Enquête au Vatican
Par


Quand un flic de Scotland Yard débarque au Vatican pour enquêter sur la mort très suspecte d'un cardinal, cela donne Révélations, un comic contre les crises de foi.

Charlie Northern est un détective rusé, caustique et qui aime autant les jurons que le football. Lorsqu'un vieil ami lui demande d'enquêter, dans le cadre d'une coopération internationale, sur le décès violent du successeur présumé du Pape, l'anglais accepte et se met en route pour Rome. Les circonstances de la mort du cardinal Richleau sont non seulement étranges (il s'est tout de même empalé sur des grilles, c'est plutôt rare dans ce genre de fonctions) mais les autorités locales, visiblement peu enthousiastes à l'idée qu'un étranger vienne mettre son nez dans leurs affaires, font tout pour que l'enquête tourne court. Quelque chose se trame pendant que les cloîtres bruissent des rumeurs les plus folles. Et puis il y a ce culte secret et démoniaque qui détourne l'argent de l'église catholique... dans quel but ?
Et si Charlie Northern, plus que de preuves, avait besoin de trouver la foi ?

Ce récit, paru chez Dark Horse, puis chez Soleil en France, a d'abord été publié en deux tomes avant de bénéficier d'une version intégrale (que l'on trouve d'occasion à des prix raisonnables).
L'histoire est signée Paul Jenkins (le "papa" de Sentry, auteur également de Generation M ou des Frontline publiés en marge de Civil War). Le scénariste britannique livre ici une intrigue surfant sur la mode Da Vinci Code et plongeant dans les méandres de la religion et les secrets de ceux qui en sont les gardiens. Le récit est un peu lent à démarrer. On a du mal dans un premier temps à croire vraiment à ce flic bourru aux répliques téléphonées et trop "écrites". L'enquête piétine sans que l'on ressente une quelconque excitation. C'est vraiment lors de la deuxième partie de l'ouvrage que la machine s'emballe. Les meurtres s'accumulent, Northern prend une soudaine épaisseur (et se retrouve avec de meilleures répliques en bouche), et surtout le lecteur commence à se prendre au jeu et à être intrigué par les secrets honteux de l'Église et les machinations d'une sorte de secte dont les adeptes semblent particulièrement barrés. Le bouquet final, plutôt bien amené, délaisse le côté polar pour plonger dans un fantastique assez surprenant. Si la conclusion semble facile, l'on peut reconnaître tout de même l'habileté de Jenkins, ce dernier s'étant fait un malin plaisir à nous balader sur de fausses pistes et à jouer avec les apparences jusqu'au coup de massue final.


Charlie Northern, sous la plume de Paul Jenkins.


— J'ai l'impression d'être un flic de la télé. Baiser au milieu d'une enquête sur un meurtre était un vieux fantasme...



En ce qui concerne le dessin, c'est Humberto Ramos (ayant illustré, par exemple, des séries comme Wolverine, Spectacular Spider-Man ou New X-Men) qui est à l'œuvre. L'artiste possède un style qui génère, en général, une réaction entière : on adhère totalement en souhaitant un jour pouvoir lui embrasser les orteils (c'est une image, mais bon, il paraît qu'il a de très jolis pieds) ou l'on se met à vomir des trucs verts, à avoir la tête qui tourne et à insulter les gens avec une voix rauque. Trêve de divagations, disons tout de suite que les planches de Ramos sont de pures merveilles. Seul petit regret, les décors, pourtant originaux, sont trop peu exploités. C'est d'autant plus rageant que lorsqu'ils sont un peu plus mis en avant, ils sont superbes.
Le côté très caricatural des personnages ne gène en rien l'immersion (pour peu que l'on fasse partie de la première catégorie bien sûr, sinon c'est la voix rauque !) et la colorisation de Leonardo Olea, à base d'élégants tons pastel, convient parfaitement à l'ambiance.

Voilà un comic très européen proposant une enquête teintée de mysticisme. La conclusion aurait peut-être mérité d'être un peu plus longue et travaillée mais, dans l'ensemble, on passe un excellent moment. Espérons que l'on retrouve un jour ce vieux Northern, au charme certain et au franc-parler détonnant.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Northern, parfait en flic bourru.
  • Quelques scènes impressionnantes, au visuel "choc".
  • Le style Ramos.
  • Le cadre.

  • Il faut un petit moment pour pleinement rentrer dans le récit, mais ensuite, c'est du tout bon.