The Babe défonce tout !
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En avant-première, la bonne surprise de la rentrée : The Babe, une BD aussi originale que bien foutue.

Attention, c'est vraiment du lourd, dans tous les sens (positifs) du terme !
Bon, il n'y avait pas besoin d'être un expert pour se rendre compte, lors des multiples étapes de la réalisation de ce tome, relayées sur le net, que ça sentait très très bon. Malgré tout, le projet n'a pas trouvé d'éditeur traditionnel (ce qui est tout de même très étonnant) et a donc abouti dans le circuit alternatif, via un financement participatif et une auto-édition, le tout encadré par La Bande du 9.
Or, bien souvent, ce qui est auto-produit est plutôt médiocre. Pour des raisons évidentes : manque de moyens, de compétences, volonté d'aller trop vite, avec souvent du matériel peu voire pas du tout abouti... ici, c'est tout le contraire, avec un "perfect" dans quasiment tous les compartiments du jeu. C'est bien simple, ça surpasse certaines productions professionnelles.
Voyons ça en détail.

The Babe est une héroïne franchement atypique. Court-vêtue, visiblement en surpoids, elle dispose d'une force exceptionnelle et d'une énorme paire de... boobs (des nichons, quoi). La justicière joufflue a décidé de nettoyer un peu Skin City, qui en a bien besoin. La ville est en effet sinistre, corrompue, gangrenée par la pauvreté, la pollution et la criminalité. Mais fort peu de gens s'en inquiètent, car il suffit de se munir de lunettes holo, de bien pratiques œillères modernes, pour superposer une image virtuelle propre et colorée à la crasse ambiante.
Le premier objectif de The Babe sera de se débarrasser d'un stock de nutri-pills destinées aux plus pauvres. Une nourriture que la jeune femme soupçonne d'être truffée de saloperies sapant la volonté de la populace...


Mélange d'action débridée, de second degré et de critique sociale qui ne se prend pas trop au sérieux, ce premier tome de The Babe est une très belle entrée en matière. Le scénario de Mobias (Gregory Sand) installe le personnage principal, nous fait découvrir un premier super-vilain délicieusement crados, et quelques protagonistes secondaires bien caractérisés, le tout dans un monde techno-décadent qui flirte un peu du côté de Transmetropolitan (cf. notre dossier sur Warren Ellis). On a vu plus dégueulasse comme référence.
Ce tome, contenant les trois premiers chapitres, se termine sur une grosse révélation et fait partie d'une vaste intrigue qui sera développée par la suite (le tome 2 est déjà écrit, et l'auteur annonce avoir déjà de quoi en produire 4 ou 5).

Le choix d'une héroïne aussi typée peut surprendre, surtout à une époque où les plus fragiles apprentis-censeurs voient du sexisme dans le moindre décolleté un peu prononcé, mais l'on peut aussi louer le courage des auteurs qui ne tiennent pas compte de ces connards des extrémistes, et même sortent des sentiers battus en développant un personnage aux formes généreuses, ce qui est plutôt rare dans le genre super-héroïque (enfin, des gros seins on peut en trouver, mais des super-héroïnes avec du bide, ça ne court pas les rues).

Passons à l'aspect visuel, avec de superbes planches dessinées par Atlante, un illustrateur ayant travaillé dans le domaine de l'animation (Lucky Luke, Boule et Bill...). C'est bien simple, tout est parfaitement réalisé. Le style est dynamique et original, le découpage est efficace et inventif, et la colorisation apporte la touche finale à l'atmosphère, sombre ou au contraire acidulée, des différentes scènes. Rien n'a été laissé au hasard, d'un petit gag visuel au détour d'une case en passant par le changement de style graphique à l'occasion d'un flashback. Même le lettrage est soigné.
Vous risquez d'entendre parler de ce dessinateur dans les années à venir. Et en bien !

En ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage, là encore, c'est vraiment du beau boulot. Hardcover, papier de qualité, grand format (23 x 31,5). Même la quatrième de couverture est bien pensée, avec quelques vannes au milieu des infos techniques d'usage.
En plus des 68 pages BD, l'ouvrage contient également des bonus commentés par les auteurs : crayonnés, recherches de personnages, planches inédites... tout cela est intéressant et constitue un petit plus fort sympathique.

Un bel album qui se hisse sans problème dans le top de ce qui se fait de mieux au niveau du genre si particulier que l'on appelle "french comics". Disponible à partir du 14 septembre (15 euros) sur le site La Bande du 9.
Vivement conseillé !



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • De fort beaux dessins et une mise en page bien pensée.
  • Un univers intéressant, entre parodie amusante et métaphore élégante.
  • Les bonus et la finition technique en général.
  • Les ninjas ! J'aime bien ça moi, les ninjas...
  • Les boobs ! J'aime bien ça moi, les boobs...

  • Il manque le point final du texte dans certaines bulles. Bon, rien de bien méchant, pas de quoi en chier une nutri-pill.