Femmes dans la fiction : propagande et réalité
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— Tiens, je me demandais, Druuna, c'est bon ou pas pour l'image de la femme, à ton avis ?
— Ben, je sais que, perso, cette BD a toujours contribué à attiser mon intérêt envers la gent féminine en tout cas.



Bon, OK c’est juste la page Panini, tenue par un demeuré, mais quand même, ce ne sont pas les seuls à sortir ce genre de… « pubs » ? Conneries ? Du coup, il ne me semble pas inutile de revenir sur le sujet.

Tout d’abord, comme c’est précisé dans le post, Marvel met en scène depuis très longtemps des héroïnes. Ça n’a rien d’extraordinaire. C’est normal en fait. Ce qui est anormal, c’est de se sentir obligé de le faire.

Quant à cette « journée internationale des droits de la femme », elle serait certainement très utile là où elle n’est pas célébrée, c’est-à-dire dans un paquet de pays arriérés, mais en Occident, l’égalité en droit entre hommes et femmes, c’est pareil, ça fait longtemps que c’est un fait. Faire croire le contraire, c’est une escroquerie intellectuelle.

Alors, il y a le fameux argument bateau « ouais mais les femmes sont moins payées à poste égal que les hommes ». Ça aussi, c’est une arnaque. Une preuve ? Ben, il y a des hommes moins payés que d’autres hommes, à poste égal. Oh, ben ça alors, comment ça se fait ? Ce n’est pas basé sur le sexisme alors ?
Ben non. Parce qu’en fait, ton salaire n’est pas uniquement lié à ton poste, mais à ton ancienneté, à l’endroit où tu vis (tu n’es pas payé pareil à Paris et à Épinal), à ton assiduité, au fait de simplement demander des augmentations, etc.

Vous croyez vraiment qu’en 2023, en France, quand une entreprise recrute deux nouveaux collaborateurs, elle accorde une prime au candidat masculin sous prétexte qu’il a une bite ? Allons… un peu de sérieux.

Ce qui me gêne le plus dans cette manière de mettre des livres en avant, c’est que l’on ne s’occupe plus de leur qualité, mais uniquement de ce qu’ils sont censés symboliser. 
Personnellement, quand je lis un roman, je me fous parfaitement que le personnage principal soit un homme, une femme, un extraterrestre, un vampire ou un animal. Ce qui m’importe, c’est la qualité de l’écriture. Je veux être touché, transporté, diverti, étonné, bousculé. 

Une œuvre littéraire, que ce soit un roman ou une BD, ce n’est pas un tract, une affiche ou un support à slogan creux. Si un auteur a un message à faire passer (autre chose qu’une simple évidence), libre à lui de le faire, mais encore faut-il avoir les capacités de le transmettre avec efficacité et élégance.

Dire « mon personnage est une femme », ça ne défend en rien l’image de la femme.
C’est un pis-aller de fainéant ou d’incapable. 
Pire, c’est dangereux.

Les gens comme les personnages ne doivent pas être jugés sur ce qu’ils sont, mais sur ce qu’ils font.
La respectabilité, ça s’acquiert par les actes.
Personne n’est responsable de son sexe, sa couleur de peau ou ses origines, mais tout le monde est responsable de ses agissements. C’est donc cela, et cela uniquement, qu’il convient de  juger.

Et si vous faites partie de ces gens qui pensent que les auteurs ont attendu les féministes pour créer des personnages féminins forts et charismatiques, alors vous êtes sans doute passé à côté de Buffy, Fantômette, Lisbeth Salander, Wonder Woman, Lara Croft, Mafalda, Jo March, Yoko Tsuno, Hermione Granger, Miss Marple, Arya Stark, Candy, Scarlett O’Hara, Bridget Jones, Clarice Starling, Kerry Chang, Claude du Club des Cinq, Harriet « Makepeace » Winfield, Ellen Ripley… et bien d’autres. Tant d’autres qu’au final, ce n’est peut-être pas un hasard si vous ne les avez pas vues. Mais peut-être juste une preuve d’une sélectivité coupable. 

Imposer des contraintes sociétales – fluctuantes et discutables par nature  aux auteurs, c’est se condamner à tyranniser le seul espace où l’on devrait être parfaitement libre. C’est aboutir à une littérature sous diktat. C’est valider les autodafés qui vident les rayons des bibliothèques en Amérique du Nord. C’est accepter l’écriture sous tutelle (cf. les « experts » littéraires improvisés qui distribuent des bons points ou « cancelent » les auteurs). C’est remplacer la souplesse de l’encre par la raideur des barreaux.

Nos livres ne sont pas le terrain de vos combats.
Une histoire, pour être génératrice d’émotion, pour qu’elle ait du sens, pour qu’elle puisse transcender son sujet, doit être impactée, signée, modelée par son auteur. Et son auteur seul.
Et si elle vous choque… tant mieux. Qui a dit que l’on devait vous protéger de l’imaginaire ?