Spider-Man 2099
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Au début des années 90, Marvel lance une version futuriste du Tisseur : Spider-Man 2099.

New York, 2099.
De puissantes corporations dirigent la ville haute alors que les citoyens les plus pauvres vivent dans les bas-fonds, livrés aux gangs. Miguel O'Hara, un scientifique employé par Alchemax, l'une de ces sociétés possédant même sa propre police privée, travaille sur le programme O.P.A. (Opérateur à Potentiel Augmenté), destiné à décupler les capacités d'un être humain lambda.
En désaccord avec la politique de ses patrons, Miguel, à son insu, est rendu accro au nirvana, une drogue agissant au niveau moléculaire. Alchemax étant le seul producteur autorisé du produit, la société détient maintenant un énorme moyen de pression sur O'Hara.
Pour échapper à cette emprise, Miguel tente une expérience qui tourne mal. Le voilà maintenant affublé de griffes et de crocs !
Pour dissimuler son identité, il endosse un costume acheté au Mexique lors de la fête des morts. Un nouveau Spider-Man est né. Peu à peu, il va prendre conscience de la nocivité des corporations et se dresser contre elles.

Panini a réédité les premiers épisodes de Spider-Man 2099 en 2012, dans sa collection Marvel Best Of. Le scénario est écrit par Peter David (Madrox, X-Factor, cf. cette Parenthèse), les dessins sont l'œuvre de Rick Leonardi.
Graphiquement, le plus gros point noir provient des décors, minimalistes voire quasiment absents de certaines planches. Cela n'aide pas vraiment à donner de l'épaisseur au pourtant intéressant univers futuriste décrit ici. Heureusement, l'artiste s'en sort mieux avec les personnages, notamment Spider-Man. Le papier glacé ne pardonne pas grand-chose aux couleurs très flashy et manquant de nuances, mais l'ensemble possède malgré tout un certain charme.

C'est au niveau du récit que l'on trouve les éléments les plus intéressants. Tout d'abord, Peter Parker est remplacé par Miguel O'Hara, un scientifique lui-aussi, mais très différent de son prédécesseur. Il est d'origine irlandaise par son père, mexicaine par sa mère, mais c'est sur le plan de la personnalité que O'Hara s'écarte le plus de Parker. Il est sûr de lui, un brin vantard, et n'attend pas d'être déguisé pour faire preuve d'un humour d'ailleurs assez percutant.


Outre un costume emblématique faisant partie des plus réussis (cf. notre dossier consacré au sujet), le monde de 2099 est également fort bien élaboré et fourmille de bonnes idées. Les peines judiciaires consistent par exemple parfois en un vieillissement artificiel (efficace pour combattre la surpopulation carcérale, mais quelle pratique délicieusement horrible !). Les interfaces des programmes qui assistent les habitants des luxueux appartements de la ville haute prennent la forme d'hologrammes variés (dont l'une permet même de se moquer gentiment de la tante May, absente ici de l'histoire, ouf !). L'ancien âge des héros est également exploité puisque Thor a donné naissance à un culte dont les adeptes attendent impatiemment le retour du dieu nordique.

L'ambiance générale fait penser à 1984 par certains côtés, ou encore à Judge Dredd (cité d'ailleurs dans l'œuvre). La disproportion des moyens de contrôle, la privatisation poussée à son extrême le plus stupide (il est même possible de racheter des casiers judiciaires), l'abandon des plus faibles dans des zones ultra-violentes, tout cela donne un cadre inhabituel et un arrière-plan paranoïaque pour un Spider-Man plus sombre, plus violent, plus radical aussi que son homologue contemporain.
Au niveau traduction, pas de grosses bourdes si ce n'est un malheureux "hypochondriaque". Certaines expressions, comme "calancher" ou "drôle de chambard", semblent toutefois maladroites dans le contexte. La série ne datant que des années 90, et étant en plus censée se dérouler dans le futur, des termes plus modernes, ou neutres donc intemporels, auraient été plus adéquats (mais ce n'est pas la première fois que Panini bâcle une traduction, cf. l'encadré de cet article).

Le personnage apparait encore régulièrement de nos jours dans diverses séries. Il a même été un temps bloqué dans le "passé" (donc, le présent de l'univers 616 classique), ce qui a donné lieu à une série Spider-Man 2099 (vol. 2), avec de nouveau Peter David aux commandes, cette fois accompagné par Will Sliney aux crayons. La qualité fut au rendez-vous, avec la finesse d'écriture et l'humour habituels de David.
Notons que les premiers arcs de ces deux séries ont été réédités par Hachette en novembre 2018, dans le tome 74 de sa collection "Le meilleur des super-héros Marvel".

Probablement l'univers alternatif Marvel le plus intéressant avec Ultimate.
Une belle manière de revisiter le mythe de l'Araignée.



+ Les points positifs - Les points négatifs
  • Un univers futuriste intéressant.
  • Un Tisseur réellement différent.
  • L'humour et la subtilité de Peter David.

  • La colorisation d'époque, pas toujours à la hauteur des dessins.
  • Certains décors minimalistes.