Capitaine Vaudou #1 - Baron Mort Lente
Par


Des pirates, des esclaves, des divinités du panthéon vaudou, des créatures fantastiques...
Voici un melting pot sentant bon le rhum ambré. Mais que contiennent vraiment les foudres de chêne ?



Capitaine Vaudou
est initialement un jeu de rôles créé par Jean-Pierre Pécau se déroulant dans le monde sans pitié de la piraterie du XVIIème siècle et ayant connu un joli succès dans les années 90. Récemment, le jeu fut réédité par Black Book Éditions, ce qui peut peut-être expliquer l'adaptation en bande dessinée que nous tenons entre les mains.
 
Pécau, créateur de jeux (Les 7 royaumes combattants, Krystal...) et auteur de bandes dessinées (tout l'Univers des Arcanes, Les 30 deniers, Le dernier Dernier Dragon...), est toujours maître de son univers et en signe donc le scénario... qui semble être celui d'un maître de jeu peu inspiré aspirant à faire découvrir l'univers à une nouvelle table de joueurs. Mais nous y reviendrons.

Comme attendu pour ce genre d'adaptation, la bande dessinée suit la logique du jeu en mêlant histoire et fantastique. Magie vaudou, zombies, golem, garou... tout y passe dans un scénario qui, malheureusement, est davantage un collage de séquences nécessaires à l'explication de l'univers du jeu qu'une réelle histoire.
 
L'impression première qui en ressort est que l'univers est intéressant et cohérent. La deuxième est d'avoir lu le script d'un tutoriel. La troisième est... que le personnage central de cet album servant de candide est une marionnette ; non seulement entre les mains d'une déesse vaudou mais aussi entre les mains de son scénariste. Le type a littéralement le charisme d'un petit coup de vent contraire inapte à faire frissonner une mèche de barbe .

On a donc là un tome 1 permettant de bien prendre conscience de la richesse potentielle du concept... tout ça ne donne qu'une envie : lire le tome 2 et vérifier si l'on arrive à une véritable narration plus fluide et moins balisée par d'obligatoires explications du lore par des personnages non joueurs.


Nous sommes en 1690. Enfin non, nous sommes en 2022 mais c'est une façon de poser le décor, arrêtez d'être pointilleux comme ça, c'est saoulant ! Nous sommes en 1690, donc, et les frères Mc Coffin sont deux rebelles irlandais déportés comme esclaves vers le Nouveau Monde dans la cale d'un bateau négrier. Dès le départ, l'ambiance n'est pas à la gaudriole, hein... Surtout que les premières planches présentent d'emblée une rumeur selon laquelle une entité gigantesque du panthéon vaudou invoquée par des esclaves aurait coulé un navire de ce genre. Donc les frangins sont dans une merde noire et l'on nous a appris dès le départ que le salut pourrait potentiellement venir de pire encore. Joie !
 
Car oui, ils vont être confrontés à la magie noire des Caraïbes, celle qui résiste aux Blancs depuis des décennies... Magie à laquelle le jeune Cormac Mc Coffin va être étonnamment réceptif, devenant "le cheval", le parangon, d'une entité connue sous le nom d'Erzulie, l'esprit de l'amour, du sexe et de la protection des femmes. Magie avec laquelle le second Mc Cormac, Angus, aura une expérience plus brutale d'emblée et, apparemment, plus relative à la non-vie par la suite.
 
Ce premier tome nous invite à suivre un Cormac trimballé tantôt par un compagnon de cale, tantôt par un capitaine pirate, dans sa découverte de la piraterie et de l'occulte. Il y rencontrera le Baron Mort Lente qui, pour sa part, semble bien être le principal antagoniste et se révèlera vite être un sorcier capable de ranimer les morts pour les exploiter comme équipage de son sinistre navire.
 
D'autres personnages atypiques peuplent l'histoire, comme autant de PNJ (personnages non joueurs) agréables à camper pour le MJ (maître de jeu) : le rabbin de Port Royal qui a donné vie à un golem, la tenancière d'une maison de tolérance dans laquelle les filles choisissent leurs clients...
 
Tout cela ferait presque une histoire et ne demande qu'à en devenir une. Le tome 2 a des bases généreuses, gageons qu'il s'en servira.

En ce qui concerne le dessin, Darko Perovic (Dr Watson, Alamo...) conserve son style réaliste habituel et joue énormément avec les ombres pour un album majoritairement diurne sous un soleil de plomb et occasionnellement nocturne.
 
La couverture, quant à elle, est signée Ugo Pinson, comme celle du manuel de jeu de rôles... et elle attirera sans doute à elle seule une partie du lectorat de cette bande dessinée tant elle est évocatrice du jeu (pour les anciens) et efficace pour marquer l'imagination des lecteurs potentiels totalement néophytes. 


+ Les points positifs - Les points négatifs
  • La richesse de l'univers.
  • Les recherches préalables de l'auteur sur la piraterie et le vaudou pour son jeu de rôles, lui ayant permis d'être documenté pour cet album.
  • La galerie de personnages.
  • L'histoire qui tarde à en devenir une... le tome 2 pourrait rattraper ça sans aucun souci et faire sourire notre mascotte.
  • Le héros ballotté par les flots narratifs.