Deux clans ennemis constitués de gosses abandonnés sur une planète dévastée.
Un troisième qui se voudrait neutre et au service des deux.
Une d'entre eux disparue et qui laisse un grand vide...
Qui sont-ils ?
Pourquoi les a-t-on abandonnés là ?
Quel était ce terrible conflit qui a éclaté à proximité et après lequel ils semblent avoir été laissés sur place ?
Y a-t-il moyen de reprendre contact avec l'Humanité ?
Mia est-elle vraiment morte ou est-elle encore en vie ?
Et, enfin, qui sont... les autres, ces étranges créatures anthropomorphes sans doute extraterrestres dont on ignore même encore si elles sont ou non hostiles ?
Sont-ce les descendants d'autres belligérants du combat qui a eu lieu il y a des années en bordure de la ville ?
Faut-il les craindre ou... le danger vient-il encore d'ailleurs ?
Dans Enemy mine, un militaire humain engagé dans un conflit contre une mystérieuse race extraterrestre va être abattu en plein vol lors d'un combat aérien par un vaisseau ennemi qui va, lui aussi, s'écraser à la surface de la planète. Ennemis, ces deux rescapés vont peu à peu s'apprivoiser, jusqu'à un des dénouements les plus humanistes, à mes yeux, de l'histoire du cinéma.
Le dessin et la mise en couleurs de Savarese sont d'une qualité constante et les seules choses qui m'ont parfois un peu sorti de l'univers de la BD résident en une étrange maladresse dans certains lettrages faisant partie du dessin, comme certains mots apparaissant sur l'écran ventral des roboéducs qui semblent trop peu précis pour un affichage numérique ou, au contraire, certaines onomatopées si régulières qu'on les croirait tapées dans Wordart là où on attendrait plus de vie.
Nous savons tous à quel point la sémantique de la mise en page gagne en importance dans les bandes dessinées depuis que les comics et les mangas ont débarqué en nos européennes contrées et se sont permis de mettre des coups de pieds énergiques à nos vieilles habitudes. La BD moderne ne se conçoit plus en strips et Ornella Savarese l'a bien compris : même si ses incursions dans le monde des cases scalènes et irrégulières sont encore timides, elles sont toujours porteuses de sens.
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Tout a mené à ce tome 4. Tout a conduit à cet affrontement final.
Mais cet ultime épisode fait-il davantage qu'apporter une simple conclusion ?
L'Humanité a rarement été dépeinte avec autant de sévérité dans un comic book : depuis l'imposture initiale que constitue le statut de héros de certains des personnages jusqu'aux lâchetés et compromis auxquels sont prêts à se livrer les héros, on n'en sort guère grandis et ce n'est finalement pas vraiment aux humains que l'on doit leur survie...
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Dans Saint Seiya : Épisode G - Assassin, l'on suit Shura, Chevalier d'or du Capricorne, qui mène une croisade contre des guerriers armés d'épées légendaires. Shura est "l'assassin des assassins". Mais le Grand Pope ne l'entend pas de cette oreille et compte bien lui mettre des bâtons dans les roues en lui envoyant Aiolia dans un premier temps. Shura croisera nos cinq Chevaliers historiques (Seiya, Shun, Hyoga, Shiryû et Ikki) et la plupart des Chevaliers d'or connus. Mais attention, tous sont en retrait et ont un rôle vraiment secondaire.
L'ensemble du titre est assez mal rythmé et développé. Visiblement le scénario est signé Masami Kurumada lui-même, on a du mal à y croire et on penche plutôt pour une écriture de Megumu Okada – qui s'occupe intégralement des dessins – avec une validation du maître dans un second temps. En effet, Megumu Okada avait écrit et dessiné entre 2002 et 2013 la série Saint Seiya : Épisode G. Assez inégale, la fiction mettait en avant pour la première fois uniquement les Chevaliers d'or, en suivant notamment Aiolia (Lion) dans des événements antérieurs à la série-mère. Le rapport avec Saint Seiya : Épisode G - Assassin ? Aucun si ce n'est qu'on suit à nouveau des chevaliers d'Or (le fameux G du titre, pour Gold en anglais) et que c'est toujours dessinée par Okada (de 2014 à 2019 pour Assassin). Depuis 2020, le mangaka est à l’œuvre sur une troisième série : Saint Seiya : Épisode G - Requiem, écrite à nouveau par Kurumada et qui serait la dernière de cette "trilogie".
