La Parenthèse de Virgul #38
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Hello les matous ! 
On évoque aujourd'hui un célèbre Club, une très mauvaise idée et un produit hybride qui vaut quand même le coup d'œil. 
Bonne lecture ! Miaw !

Le Club tente la fusion impossible
Qui ne connaît pas la célèbre série de romans The Famous Five, traduite en français sous le nom tout aussi célèbre de Club des Cinq ? Les récits d'Enid Blyton ont en effet réussi l'exploit de faire vibrer (et d'initier à la lecture) des centaines de milliers de lecteurs. Après la disparition de l'auteur, la traductrice française, Claude Voilier, se voit confier la difficile tâche de faire perdurer le groupe d'adolescents. De 1971 à 1985, ce sont donc 24 aventures supplémentaires qui vont être publiées.

Jusqu'ici, l'idée peut sembler bonne, Voilier ayant le mérite de très bien connaître l'univers du Club. Mais ce n'est pas tant le style du nouvel auteur (jugé moins bon que Blyton, surtout en Grande-Bretagne, ce que l'on peut aisément comprendre) qui va être en cause, mais l'idée, assez absurde avec le recul, de l'éditeur.
Les premières éditions de ces ouvrages vont en effet comporter une particularité de taille : ce sont à la fois des romans et des bandes dessinées. Une sorte de fusion de supports...
Et cette fausse bonne idée va nuire profondément à cette seconde série, en réussissant l'exploit de décevoir tout le monde.

Voyons un peu comment cela se présentait à l'époque. D'un côté (pages de gauche), l'on pouvait lire le récit en roman, et de l'autre côté (à droite donc, forcément), l'on avait la même scène en BD. Première remarque, il ne s'agit donc pas d'une histoire racontée à moitié en prose et à moitié en BD, mais bien de la même histoire racontée deux fois. Là, déjà, ça peut surprendre. Pourquoi voudrait-on relire en BD un récit que l'on vient de terminer en roman, ou inversement ? 
Mais surtout, ce mélange des genres va en fait parvenir à ruiner les deux transpositions.

Ces livres ont notamment la même pagination que les romans originaux de la première série. Ils ne sont pas plus longs. La partie roman est donc très courte, ce qui déçoit forcément les fans, habitués à avoir une histoire bien plus développée à se mettre sous la rétine. Pour la partie BD, c'est pire encore. Le petit format ne permet pas de placer plus de deux ou trois (petites) cases par planche (cf. illustrations ci-dessous). Ce qui interdit toute narration fluide et suffisamment bien fichue. En fait, la partie BD n'est qu'un très bref résumé de la scène qui est décrite en vis-à-vis. Difficile du coup, pour les amateurs de BD, d'accrocher à un récit bancal et artificiel. Et en plus, les illustrations sont en noir & blanc, seules quelques pleines pages bénéficiant d'une colorisation. 
Il faut également noter que certains lecteurs, par curiosité, étaient naturellement tentés de lire la partie BD après avoir lu la page roman correspondant à la même scène (après tout, c'est un peu comme ça qu'on est censé lire un livre, on ne saute pas une page sur deux), ce qui revenait non seulement à se taper un mauvais résumé de ce qu'ils venaient de lire, mais ce qui parvenait aussi (un comble !) à casser le rythme de l'histoire. Bel exemple de maquette mal pensée qui dessert le contenu qu'elle est censée mettre en valeur. 

Ces versions hybrides se sont tout de même vendues, parce que mine de rien, il s'agit d'une grosse licence qui rassemble un grand nombre de passionnés encore aujourd'hui, mais ce format totalement grotesque a fait un énorme flop alors qu'il était censé élargir le public du Club...
Résultat : quelques années plus tard, la partie BD a été supprimée des rééditions, les versions "roman/BD" devenant alors une simple curiosité à placer, dans votre bibliothèque, au rayon des drôles d'expérimentations commerciales. 

Allez, tant qu'à évoquer le Club, on vous conseille cet excellent roman de Michel Pagel, dans lequel l'auteur fait revivre d'une incroyable manière ces personnages bien connus à l'âge adulte.
Et ça, c'est un pur roman, sans petits dessins une page sur deux. Miaw !