DC Infinite, phase 1 : analyse d'un omnivers aux possibilités infinies
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Dans une implacable prestation au concours de celui qui a la plus grosse,
DC ridiculise les multivers de la concurrence en nous posant sur la table son omnivers !
Analyse d'une victoire au poids.


DC Infinite
 déboule en version française chez Urban Comics. Pour rappel, l’année 2020 a été chez nous celle du très intéressant arc Death Metal. Maintenant qu’il touche à sa fin dans DC Future State, Scott Snyder, James Tynion et Joshua Williamson se lancent dans un énième renouveau supposé vivifier l’univers DC sans nier tout ce qui avait été installé auparavant. Loin de là, même, puisque l’on a l’arrivée chez DC d’un omnivers : une infinité de multivers hébergeant donc toutes les histoires possibles et imaginables écrites et à écrire. Voilà qui est bien commode pour rendre tout canon… mais n’est-ce pas aussi un piège, que cette porte ouverte à tout et n’importe quoi ? L’avantage premier en terme éditorial est que cela peut attirer les anciens lecteurs comme les nouveaux. Cette unification des DCU présent, passé et futur ouvre en effet des tas de nouvelles possibilités et l’on se prend à rêver de comics modernes prenant le look d’anciens, par exemple… ce que le présent album commence à suggérer avec le destin de Flash. Il y a là de quoi être aussi enthousiaste que méfiant : lorsque le pire comme le meilleur est possible, DC se montre souvent capable des deux. Alors, qu’en est-il du lourd recueil ouvrant cet arc chez Urban Comics ?
 
DC Infinite fait suite aux événements de DC Rebirth (2016 à 2021) qui faisait déjà suite à DC Renaissance – New 52 en VO (2011 à 2016), juste après Flashpoint (sans doute le reboot le plus connu de tous, résultant du voyage dans le temps de Barry Allen pour sauver sa mère qui chamboula l’espace-temps). DC Infinite ambitionne de proposer des récits proches des personnages montrant où ils en sont dans leur vie et leur faisant franchir de nouvelles étapes ou surmonter certaines épreuves. Et c'est sans doute une bonne chose : proposer une infinité d'histoires à offrir serait casse-gueule si l'on s'y autorisait en plus tous les mélanges de personnages imaginables.

DC INFINITE FRONTIER : un recueil pour les gouverner tous. Un recueil pour les trouver.
Un recueil pour les amener tous et dans l'Omnivers les lier.


DC Infinite, c’est avant tout DC Infinite Frontier, un album-teaser de 360 pages comprenant l’histoire principale écrite par Joshua Williamson où une terrible menace fait son grand retour. Allez, à ce stade de l’article, disons-le : il s’agit ni plus ni moins que de Darkseid dans sa version la plus aboutie. Le recueil contient le numéro zéro d’Infinite Frontier, les six numéros de la mini-série dessinée par Xermanico et les six numéros de la mini-série Infinite Frontier Secret Files. 

Depuis la fin de la guerre contre Perpetua et le Batman Qui Rit dans Death Metal, notre Terre fait partie d’un ensemble de dimensions parallèles. Darkseid refait surface et engendre la coalition de héros et vilains de multiples horizons. Du multivers composé de 52 réalités parallèles, DC Infinite Frontier nous propulse dans un omnivers dont le multivers précédent n’est qu’une infime parcelle. Voyez l’omnivers comme un multivers infini, où tout est canon… c’est beau comme un poème, non ? DC Infinite Frontier n’est donc en rien un reboot (contrairement aux New 52, par exemple). C’est la continuation logique de ce qui précéda mais, aussi, un parfait point de départ pour les nouveaux lecteurs en ce qu’il offre des histoires mettant l’accent sur l’avenir des personnages.

