"Le seul tort de l'homme, finalement, est de ne pas admettre sa mort..."
Voici venir le deuxième volume de cette série, intitulé Moreau, qui se focalise évidemment sur le fameux docteur bien connu des fans de fantastique. Mais si, vous savez : le fameux savant reclus sur son île, qui expérimente sur des animaux afin de les faire évoluer jusqu'à en faire des sortes d'animaux-humains capables de parole et de pensée et tenus par la fameuse Loi :
"Ne pas marcher à quatre pattes. C’est la Loi. Ne sommes-nous pas des Hommes ?"
"Ne pas laper pour boire. C’est la Loi. Ne sommes-nous pas des Hommes ?"
"Ne pas manger de chair ni de poisson. C’est la Loi. Ne sommes-nous pas des Hommes ?"
"Ne pas griffer l’écorce des arbres. C’est la Loi. Ne sommes-nous pas des Hommes ?"...
Autant dire de suite qu'il ne sera guère utile de revenir sur l'esthétique de l'ensemble qui est tout à fait conforme à celle du premier tome. Pas plus utile de revenir sur les objectifs et la méthodologie de cet enthousiasmant projet mêlant personnages de fiction et figures historiques réelles... tout cela a été abordé dans le fameux premier article.
Alors, que nous reste-t-il ? Eh bien l'histoire, pardi !
Dans ce tome, nous allons côtoyer quelques-uns des plus brillants esprits de leur temps et quelques personnages de fiction parmi les plus fameux de la littérature et du cinéma. Sans trop vous révéler la raison de leur présence en ces lieux, sachez que le Docteur Moreau va inviter en son manoir nuls autres que l'érudit Charles Darwin (peu de temps avant qu'il ose proclamer devant des assemblées de scientifiques que les hommes descendent d'un simple animal et non d'un dieu supposé), la visionnaire Mary Shelley (plusieurs décennies après avoir écrit Frankenstein), l'impulsive Emily Brontë (encore jeune mais ayant déjà écrit Les Hauts de Hurlevent) et l'audacieux Richard Burton (officier militaire, explorateur, écrivain et diplomate ayant la réputation d'avoir expérimenté la plupart des perversions humaines).
Qui dit Moreau dit forcément entités mi-humaines, mi-animales. Et, forcément, notre distribution de luxe va être confrontée à ces créatures... Mais là où le scénario est remarquable, c'est que, en effet, chacune de ces grandes figures a, à sa façon, un lien logique avec les œuvres de Moreau.
C'est audacieux mais ça fonctionne très bien et l'album file à toute allure en navigant entre élégance victorienne, érudition, action et questionnements philosophiques.
Comme le tome 1, l'album contient un carnet de réflexions développant les liens logiques entre les personnages et, en quelques pages, c'est un condensé d'intérêts divers... une sorte de cabinet de curiosités en papier.
Moreau engendre des êtres dont il exige le plus possible d'humanité, le moins possible d'animalité.
Savant niant l'implication divine dans la création d'une vie intelligente, il est une sorte d'incarnation de la volonté de nier Dieu qui sous-tend les théories darwiniennes de L'Origine des espèces.
Nous avons donc là un album qui divertit tout en nous faisant réfléchir. Que demander de plus ?
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