A World at War
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On se plonge aujourd'hui dans un wargame stratégique légendaire : A World at War.

Bon, les amis, autant se le dire tout de suite, là on n'est pas du tout sur du Bang ou du Shogun, si votre but c'est de faire une partie rapide entre amis pendant l'apéro, vous pouvez oublier tout de suite AWAW, vous n'êtes probablement pas la cible. Parce que ce jeu, il va falloir le mériter. Lire les 200 pages de règles, déjà. Et les nombreux appendices. Préparer le terrain et les armées. Trouver une place chez vous pour étaler cartes, tables de résolution et tout votre bordel. Et dénicher quelqu'un d'assez fou pour s'embarquer sur une partie qui va durer probablement quelques... semaines ? Mois ?

Maintenant qu'on vous a un peu fait peur, commençons par le début. 
AWAW est un wargame à l'échelle stratégique se déroulant sur les théâtres d'opération européen et pacifique durant la Seconde Guerre mondiale. Huit puissances majeures sont jouables : France, Angleterre, Allemagne, Italie, URSS, États-Unis, Japon et Chine. La simulation est très poussée, puisqu'elle comprend, outre les opérations militaires, des volets diplomatiques, économiques et scientifiques. Même la météo est simulée. Bien sûr, comme souvent dans les wargames, le ravitaillement va s'avérer crucial.
Un tour de jeu représente trois mois dans la réalité (chaque année étant décomposée en 4 tours, correspondant aux 4 saisons). La plupart des actions nécessitent des points de ressources économiques, appelés BRP. C'est ce qui va vous permettre de construire des unités, développer votre recherche ou encore déclarer la guerre à certains pays.   

Une petite partie des planches de pions présentes dans le jeu.


Les cartes sont détaillées et indiquent notamment
zones industrielles et ressources pétrolières.
Le jeu contient 4 cartes, représentant l'Europe (et une partie de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient) pour deux d'entre elles, une partie de l'Asie et de l'Océanie, ainsi que le Pacifique pour les deux autres. 
Assemblées, 2 cartes (représentant donc un théâtre d'opération) recouvrent une surface de 110 x 75 cm.
En ce qui concerne les unités, nous sommes sur des pions (bien plus pratiques que des figurines, notamment pour l'empilement) de différentes couleurs affichant des symboles OTAN. Outre le type d'unité (infanterie, paras, blindés, aviation, destroyer...), l'on trouve sur ces pions diverses indications, notamment la puissance, la mobilité et parfois certains renseignements secondaires (le nom de la division ou du bâtiment). 

La boîte contient 2800 pions, répartis sur 10 planches. L'on retrouve divers marqueurs, les armées des puissances majeures citées plus haut, mais également les troupes de certains pays mineurs (Irlande, Pays-Bas, Suède, Norvège, Ukraine, Belgique, Pologne, Turquie...). Bref, il y a de quoi faire.
Un rangement en plastique (avec une vingtaine d'emplacements) ainsi que des sachets sont fournis. D'une manière générale, le contenu est soigné, très complet et relativement pratique (sauf les règles, livrées en feuillets détachés qu'il faut relier, mais elles existent aussi en PDF et en français, et sont facilement trouvables sur le net). 
Le nombre de joueurs peut varier de 2 à 6 (voire plus en fait) et l'on peut même tenter des parties solo.

Une infime partie du théâtre pacifique, où les unités aéronavales joueront un rôle déterminant.


Passons au vif du sujet et au point qui fait peur : la jouabilité.
Il faut dire que AWAW se traîne une réputation (pas entièrement fausse) d'usine à gaz. Et il est vrai que l'immense richesse du jeu le rend également relativement complexe. Peu de gens ont notamment envie de s'attaquer au pavé de règles. Ceci dit, il convient de préciser plusieurs points à ce sujet.
Tout d'abord, il faut savoir que 10 % des règles sont utilisées 90 % du temps, ce qui est courant dans ce genre de jeu, vu l'extrême particularité de certains points. De plus, les concepteurs ont fait le choix d'être volontairement redondants, afin que les joueurs puissent facilement trouver l'info qu'ils recherchent. Par exemple, une information concernant les effets de la météo sur les unités blindées se trouvera à la fois dans la rubrique météo et dans la partie unités. De plus, cette version étant la troisième édition du jeu, lui-même dérivé d'autres jeux plus anciens (Advanced Third Reich et Rising Sun), les auteurs ont intégré de nombreuses précisions grâce aux retours et questions des joueurs. Enfin, il est tout à fait possible d'écarter certains éléments (la recherche par exemple) pour se laisser le temps de maîtriser les règles essentielles.

Le jeu prévoit aussi d'éventuelles attaques atomiques.
Sympa, non ?
Tout cela fait que, mine de rien, AWAW est moins effrayant qu'on pourrait le croire. Mais effectivement, il nécessite un engagement conséquent, même d'un point de vue logistique, ce qui le destine aux passionnés du genre. On n'est clairement pas sur un Uno. D'autant qu'une partie va nécessiter de trouver, outre des joueurs motivés, un support suffisamment grand pour y installer cartes, rangements, règles et tableaux. Et ce pour une durée indéterminée. 
Il faut encore aborder la question du prix. Cette lourde boîte est estimée à 190 euros sur certains sites, on peut toutefois la trouver en neuf aux alentours de 150, ce qui est correct vu le contenu et la portée du jeu mais reste un investissement conséquent. Là encore, ce n'est pas vraiment le grand public qui est visé.

Il s'agit donc d'un excellent jeu, ambitieux et passionnant, mais qui cible une catégorie de joueurs très particulière : ceux dont l'imagination est enfiévrée lorsqu'ils contemplent pendant des jours des petits carrés sur des hexagones. Probablement les mêmes qui ont passé autrefois des heures sur Tobruk 1942 ou Battlefield Germany (cf. cet article) et qui connaissent donc le plaisir subtil de refaire l'Histoire tout en étant à la tête des plus prestigieuses armées.

Différents tableaux et résumés aident à "digérer" les règles.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Une simulation poussée et très complète, ne se limitant pas au seul domaine militaire.
  • Un matériel globalement de qualité (notamment les unités). 
  • Représentation des forces de nombreux pays mineurs.
  • Rangements fournis.
  • De jolies et grandes cartes. 


  • Nécessite un investissement en temps important.
  • Cartes sur du simple papier, et non un support cartonné.
  • Le côté "usine à gaz".
  • Le prix, même si on est loin d'être volé vu le contenu.
  • Les feuillets de règles à relier soi-même.