Tout débute avec ce qu'il advient de Wonder Woman après son sacrifice récent : elle rencontre la Quintessence et prend connaissance d'où en sont ses amis et alliés dans leur cheminement personnel. Avouons-le, ça a tout d'un épisode rétrospectif permettant aux nouveaux de tout comprendre et aux anciens de raccrocher le wagon. Mais le dessin et la colorisation y sont agréables. Et la narration y est si fluide qu'il est plaisant de retrouver une Diana s'enquérant de l'avenir de Kal-El, Flash, Shazadam (oui, Black Adam joue les Shazam), Batman, Oracle et les Batgirls, Grifter, Montoya, Nubia, Yara Flor (la très intéressante nouvelle Wonder Woman brésilienne), Jade, Obsidian, Allan Scott, Jonathan Kent, Roy Harper, Courtney (Stargirl, la détentrice du spectre cosmique... qui a l'air assez fun), son beau père Pat Dugan, Keli (la Teen Lantern surdouée qui nous intrigue pas mal... une ado détentrice d'un anneau de pouvoir, ça augure de surprises diverses), Barry Allen, Wally West et... la Teen Titans Academy. Toutes ces micro-histoires n'ont pas la même patte graphique mais aucune ne démérite vraiment. Elles sont toutes l'objet d'une critique ou d'un espoir de Diana qui les regarde depuis son nouveau statut et annoncent, bien entendu, les séries à venir dans Infinite. À noter, d'ailleurs, l'absence d'Aquaman parmi les classiques oubliés... et ce ne semble pas être un simple oubli de Diana : aucune sortie le concernant n'est annoncée pour cet arc et c'est assez étrange. Nous retrouverons, par contre, la suite de l'existence de Wonder Woman sous peu dans son parcours vers son après-vie dans DC Infinite Frontier Wonder Woman #1 - Les Mondes au-delà (voir ci-dessous)

Dans le présent recueil, nous allons ensuite suivre nombre de héros dans une de leurs versions alternatives, venant de dimensions plus méconnues du grand public. La Quintessence, composée d’êtres surpuissants, y est en effet neutralisée en quelques secondes par une nouvelle menace qui va nécessiter l’alliance de héros plutôt exotiques : 
- Roy Harper (un ex sidekick de Green Arrow qui fut tour à tour nommé Speedy, Red Arrow et Arsenal) désormais débarrassé de son addiction à la drogue mais tourmenté par un anneau noir que les fans reconnaîtront sans peine.
- Calvins Ellis, le fameux président Superman de Terre-23, ce personnage qui fait régulièrement bouillir de rage sur internet une quantité phénoménale de débiles ne pigeant rien au concept de multivers au titre qu’on leur « volerait leur enfance » en donnant une peau noire à Superman. Sauf que non : Clark Kent reste bel et bien un petit blanc-bec de Smallville au cul rose, les mecs. Calvin Ellis est un autre Superman dont a hérité un autre monde et autant vous dire qu’en dehors de leurs origines kryptonniennes et donc de leurs pouvoirs, on ne peut voir que peu de points communs entre les deux héros.
- Thomas Wayne, le Batman venu de la ligne temporelle de Flashpoint (père d’un Bruce Wayne assassiné dans Crime Alley) qui a voué sa vie à devenir le justicier qu’on connaît en combattant un Joker féminin qui n’est autre que son épouse Martha. Il est notoirement connu pour avoir aidé Flash à restaurer le cours de l’Histoire et pour être, selon nous, un Batman couillu comme pas deux.
- Allan Scott, premier Green Lantern humain, fondateur de la Société de Justice d’Amérique dans les années 1940. Il n’a jamais fait partie du Corps des Green Lantern et est père des jumeaux Jennie-Lynn-Hayden (Jade) et Todd Rice (Obsidian) tous deux présents ici également et incarnant respectivement la lumière et les ténèbres.
- Barry Allen, le Flash le plus connu de tous, ici trompé par l’ennemi central de ce recueil : Psycho-Pirate. Pour rappel, Psycho-Pirate est le seul survivant de Terre-2. Se souvenant de tout le passé des Terres Infinies et du « Mal » généré par les diverses crises d’envergure cosmique, il est en quête de vengeance et use pour ce faire du pouvoir du masque de Medusa lui permettant de contrôler les émotions de ceux croisant son regard.

