'ai horreur qu'on me marche sur les pieds.