La Parenthèse de Virgul #33
Par

Alors les matous, ça ronronne dans les chaumières ?
Petite parenthèse aujourd'hui sur une unité de mesure qui n'en est pas une : la page.
Miaw !

De la véritable longueur des romans
Cela peut paraître surprenant, mais estimer le volume du contenu d'un livre en nombre de pages est absurde. Parce qu'une page ne correspond à rien. Un même texte, suivant les éditeurs, peut très bien tenir sur 200 pages ou 400, et sans que l'ouvrage paraisse affreusement dense ou trop délayé.
Cela dépend de très nombreux éléments, comme le format du livre, la police employée, la taille de cette police, les marges, les interlignes, le volume de dialogues, les alinéas, les possibles illustrations, bref, bien trop de choses en réalité pour que le terme "page" puisse correspondre même vaguement à quelque chose de concret.

Il existe donc des romans de 300 pages qui sont en réalité plus longs que certains romans de 400 pages. Relisez la phrase précédente une deuxième fois, elle vaut le coup ! Pourtant, les journalistes, les éditeurs, les libraires, les sites de vente et même les lecteurs font toujours systématiquement référence à ce nombre de pages, censé donner une indication sur la longueur d'un texte. Indication totalement illusoire et aussi précise que si l'on parlait de "cartons" ou de "paquets" pour mesurer la viande (qui s'achète au kilo) ou les Lego (dont on connaît le nombre de pièces).

Il serait pourtant facile, si l'on tient vraiment à indiquer la longueur d'un texte (ce qui n'est évidemment pas le seul élément qui en détermine le prix, attention à ne pas faire de comparaisons hasardeuses), de recourir à de véritables unités de mesure, comme le nombre de mots ou, encore mieux, le nombre de signes. Les comparaisons (sur la longueur d'un texte, et uniquement cela, pas le prix d'un livre) auraient alors un véritable sens. Cela ne demanderait pas non plus un effort particulier puisque ces tailles véritables sont aujourd'hui facilement connues (grâce aux traitements de texte).

Mieux encore, dans le monde de l'édition, tout se détermine en nombre de signes (voire, plus rarement, de mots). Le prix d'un texte est fixé en fonction du nombre de signes (que ce soit pour la traduction, la relecture, la rédaction, en presse ou dans l'édition classique). Les concours littéraires amateurs ont tous (ou presque) recourt à une limitation de "taille" grâce au nombre de signes. Un éditeur va juger de l'opportunité de publier un récit en plusieurs tomes grâce à ce même nombre de signes. Et pourtant, dès que l'on s'adresse aux lecteurs, on leur parle en pages, c'est-à-dire qu'on refuse de leur donner une information réelle. Étrange, non ? C'est un peu comme si, pour vous donner l'autonomie d'un véhicule électrique, on ne vous parlait pas en kilomètres mais en "trajets"...

Bref, sans vouloir se focaliser là-dessus, il ne serait pas idiot de préciser, même de manière discrète à l'intérieur du livre, le nombre de signes d'un texte. Cela n'augurera en rien de sa qualité, mais il s'agit d'une information que le lecteur (qui est le seul à n'en pas disposer) est sans doute en droit d'avoir.