Avec ces 360 pages, le décor est planté et la machine DC lancée pour une fournée de séries variées jouant peu ou prou la carte de l'omnivers... certaines anciennes continuent, de nouvelles se lancent, certaines ne comptent que quelques numéros ; il y en a pour tous les goûts ! On trouvera : Action Comics, Aquamen, Batgirls, Batman, Batman : Urban Legends, Batman/Superman, Catwoman, Deathstroke Inc., Detective Comics, The Flash, Future State : Gotham, Green Lantern, Harley Quinn, I Am Batman, The Joker, Justice League, Legends of the Dark Knight, Nightwing, Robin, Suicide Squad, Superman, Superman : Son of Kal-El, Teen Titans Academy, Wonder Girl, Wonder Woman mais aussi de nombreuses séries limitées comme Justice League vs. the Legion of Super-Heroes de Brian Bendis, Dark Knights of Steel de Tom Taylor (c'est de la fantasy !), Supergirl : Woman of Tomorrow de Tom King ou The Swamp Thing de Ram V. Tout cela paraîtra-t-il chez nous dans la langue de Macron ? Sans doute pas. Et c'est évidemment dommage... Mais nous pouvons déjà lire les trois albums qui suivent et qui portent l'estampille DC Infinite. Tour d'horizon de ces premières sorties enthousiasmantes : Batman, Wonder Woman et Superman, nous voici ! [1]


DC INFINITE BATMAN #1 - Lâches par essence


On a ici un Batman dépossédé de ses biens, ruiné et reprenant à zéro son activité de justicier hardcore suite aux événements de Joker War. James Tynion IV fait décidément vivre à Bruce Wayne des périodes bien difficiles depuis qu’il le tient sous sa plume et c’est aussi ce qui peut être réjouissant : tant que le confort pourrit Wayne, pourquoi ne pas l’imaginer jouant avec ses multiples gadgets pour sauver Gotham du crime, tel un Tony Stark de chez DC ? Mais plus rien de cela, ici. Fini, le héros adulé, finis les gadgets à plusieurs milliards de dollars, les drônes de surveillance et la complicité de la police. À la tête du commissariat, feu le brave Gordon a fait place à Christopher Nakano que l’on ne peut soupçonner de faire partie du fan club de Batou. Il fera même tout pour que le héros au costume de chauve-souris soit mis hors circuit. Et il n’est pas le seul à Gotham à nourrir un sentiment de rejet envers les super-héros. Ce sentiment a déjà souvent été traité dans des comics comme Spider-Man, par exemple, mais il est ici d’une toute autre agressivité. On y trouve en effet, outre une police bien remontée, un collectif anarchiste nommé Unsanity au style fluo les désignant d’office comme des anti-Batmen mais qui sont bien plus intéressants que ça et avec qui Bruce va établir des liens surprenants.

Dans Gotham, de plus en plus de gens sont révoltés contre les héros depuis le Jour A, nom donné à ce jour tragique où un gaz toxique s’est répandu dans l’asile d’Arkham, n’épargnant que quelques soignants et un garde sauvé par Batman. Tous les pensionnaires sont morts, ce qui fait table rase des méchants de très grosse envergure comme Bane, par exemple, et offre donc à Batou une Gotham qui n’est plus infestée de super-vilains, même si certains sont encore d’actualité.