Ensuite, si Shura reste au centre de l'intrigue, on apprécie nettement plus les échanges avec d'autres Chevaliers ; même si ça ne fait pas forcément avancer le récit, on s'étonne de suivre avec plaisir les déclinaisons dans cet univers du Chevalier d'or des Poissons ou du Cancer ! Enfin, malgré tout l'intérêt du concept initial, le cheminement et la conclusion ne sont pas très passionnants, la fin est très soudaine, ouvrant sur une suite (on pouvait penser à la fameuse Requiem, évoquée plus haut, mais visiblement non, il faudra donc se contenter de ça) et, finalement, l'ensemble n'aura pas vraiment eu d'autre intérêt que celui de regarder des jolies planches en couleur, parfois.
C'est là le point fort (l'unique ?) de Saint Seiya : Épisode G - Assassin, les dessins bénéficient tous d'une colorisation extrêmement soignée, conférant, c'est le cas de le dire, une nouvelle dimension aux Chevaliers du Zodiaque (et qui manquait cruellement à la série précédente du même mangaka, Épisode G donc). Mais attention, cela ne veut pas dire que toute la partie graphique est réussie, au contraire ! Si les armures sont sublimes et les scènes de combat plutôt épiques (grâce, entre autres, aux palettes chromatiques appliquées), les cases perdent vite de leur aura dès qu'elles ne présentent pas un Chevalier en armure ou qu'elles se concentrent sur les visages (majoritairement androgynes pour tous les hommes) ou la vie quotidienne des protagonistes, donc en civil. En synthèse, sur seize volumes, à raison de sept à huit chapitres par tome, seulement un retient réellement l'intérêt de nos rétines – et encore, il faut que le dessin ne soit pas trop chargé en détails, ajoutant une confusion supplémentaire dans la lisibilité et fluidité de l'action !
Saluons la curiosité colorimétrique de la série ET de l'édition (Panini Manga propose l'intégralité en couleur et sur papier glacé, à raison de 8,99 € le tome). Malheureusement, à part quelques planches pleine page ici et là et la nostalgie de retrouver des têtes connues, ce manga, que l'on ne vous conseille pas d'acheter, n'est pas une réussite. Si vous pouvez l'emprunter en médiathèque ou à un ami (merci Stephen), c'est toujours ça de gagné !
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Un film de sorcières sans la moindre sorcière.
Ce qui ne l'empêche pas d'être ensorcelant quand même.
Et envoûtant. Mais sans sort ni envoûtement.
Pierre de Lancre est bien sûr un lecteur avide de ses prédécesseurs démonologues, et a en tête les stéréotypes de la sorcellerie démoniaque, notamment celui du sabbat. Ce sont les aveux de participation au sabbat et la description de cette réunion imaginaire de sorcières qui seront au cœur des interrogatoires que de Lancre fera subir à ses accusées (oui, avec un "e", tant il s'agissait essentiellement de femmes... même si quelques prêtres ayant eu l'audace de les défendre y passeront aussi ; les hommes de ces villages, marins de profession, étant occupés à la pêche à Terre-Neuve une saison durant).
Dans la VF, tout le monde cause français... Mais d'aucuns pensent bien que la France est un pays aux racines chrétiennes, n'est-ce pas ? Cela ferait bien plaisir aux inquisiteurs d'alors : ils ont gagné ! Alors que, soyons honnêtes, il existait bien des cultures en France avant tout cela... la culture basque, par exemple.
Cette délocalisation géographique en Espagne n'est pas historiquement exacte mais ça reste cohérent vu que, malheureusement, la répression inquisitoriale avait lieu du côté espagnol (par le clergé) comme du côté français (par des juges laïcs, ancêtres des actuels juges d'instruction... ceux que l'on soupçonne encore maintenant de faire des procès à charge en raison de leur double casquette de juge et d'enquêteur).
C'est ce qui rend ce film plus proche de nous. Plus réaliste, il aurait affiché des filles sales, avec des dents pourries et des charmes sans doute moins évocateurs pour la plupart d'entre nous... Ici, elles pourraient être des nôtres : nos sœurs, nos cousines, nos filles... On les imagine bien condamnées actuellement pour un crime qui n'existe pas et jugée par un homme qui a déjà écrit le procès avant même de les connaître. Vous savez, ces procès qui amènent à la lapidation, par exemple, au nom de... oh ben tiens, au nom d'une religion. Quelle coïncidence !
Un pamphlet contre ces obscurantismes qui se créent des ennemis pour singer la lumière
Selon les propres dires de Pablo Agüero : "Le film est conçu comme une bataille des Lumières contre l’obscurantisme. Ces femmes accusées de sorcellerie ont une pensée en quelque sorte plus rationnelle et plus proche de notre esprit contemporain que ces hommes imprégnés de religion. Certes, ils sont cultivés, mais leur culture théologique relève d’un délire fictionnel proche de la littérature fantastique !
