Les Chevaliers du Ciel en tabarnak
Publié le
22.7.24
Par
Nolt
L'album Traque au Canada met fin au troisième diptyque de la collection Classic de Tanguy et Laverdure. Bilan de l'aventure canadienne !
On le sait, outre les albums récents qui prennent la suite de la série historique (cf. ces intégrales) et se déroulent de nos jours, un spin-off (exactement à la manière de celui dédié à Buck Danny) des aventures de nos deux pilotes français conte également des récits censés se dérouler dans le passé, plus précisément dans les années 60.
La première partie de cette histoire, intitulée Le Mystère du Sabre Jaune, plantait le décor et montrait les deux héros prenant part à un exercice commun réunissant l'armée de l'air française et des pilotes canadiens basés à Marville (dans la Meuse, et non en Alsace comme comme certains sites ont cru bon de le préciser...) dans le cadre de l'OTAN. Très vite, après l'intervention d'un mystérieux Sabre, une sombre histoire de vengeance remontant à la guerre de Corée semblait viser l'un des pilotes canadiens. Suite à diverses péripéties, Tanguy et son ami Laverdure se retrouvent donc à poursuivre un suspect... au Canada.
Disons-le tout de suite, le scénario de Patrice Buendia (s'il tant est qu'il ait bien écrit ce dernier étant donné qu'il est bizarrement crédité, dans la BD, pour le "texte", ce qui laisse planer un doute) ne s'embarrasse pas de réalisme et fait dans le limite farfelu. Un scénario de "bande dessinée" diraient ceux qui ne connaissent pas la BD et pensent qu'elle se doit d'être grand-guignolesque. Une vengeance à l'aide d'un Sabre (un jet militaire quand même) sur le sol français, l'implication de la mafia chinoise, l'intervention des deux personnages principaux à l'étranger, tout cela est assez chaotique. Sans parler de la résolution finale, à base de grenades. Mais ça passerait si c'était passionnant, or c'est loin d'être le cas.
Les événements se déroulent de manière très mécanique, selon une logique prévisible, sans que le lecteur en retire la moindre émotion. Tout est assez fade et peu inspiré. D'ailleurs, il n'y a jamais, par exemple, de pause humoristique dans le récit. Ni même de quoi épaissir un peu les personnages. La faute à un cahier des charges très (trop) précis ? Difficile à dire.
Même sans parler de l'intrigue en elle-même, l'escapade canadienne se révèle très peu excitante. Si l'on excepte les dessins de Matthieu Durand, plutôt agréables et dans le style Uderzo (avec un effet caricature parfois prononcé au niveau des visages), le reste est composé de clichés simplistes, au point que l'on croirait que l'auteur a coché très scolairement toutes les cases de ce qui constitue le folklore canadien : police montée, bûcherons, expressions typiques et même un amérindien venant critiquer les colons et rappeler au lecteur à quel point les Blancs sont méchants (cette propagande à base de simplification historique manichéenne est tellement omniprésente dans la plupart des œuvres qu'elle finit par ronronner, comme une méchante et lancinante musique venant laver les cerveaux les moins affûtés).
Bref, même si retrouver Tanguy et Laverdure dans un contexte historique fleurant bon une France qui avait encore du sens, des valeurs et même un certain panache, peut réveiller chez certains un brin de nostalgie, la faiblesse de l'écriture rend cette aventure insipide. Ce n'est pas réellement mauvais, c'est plat, sans aspérités, sans ambition, sans saveur : une production destinée à surfer sur l'effet vintage et à exploiter une licence qui mériterait largement mieux. Surtout si l'on compare aux premiers albums, datant de la fin des années 50, et dont la qualité des scénarios et des dialogues est telle qu'ils sont encore de nos jours parfaitement lisibles, voire intemporels.
Une traque au Canada totalement dispensable. Dommage.
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