Pour preuve, l’on soupçonne Unsanity d’être allié de gré ou de force à l’Épouvantail qui est bel et bien toujours vivant et qui a rarement été mis en scène de façon plus terrifiante, grâce au dessin de Jorge Jimenez. En parlant d'Unsanity... Jimenez ne serait-il pas un joueur du jeu de plateau Necromunda ? Parce que leurs looks semblent être de véritables copies de celui du gang Escher... ce qui me motive à peindre un gang aux couleurs des Unsanity, moi. Argh ! Encore du boulot...
 
À noter que le garde sauvé par Batou nourrit une haine grandissante pour les actions du héros qu’il considère responsable de l’émergence de super-vilains (un thème déjà abordé avec le Syndicat des Victimes dans les Detective Comics) et que l’on s’attend à voir ce personnage devenir un sérieux caillou dangereusement pointu dans la botte de Bruce. Remarquons aussi la présence du Ghost-Maker (défenseur de Gotham depuis Joker War) et de Harley Quinn dans un duo aussi improbable que sympathique à suivre mais aussi, quelque part sous Gotham, celle de Poison Ivy qui réserve encore des surprises, à n’en pas douter.

Ce nouveau cru de Batman est enthousiasmant en tous points, tant par ses nouveaux protagonistes et antagonistes intrigants que par le traitement exceptionnel réservé aux anciens. Scénaristiquement, il surprend et tient en haleine. Visuellement, il y a depuis quelques temps chez l’homme chauve-souris une patte qui impose le respect. Les traits sont impeccables, les couleurs vivantes et vibrantes, le découpage est signifiant. Il est le porte-étendard de DC et il claque au vent avec fierté, se permettant même de faire plus d’une fois allusion à l’actualité ; il pousse par exemple les citoyens à se cloîtrer chez eux et à acquérir des masques afin d’échapper à la toxine de l’Epouvantail… si ça ne vous rappelle pas un certain confinement contemporain de l’écriture de ce volume, vous avez dû vivre en orbite ces deux dernières années ! 

Un vrai bon Batman moderne qui n'hésite pas à secouer son personnage central une fois de plus !


DC INFINITE WONDER WOMAN #1 - Les mondes au-delà


Wonder Woman n'est plus. Mais bon, c'est une demi-déesse, fille de Zeus, hein... son aventure ne fait que commencer ! Après ce qu’elle vécut avec la Quintessence, Diana se réveille à Asgard au milieu d’un champ de bataille où Thor et Siegfried livrent d’incessants combats mortels. Ce n’est bien entendu pas sa place mais l’Olympe lui est momentanément refusée pour une raison que nous n’apprendrons que plus tard. Pour l’heure, elle est amnésique et dépourvue de ses pouvoirs, se lançant comme tous les autres dans d’innombrables batailles finissant par sa mort et sa résurrection au banquet des dieux nordiques dans le Valhalla… où elle noue une amitié assez torride avec Siegdfried. Ne plus avoir de pouvoir et mourir sans cesse… voilà qui est ironique pour une héroïne ayant récemment accédé à l’invulnérabilité et à l’immortalité divines.Elle apprend bien vite qu’Yggdrasil, l’arbre au centre du monde, se met à dépérir et que les Walkyries ne ramènent plus les morts à la vie. L’ordre des choses est remis en question et, comme on ne se refait pas, Diana va accepter la tâche de remettre de l’ordre dans tout ça. 
 
Dans la suite du tome, elle voyagera de mondes mythologiques en mondes parallèles en compagnie de Ratatosk, l’écureuil messager du monde d’Asgard, à la poursuite d’une divinité rebelle et meurtrière de masse planifiant d’écrire un futur selon ses ambitions propres. Le passage d’un monde à l’autre coïncide avec des changements graphiques radicaux (oui, le même principe que dans Into the Spider-Verse dont la suite s’annonce user plus encore du procédé) et c’est avec plaisir que l’on découvrira les pattes de Travis Moore, Andy McDonald, Jill Thompson et Becky Cloonan pour illustrer ce périple.
 