Mission accomplie : c'est très exactement ce que l'on comprend au premier visionnage de ce film qui est d'une très belle efficacité dans la défense du droit des femmes et dans sa charge contre les dogmes religieux. Et ce sans jamais exprimer une seule fois de message en ce sens de façon explicite. Vous savez combien j'aime les œuvres qui ne nous prennent pas pour des idiots... en voici une !
L’accusé (ici Ana, spécifiquement) finit par devoir accomplir la tâche impossible de déjouer la trame d'un procès écrit d'avance pour sauver sa peau.
Les hommes en armes sont avec lui... mais certains fuiront, effrayés par les rumeurs de sorcellerie que parviennent à faire propager les captives par leur comportement.
Dans cette scène où les femmes enchaînées les unes aux autres (métaphore évidente de l'oppression masculine à leur égard comme de leur solidarité sororale acquise de haute lutte dans les geôles), elles n'ont pourtant jamais semblé plus libres... et la musique y est pour beaucoup.
Goya validé !
On sent là aussi l'envie des membres du jury d'insister sur toutes les qualités de ce métrage et, ma foi, je les en remercie puisque cet argument des cinq Goya poussera sans doute certains à franchir le pas et à regarder un bon film d'auteur (et ça, c'est une bonne chose !).
Parlons déjà de la lumière. Cette lumière diégétique et trop rarement utilisée au cinéma : le soleil naturel, sans aide aucune de quelque projecteur, la lumière d'un bûcher, d'une torche, d'une lampe... Tout cela renforce le réalisme et, par conséquence, l'immersion. Si vous ne voyez pas en quoi une lumière extradiégétique peut nuire à un film, visualisez les deux films de la franchise The Descent. Aucun des deux n'est un chef-d'œuvre, loin s'en faut ! Mais le premier nous offre un film horrifique qui amène son lot de tensions grâce à un éclairage diégétique cachant les recoins des grottes, n'éclairant les antagonistes qu'au moment où les héros braquent leurs torches sur eux... ça fonctionne, niveau ambiance. Le second fout des projecteurs extradiégétiques partout, ruine l'ambiance oppressante de son prédécesseur et devient de facto un navet poussif et prévisible.
Le film devait avoir une lourde concurrence parce que, en ce qui concerne l'humain, le jeu des acteurs est impeccable ! Il commence par être parfaitement juste et d'une grande précision puis, au fil du film, au fur et à mesure que la jeune Ana s'attache à offrir à l'inquisiteur ce qu'il souhaite pour retarder le plus possible l'heure fatidique de leur exécution, il se fait de plus en plus exagéré et halluciné, jusqu'à n'être plus que grandiloquence : le juge (un Àlex Brendemühl charismatique en diable, hèhè !) devient un être pathétiquement soumis à la tentation et les jeunes femmes deviennent une sorte d'incarnation d'une liberté farouche et féline qui trouve son apogée dans la fascinante scène de reconstitution d'un sabbat. Dans cette scène, ce casting féminin irréprochable distord et fracasse un chant populaire pour en faire une incantation satanique baignée de la lueur des flammes. Les jeunes femmes dansent, chantent, charment, se contorsionnent, crient et se libèrent métaphoriquement pendant que le juge leur cède... et perd la face. "Il n’y a rien de plus dangereux qu’une femme qui danse" avait auparavant dit le juge. Pour une fois qu'il avait raison, celui-là !
Bravo.
Cette jeune femme se nomme Amaia Aberasturi et elle crève l'écran. Je vais maintenant être plus subjectif et me montrer d'une mauvaise foi digne d'un fanboy de merde mais je soupçonne Patricia López Arnaiz (Goya 2021 de la meilleure actrice pour le rôle de Lide dans Ane) de n'avoir décroché ce prix uniquement parce qu'elle interprétait une môman à la recherche de sa fifille disparue... Oui, c'est bas et mesquin. En plus, je n'ai même pas vu Ane qui est peut-être un écrin de choix pour un jeu admirable de la part de cette actrice. Mais je m'en fous : je lui arrache virtuellement son Goya des mains et je l'offre genou en terre à Amaia Aberasturi !
Amaia Aberasturi n'est pas une sorcière mais, bien filmée et bien dirigée, elle est ensorcelante !
Mais oui, si vous avez envie de voir du cinéma d'auteur de qualité. Oui, si vous aimez les films porteurs de messages. Oui, si vous aimez les films à l'esthétique personnelle. Oui, si vous aimez les comédiennes jouant juste et les comédiens avec des gueules de cinéma. Oui, si vous avez envie de regarder une œuvre cinématographique donnant envie de creuser un peu plus loin, d'aller chercher plus que ce qu'elle offre (ce que j'ai fait, comme en atteste un peu cet article). Alors oui : ce film doit être vu et est disponible en Blu-ray et en DVD chez l'éditeur Blaq Out depuis le 7 décembre 2021 !
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