Asgard est belle et réaliste, Elfhame a la féérie d’un conte pour enfants… et les autres mondes ont tous leur approche graphique spécifique qui est la plupart du temps une réussite.
Wonder Woman se réinvente graphiquement à chaque monde mais conserve sa personnalité guerrière et l’assurance qui lui est propre. Il y même a longtemps qu’elle n’a plus bénéficié d’une telle aura d’insouciance due à sa grande puissance et lui retrouver un ton léger face au danger est très agréable.

L’histoire a l’intelligence de répondre à chacune des interrogations qu’elle sème (Pourquoi arrive-t-elle à Asgard et non en Olympe ? Qui donc est cette divinité rebelle ? Pourquoi fait-elle tout cela ?) avant de nous offrir un ultime retournement de situation certes inattendu mais foncièrement logique et, surtout, avant de nous proposer un final justifiant sans nul doute un retour de Diana à un statut différent pour la suite des événements.
 
Un album qui vous emporte sans complexe dans divers univers avec bonheur et maîtrise. Une réussite, ni plus ni moins. À dire vrai, il est même potentiellement apte à séduire bien au-delà du cercle des fans de la belle Amazone. Il pourrait même convaincre en dehors des amateurs de comics. En effet, son accessibilité, sa légèreté, son isolement du reste de l'univers des comics et son humour lui permettent de faire du pied à un très large lectorat (si ledit lectorat est assez ouvert d'esprit pour empoigner un gros pavé de chez Urban bien entendu). On y retrouverait presque l'émerveillement tout enfantin que l'on avait lorsque, gamin, l'on feuilletait les premiers tomes de Thorgal où magie et mythes côtoient batailles épiques et sentiments sincères...


DC INFINITE SUPERMAN #1 - L'ascension du Warworld


Superman a un coup de mou : ses pouvoirs semblent diminuer depuis son affrontement avec les créatures de la brèche. Se pourrait-il que l’Homme d’Acier faiblisse ? Batman, du coup, craint pour la sécurité de la planète et demande à Clark de suggérer à son fils Jon de réfléchir à devenir un jour le nouveau Superman. Mais ce passage à vide n'empêche aucunement Superman de vouloir encore et toujours prendre en mains la plupart des soucis d'ordre extraterrestre que la Terre peut rencontrer. Et dans le genre souci, ça va y aller fort ! En effet, Clark est prévenu de l'arrivée de vaisseaux warsiens dans l'atmosphère terrestre, au-dessus de l'Atlantique nord. A bord du seul de ces vaisseaux que la "Super Family" ne va pas atomiser, Clark trouve des fuyards asservis par le nouveau Mongul qui semblent étrangement parler un très ancien dialecte kryptonien. 
 
Outre ces gens visiblement très affaiblis et souffrant depuis des années de multiples traumatismes témoignant d'une vie d'esclavage et de mauvais traitements, le vaisseau (désormais au fond de l'océan... et donc sous la protection jalouse d'Atlantis) renferme également un fragment d'un matériau inconnu et gravé de symboles dont émane une puissance incroyable. Malheureusement, le bidule va attiser les convoitises des Atlantes comme des gens de la surface et... il va encore falloir que Superman se mouille au propre comme au figuré pour empêcher qu'éclate un conflit de grande ampleur. En plus de cela, Superman ne saura s'empêcher de nourrir l'ambition de partir sauver, sur Warworld, les compagnons d'infortune de Thao-La, la seule réfugiée avec laquelle ils entreront vraiment en contact.
 
Évidemment, tout cela est un piège. Superman le sait. Et son fils s'en doute lui aussi, lui qui a vécu dans le futur et qui sait que les derniers événements relatés de son père y étaient son combat près de la brèche... il se doute bien que son père est sur le point de disparaître. Mais Superman est ce qu'il est : il va bien entendu voler au secours de ce peuple opprimé parlant un ancien langage de Krypton. 

Superman Infinite #1 sert de prologue à la saga Warworld qui amènera l’Homme d’Acier à quitter la Terre (en la confiant au passage à son fils Jon Kent). Ce premier volume collecte les numéros d’Action Comics #1030 à 1035 écrits par Phillip Kennedy et dessinés par Daniel Sampere, ainsi que d'Action Comics 2021 Annual #1 écrit par le même Kennedy et illustré par Siya Oum.La série Superman Infinite va donc nous offrir un Superman bien plus jeune en la personne de Jon à partir du tome 2.
 
En ce qui concerne, ce tome 1, il offre à notre super mec une nouvelle noble cause, une cohésion familiale autour de lui qui fait plaisir à voir, de superbes planches de bravoure graphique et... quelques très belles idées scénaristiques. J'en veux pour exemple l'explication selon laquelle la réfugiée du vaisseau warsien n'accepte pas de se libérer de ses chaînes malgré le fait qu'on lui dise qu'elle est libre : chaque maillon de sa chaîne a été prélevé sur celle d'un ennemi vaincu. Elle représente donc sa force et le nombre d'ennemis qui la craignent tout en ayant le double "avantage" (c'est vachement relatif) de lui faire gagner en amplitude de mouvement en allongeant la chaîne et de la faire devenir plus forte en la musclant grâce au poids de la chaîne... là où les vaincus perdent en amplitude et s'affaiblissent. Cette façon d'imaginer une justification à l'esclavage par les esclaves eux-mêmes est aussi osée que bien construite. Par contre, j'arrête tout de suite les Jean-Kévin qui diront : "Ouais, et en plus, elle est noire, Thao-la, alors ça rappelle..." Ta gueule ! Non mais ta gueule ! Tous les peuples de la planète ont été esclaves un jour ou l'autre et qui que soient lesdits esclaves, l'esclavage est une horreur inacceptable, okay ? En plus, tu es un con, Jean-Kévin : les compagnons de Thao-La ne sont pas noirs, eux. Alors, ta gueule !


Alors oui : un omnivers, c'est casse-gueule au possible. Oui, ça promet la légitimation de plein de trucs vraiment moyens. Oui, un des mondes visités par Wonder Woman dans son album sent déjà un peu le n'importe quoi (mais je n'en parlerai pas, histoire de rester calme). Oui, c'est risqué mais c'est aussi le plus beau, le plus vaste, le plus ouvert à l'imagination de tous les terrains de jeux pour les scénaristes et ça... ça, c'est bien ! Oui, on aura sans nul doute des catastrophes industrielles devenant canons. Mais si le nombre de celles-ci est très inférieur aux albums de la qualité de ce Wonder Woman, de ce Batman et de ce Superman... eh bien, je signe à deux mains avec un marqueur indélébile !


[1] Urban Comics a déjà annoncé les publications de Joker Infinite, Harley Quinn Infinite, Nightwing Infinite, Batman Detective Infinite et Robin Infinite, soit cinq séries Infinite autour du Chevalier Noir ! Heureusement, Flash Infinite et Superman - Son of Kal El Infinite viennent compléter le tableau – pour l'instant. Toutes seront en vente d'ici fin avril 2022.


+ Les points positifs - Les points négatifs
  • L'omnivers est une porte désormais grande ouverte par DC permettant de tout rendre canon, absolument tout ! Et jusque là, c'est géré d'une main de maître.
  • Les scénarios sont (pour l'instant) bien foutus et suffisamment axés autour d'un nombre de personnages limités pour être compréhensibles par tout le monde.
  • Graphiquement magnifique (pour le moment) !
  • L'omnivers est une opportunité qui peut sans effort devenir une menace pour DC, en cela qu'il autorise la justification de n'importe quoi... espérons qu'il y aura peu de dérapages.
  • Même si les histoires restaient toujours impeccablement écrites et illustrées, attention à bien restreindre le plus possible le nombre de Terres et de héros par album : il faut que ça reste compréhensible !